La surenchère de déclarations, voire d’interventions guerrières autour de l’Ukraine a de quoi alarmer. Après une baisse des tensions en trompe-l’oeil, une nouvelle étape a été franchie le 21 février avec les déclarations de Poutine, même si les pourparlers sont — à l’heure où nous écrivons — maintenus. Un dialogue dont Macron voulait se faire le champion afin de booster sa campagne de non-candidat. Mais apparemment ses gesticulations n’ont pas été productives…
Après avoir accumulé des troupes et des engins de mort à sa frontière, Poutine a « reconnu » lundi soir l’indépendance des républiques de Donetsk et de Louhansk, proclamées en 2014 après l’annexion de la Crimée par la Russie et épaulées militairement par Poutine. Des territoires de fait autonomes depuis les fragiles « accords de Minsk » de 2015, qui prévoyaient de « geler » le conflit sur cette ligne de front, par un cessez-le-feu jamais respecté.
Par cette annonce, Poutine ouvre à l’armée russe la voie de ce Donbass où s’affrontent depuis huit ans des soldats ukrainiens et des « séparatistes » pro-russes – qui pourraient ainsi être directement soutenus par les soldats russes massés à proximité.
Les porte-parole de Biden annoncent une imminente invasion russe de l’Ukraine. Pour l’instant, ils répondent par des sanctions exclusivement économiques… à condition que les troupes russes ne progressent pas davantage vers l’ouest de l’Ukraine ? Bon gré, mal gré, les États européens semblent emboîter le pas à Washington au nom du « droit international ».
Est-il possible qu’avec ces conflits d’influence dans la région, la population d’Ukraine soit livrée à une guerre pire que celle qui déjà ensanglante l’est du pays ? Déjà 14 000 morts, combien encore et pourquoi ?
Poutine, insupportable autocrate
Il ne fait pas de doute que Poutine emprisonne voire fait assassiner ses opposants, qu’il cherche à étouffer toute contestation populaire contre une baisse dramatique du niveau de vie. Il est le représentant d’oligarques capitalistes, anciens hauts bureaucrates de l’ex-URSS ou nouveaux riches, qui ont bâti des fortunes tapageuses (certes pas encore au niveau des grandes fortunes américaines ou françaises), en se réappropriant, avec les vagues de privatisation de la chute de l’URSS, les meilleurs morceaux d’un appareil productif bradé.
Biden, suivi de ses alliés européens dont Macron, montre du doigt Poutine au nom de la défense de la démocratie et du droit du peuple ukrainien. En janvier dernier pourtant, quand Poutine a fourni 3000 soldats au dictateur du Kazakhstan pour réprimer une insurrection ouvrière, les dirigeants US et leurs alliés n’ont rien dit. À l’été 2020, quand Poutine a apporté son aide au dictateur biélorusse Loukachenko contre une révolte populaire massive, pas davantage de réaction.
Les USA et le choix des armes
Biden assure que les USA n’interviendront pas militairement sur place. Mais ils activent leurs ventes d’armes et installations de bases militaires dans les pays de l’UE et de l’OTAN limitrophes de l’Ukraine et de la Russie. Et il prévoit de nouvelles et fortes sanctions économiques contre la Russie, similaires à celles qui ont étouffé l’Irak ou l’Iran. Une arme dirigée contre la population russe, qui serait à coup sûr durement frappée. Mais une arme aussi contre des alliés occidentaux européens, dont les multinationales et sociétés financières traitent avec la Russie. C’est pourquoi les Macron et Scholz sont moins chauds que leur mentor de Washington à la perspective d’une escalade guerrière. Les USA interdisent déjà la mise en fonctionnement d’une deuxième branche du gazoduc Nordstream qui relie directement la Russie à l’Allemagne en contournant l’Ukraine. Un bras de fer se joue là aussi. L’Allemagne achète à la Russie quasiment 20 % de son gaz, qui satisfait 50 % de sa consommation. La France couvre ainsi 20 % de ses besoins. Égratigner ces intérêts favorise les firmes de gaz liquéfié étatsunien. Entre amis non plus, pas de cadeau !
Arrêter les bras armés des multinationales
Les rapacités et rivalités économiques s’exacerbent entre les grandes puissances – la Chine s’affichant aux côtés de Poutine. Ce bal de vautours capitalistes se manifeste par la multiplication de guerres et à des menaces accrues de conflits où sont plongés les peuples. L’actualité se focalise aujourd’hui sur l’Ukraine mais les foyers sont multiples. Morts annoncées, vies dévastées. Chaque fois aussi, c’est l’occasion de durcissements politiques – couvre-feux et lois d’exception – pour faire taire les oppositions, bâillonner davantage les travailleurEs au nom de la « défense de la patrie ». Seul un élan de solidarité entre les travailleurEs et les peuples, par-delà les frontières, peut et doit stopper les appétits des capitalistes et de leurs bras armés.