Après une première manifestation le 8 mai (voir l’Anticapitaliste n°568), l’acte 2 de la mobilisation des quartiers s’est tenu dimanche à Saint-Denis : une marche regroupant des habitantEs de Franc-Moisin, Allende, Floréal, des parents d’élèves, vers l’hôtel de ville à l’heure du marché, moment où il y a le plus de monde.
Les revendications : contre les conditions de vie faites aux habitantEs, les ascenseurs en panne (certains depuis près de six mois), les rats qui pullulent, les cafards, les punaises de lit, les parkings trop chers et souvent inondés, le pont tournant qui ne tourne pas et isole le quartier. De plus, la décision du maire de remplacer les enseignantEs malades par des animateurEs a fait monter la colère. C’est un précédent incroyable et une rupture d’égalité manifeste. Cela révèle la misère de l’école en Seine-Saint-Denis, incapable d’assurer la continuité du droit à l’éducation pour toutes et tous.
Crise sanitaire
Le prix de l’eau est aussi un sujet très sensible. La mobilisation des habitantEs de la cité Allende contre les factures d’eau exorbitantes, présentées par Logirep à ses locataires, en est la preuve. Elle a permis un début de prise de conscience que les difficultés rencontrées ne pouvaient se résoudre cité par cité. Logirep a dû reculer, sous la pression, au moins sur ses factures excessives et les collectifs et amicales qui ont organisé la mobilisation en ressortent renforcées.
Cette colère s’exprime dans le contexte de la crise sanitaire. Le covid a fait des dégâts sur la ville, au-delà de l’impact direct de la maladie sur les personnels soignants, nombreuses et nombreux parmi les habitantEs des cités, mais aussi pour celles et ceux en première ligne pour lesquelles la possibilité du télétravail n’a pas de sens. Les pertes des emplois et des revenus souvent précaires se sont cumulées à la hausse des frais causés par le confinement. Les queues pour l’aide alimentaire dans les quartiers en ont témoigné. Cette situation très tendue rend la moindre hausse insupportable, et elles s’accumulent : 1,5 % sur les loyers, dépenses d’eau pendant le confinement, réforme des APL qui fait chuter le nombre d’allocataires particulièrement parmi les jeunes, dettes de loyers…
Fin de la trêve hivernale
La trêve hivernale s’est interrompue le 31 mai, le gouvernement refusant sa prolongation malgré les demandes des associations. Les dossiers devaient être prêts car, dès le 1er juin, le balai des expulsions locatives a repris : huissier, visite de la police, concours de la force publique et expulsion sur le trottoir sans solution d’hébergement. Plusieurs expulsions à Pierrefitte ont conduit les familles, avec le DAL, à occuper le hall de l’hôtel de ville, ce qui a obligé le maire et la préfecture à proposer des hébergements. De même, à Saint-Denis, les enseignantEs et parents d’élèves ont arraché de la préfecture un sursis à expulsion. Une manifestation s’organise à partir des écoles, le 16 juin, pour tenter d’empêcher que l’été soit celui des expulsions.
La ville de Saint-Denis est engagée dans la rénovation urbaine avec un projet de démolition de plus de 400 logements sur la cité de Franc-Moisin. Depuis plus de trois ans les habitantEs sont dans l’incertitude. Où va-t-on aller ? À quelles conditions va se faire le déménagement ? Et celles et ceux qui veulent rester ? Autant de question auxquelles le maire, Mathieu Hanotin, ne répond que par le mépris : « 52 % [de logements sociaux sur Saint-Denis] c’est trop. Notre philosophie est claire : que le Franc-Moisin ne soit plus uniquement un quartier pour les personnes en difficulté » (le Parisien du 6 juin). Et il applique cette logique à l’ensemble des quartiers HLM de la ville. Bref, Il désigne la fraction la plus modeste de la population comme étant de trop et devant être remplacée d’ici 2024 ! On comprend son empressement à renforcer et armer sa police municipale tant la violence de ses choix ne peut rester sans réaction.