Entretien. Nous nous sommes entretenus avec Jean-Baptiste Eyraud, du DAL, au sujet des première annonces de Macron et de son gouvernement en matière de logement.
Dans le domaine du logement, à quoi peut-on s’attendre avec Macron ?
On a affaire un gouvernement ultra-libéral qui, au vu des premières annonces, même si elles ne sont pas définitives, est, sous l’angle du logement, de type Thatcher. Déjà, des mesures d’économies sur les APL, qui ont commencé avec un petit coup de rabot pour 2017, sur les trois derniers mois de 2017, et qui concerne l’ensemble des allocataires. Cinq euros en moins, c’est quand même une petite somme pour ceux qui n’ont rien du tout : un repas, la bouffe pour une journée, l’achat de médicaments, des crayons pour la rentrée… Et une deuxième étape est annoncée, avec des économies plus importantes, donc des amputations sur les APL dans le budget 2018. Mais on ne sait pas encore quelle forme ça va prendre, ça sera probablement dans une réforme de fond sur les aides sociales destinée à faire des milliards d’économies.
Et sur le plan législatif, qu’est-ce qui est envisagé ?
On voit arriver une loi sur le logement avec plusieurs dispositifs, à commencer par un « bail mobilité », qui était dans le programme de Macron : un bail de trois à douze mois pour, en théorie, les personnes en mobilité professionnelle, en stage, etc. Mais il n’y aura aucun moyen de vérifier, et c’est donc un changement radical, libéral, qui va précariser les locataires, avec une modification de la durée des contrats. On voit déjà ce que peuvent faire les bailleurs : quatre mois en Airbnb, puisque c’est la durée maximale, et huit mois en « bail mobilité ». Ça va faire monter les loyers : chaque année, les bailleurs vont pouvoir les « revaloriser » en changeant de locataire. Pour nous, c’est le plus gros danger, car ça nous amène, à terme, à un changement de société : précarisation accrue, hausse générale des loyers, course à la rentabilité. Et logiquement ce projet de « bail mobilité » va de pair avec le projet d’accélérer les procédures d’expulsion.
Et les annonces concernant la le logement social ?
Ils prévoient trois mesures qui vont contribuer à empirer les choses :
– accorder des délais plus longs pour les maires, au-delà de 2025, date à laquelle ils devaient, d’après la loi SRU, héberger 25 % de logements sociaux dans leurs communes ;
– inclure les PLI (prêts locatifs intermédiaires), qui concernent les classes moyennes, dans les logements sociaux, alors que les classes moyennes devraient pouvoir se loger dans le parc privé si les prix étaient convenables. En faisant ça, on donne certes un peu d’oxygène aux classes moyennes mais on écrase les classes populaires, tout en laissant les riches s’enrichir ;
– déléguer le suivi de la loi et les sanctions aux communautés de communes. Ça va être le règne des copains qui vont se mettre d’accord entre eux pour qu’il n’y ait pas de sanctions !
Si ces mesures sont reprises, ça serait la mise à mort de la loi SRU.
Propos recueillis par Jean-Marc Bourquin