Le 15 avril dernier, des dizaines de milliers de travailleurs de la restauration rapide ont manifesté aux États-Unis. C’était la plus importante des journées d’action nationale de la campagne lancée par le syndicat des services SEIU en novembre 2012.
Les revendications étaient un salaire minimum de 15 $ de l’heure et le droit de former un syndicat dans une industrie où les barrières sont nombreuses. On peut noter la présence de plus en plus importante de salariéEs d’autres secteurs, non seulement en soutien mais partageant les mêmes revendications : travailleurs de la santé, personnels administratifs des universités, salariés de la grande distribution, etc. Le salaire minimum fédéral est de 7,25 $ de l’heure, mais celui-ci ne permet pas de vivre décemment, les salariés étant souvent forcés de cumuler les emplois pour des semaines atteignant 60 heures. Les salariés payés moins de 15 $ de l’heure représentent 95,9 % des salariés de la restauration rapide, 88,6 % des aides ménagères et 80 % des salariés de la grande distribution, des secteurs très peu syndiqués, contrairement aux 45,6 % dans l’automobile, où le taux de syndicalisation est de 28,7 %.
La mobilisation pousse également les bureaucraties syndicales d’autres secteurs à se montrer plus offensives lors des négociations des accords d’entreprise, comme chez les camionneurs. Du fait de la surreprésentation des Noirs et Latinos dans ces secteurs les plus précaires, le lien est aussi fait avec les mobilisations contre les assassinats policiers entamée en août à Ferguson. Au côté des syndicats, les associations locales jouent un rôle. Des organisations ad hoc de soutien à la lutte comme « Fight for 15 » rassemblant individus, syndicats et organisations politiques révolutionnaires se sont formées dans les villes les plus importantes.
Une dynamique, des expériences
Barack Obama avait caressé l’idée d’un salaire minimum fédéral de 10,10 $ de l’heure, en priorité pour les employés fédéraux, avant de prétexter de sa défaite aux élections de mi-mandat de novembre 2014 pour repousser tout cela aux calendes grecques. Une série de mesures locales ont été prises pour augmenter le salaire minimum, notamment à Seattle, San Francisco et Los Angeles... mais souvent sur des calendriers très étendus. Ainsi, les salariés de Los Angeles obtiendront leurs 15 $ de l’heure... d’ici 2020, ce qui avec l’inflation anticipée consiste en une augmentation bien plus modeste.
Si la bureaucratie de SEIU n’a pas sifflé la fin de la récréation, elle se gargarise des mesures cosmétiques passées par ses alliés du Parti démocrate dont elle finance allégrement les campagnes électorales. De plus, le flou juridique sur la répartition exacte des compétences entre les villes et les États permet aux employeurs d’attaquer en justice les villes passant de telles ordonnances.
L’extension de la mobilisation, son soutien par l’opinion publique et le caractère radical de certaines actions (comme les occupations de restaurants pour quelques heures) soulignent une dynamique. Mais dans les grandes villes (surtout), la bureaucratie syndicale contrôle chaque aspect de la mobilisation et ne laisse que peu de place à la prise d’initiative par les travailleurs du rang. Dans des villes de taille moyenne, où la bureaucratie est moins importante, un espace existe, ce qui permet aux travailleurs et aux militants radicaux de faire des expériences communes.
Stan Miller