On se souvient avec amusement des images de cette femme aux apparats bourgeois et au « E » prépausal caricatural : « C’est contre nature-han ». Elle répondait à des journalistes, dans la période « Manif pour tous », qui lui demandaient ce qu’elle ferait si son enfant était homosexuel : « J'essaierais de tout cœur qu'il puisse guérir-han. »
On avait bien ri. Mais cette illuminée avait mis au grand jour le fait que dans des communautés religieuses, catholiques et évangéliste principalement, et dans le sillage de la « Manif pour tous », se pratiquaient des « thérapies de conversion ».
De mal-nommées « thérapies »
Considérées par l’ONU comme de la torture, les « thérapies de conversion » sont les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne. En d’autres termes « guérir » l’homosexualité ou la transidentité. Le terme de « thérapie » étant très peu à propos tant il s’agit de maltraitance et en aucun cas de soin…
Mardi 5 octobre était étudié à l’Assemblée nationale un projet de loi visant l’interdiction de ces pratiques. En juin, Christophe Castaner, président du groupe LREM à l'Assemblée nationale, expliquait que ce n’était pas prioritaire. Marlène Schiappa, elle, voulait intégrer l’interdiction dans l’immonde loi dite « séparatisme » comme s’il ne s’agissait que d’une question de dérives de petites sectes religieuses. En réalité le spectre de ces thérapies de conversion est bien plus étendu. Elles peuvent être médicales, notamment pour les personnes trans, il peut s’agir de « viols correctifs », de mariages forcés mais aussi plus largement des pressions sociales exercées par un milieu pour empêcher la libre expression de genre ou d’orientation sexuelle.
Au 15 septembre, retournement de situation, cette loi, il faut la faire passer très rapidement… avant l’élection présidentielle. Bien entendu.
Pour eux, les enfants LGBTI n’existent pas
Une bataille est en cours pour faire plier les amis de Darmanin, l’extrême droite et les réactionnaires. Nous nous battons pour une loi interdisant les thérapies de conversion car cela permet la reconnaissance du statut de victime, cela facilite la réaction judiciaire, cela permet d’avoir de réelles statistiques, cela donnera de la force à nos camarades LGBTI dans le monde entier et cela envoie le message que nous, personnes LGBTI, ne sommes pas à guérir.
En France, les principaux organismes pratiquant les thérapies de conversion sont la « Communauté Saint-Martin » et la « Communauté de l’Emmanuel », stimulés par la « Manif pour tous » et influencés par des groupes étatsuniens. Dans le pays de la séparation des Églises et de l’État, les pratiques sont plus sournoises qu’aux USA, par exemple, le livre How Jesus Heals the Homosexual (« Comment Jésus guérit l’homosexuel »), ouvrage de référence des défenseurs de ces « thérapies », a été traduit en France par « Vers une sexualité réconciliée ». Sans blague.
Parmi eux, beaucoup sont convaincus du bien-fondé de leur action et disent « aimer les homosexuelEs mais pas l'homosexualité » et prier pour leur « délivrance ». En réalité, il s’agit d’entretenir la haine de soi, la détestation de sa propre identité : cela provoque mal-être, dépression, suicides.
Dans ces débats, la droite agite le chiffon rouge de l’identité de genre pour les enfants. Ils ne voudraient pas qu’on qualifie de thérapies de conversion les pratiques visant à emmerder les enfants trans. La petite musique, derrière cela, est que pour eux, les enfants LGBTI n’existent pas. Et ne devraient pas exister. La mutilation des enfants intersexes1 ne les dérange pas, puisqu’il s’agit, là, de les faire rentrer dans le droit chemin… de la nature-han.
- 1. Dont les caractéristiques sexuelles ne correspondent pas aux normes typiques et binaires masculines ou féminines.