Publié le Dimanche 4 décembre 2016 à 08h11.

USA : Trump, la dictature brutale du capital...

Deux semaines après l’élection présidentielle, Hillary Clinton a creusé l’écart en nombre de voix. Elle obtient désormais 2,2 millions de voix de plus que Trump. Mais la page est tournée, Trump est dans la place et entend bien s’en servir sans contestation.

Il qualifie « d’arnaque » le recomptage des voix demandé par Jill Stein dans le Wisconsin, en Pennsylvanie et dans le Michigan, et dénonce sans la moindre preuve « la fraude électorale » en faveur de Clinton ! Le nouveau représentant de la dictature de Wall Street, qui qualifie brutalement Castro de dictateur, affiche son arrogance...

Conflit ou fusion d’intérêts ?

Élu sans dévoiler sa situation financière et fiscale, Trump sera certainement l’homme le plus riche de l’histoire à s’installer à la Maison Blanche, avec une fortune évaluée entre 4 et 10 milliards. « En théorie, je pourrais parfaitement diriger de concert mes affaires et celles du pays », assure-t-il et ce n’est pas que théorique...

Les présidents argentin et philippin ont déjà activé leurs relations d’affaires avec le promoteur Trump pour entrer en contact avec le président Trump. Ivanka, sa fille, a été associée à la visite du Premier ministre japonais et à la conversation avec le président argentin Macri. Trump aurait aussi demandé l’aide de Nigel Farage pour faire annuler un projet d’éoliennes... qui menace la vue de son golf d’Aberdeen ! Pour Trump, il semblerait que l’État et ses propres affaires ne fassent qu’un.

« America great again » ou entériner la dégradation des rapports de forces ?

Il dit tout et son contraire, l’imprévisibilité faisant partie de sa stratégie personnelle, y compris sur les questions de politiques internationales. Il semble cependant avoir une idée fixe : mettre un terme au traité de libre-échange, le TPP, signé fin 2015. Ce traité réunit douze pays de la zone Pacifique, des États-Unis au Japon en passant par le Vietnam, à l’exception de la Chine... Car ce partenariat transpacifique était au cœur de la stratégie du « pivot » vers l’Asie défendue par Obama, avec l’ambition assumée de contrebalancer l’influence grandissante de la Chine.

En retour, au sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC), le président chinois Xi Jinping a appelé à accélérer les travaux en faveur de sa propre initiative : un partenariat économique régional entre la Chine, l’Inde, l’Australie : l’Asean (Association des nations de l’Asie du Sud-Est)… mais sans les États-Unis ! « La construction, dit-il, d’une zone de libre-échange de l’Asie-Pacifique est une initiative stratégique vitale pour la prospérité à long terme de la région. Nous devons nous y atteler fermement. » Cette zone Asie-Pacifique (FTAAP) rassemblerait les 21 économies de l’Apec, qui représentent 60 % du commerce mondial et 40 % de la population. Le repli annoncé par Trump semble ainsi entériner une perte d’influence économique et politique des États-Unis en Asie.

Tout pour les banques

Celui qui dénonçait la « possédée par Wall Street » (Clinton) ou qui déclarait : «Je connais les gens de Wall Street. [...] Wall Street nous a causé d’énormes problèmes. On va taxer Wall Street », a pris un sérieux virage... Il part maintenant en guerre contre la loi Dodd-Frank de 2010, votée par les Démocrates après la crise des subprimes. Cette loi, pourtant bien timide, prétend limiter les activités spéculatives des banques (à hauteur de 3 % des fonds propres) et encadrer les produits dérivés. « Dodd-Frank empêche les banques de fonctionner [...], il faut que ça cesse ». Un empêchement pour le moins relatif, mais Trump part en guerre contre toute réglementation qui limiterait la liberté des grands patrons. Il voit le monde à son image. Et Wall Street jubile : le Dow Jones a franchi la barre des 19 000 points pour la première fois de son histoire.

Alors que la reprise économique est pour le moins fragile, le monde de la finance veut avoir toute liberté pour faire de nouveaux profits. Il veut libérer les taux d’intérêts, augmenter les prix... Trump, qui leur promet d’injecter 1 000 milliards de dollars dans les travaux d’infrastructures tout en baissant les impôts, est leur homme. La spéculation voit de beaux jours arriver... Sauf qu’au bout de cette folle course financière qui s’engage à l’échelle mondiale, il y a le krach !

Yvan Lemaitre