L’union nationale aidant, le Premier ministre, après le développement de sa politique sécuritaire, a poussé l’offensive le 22 janvier en annonçant « une politique de peuplement pour lutter contre la ghettoïsation, la ségrégation ». Pour le coup, on ne peut pas lui reprocher d’avoir jonglé avec la langue de bois. Avec lui, c’est carré : outre la tonalité coloniale du propos, il faut comprendre qu’il n’y a pas de politique de peuplement sans déplacement de population. Et de façon autoritaire.Les mesures tombent : accélération des programmes de démolitions des logements sociaux bon marché et reconstruction le plus souvent possible hors des quartiers sensibles ; interdiction du relogement des prioritaires (DALO) les plus pauvres dans les quartiers populaires ; fixation des loyers en fonction des revenus du locataire histoire de trier les demandeurs, pour ne citer que les plus marquantes... Les médias nous ont amusés, s’interrogeant par exemple sur la capacité du 16e arrondissement de Paris ou des villes riches du 92 à recevoir, au nom de la mixité sociale, des logements sociaux avec des locataires à faibles revenus... Comme si c’était cela, l’objectif de cette politique, et non pas la déstructuration du tissu social des villes populaires, la « rénovation » des centres-villes et la« requalification » de leur population. Bref, la tentative de disperser les pauvres pour faire disparaître du paysage les classes sociales auxquelles ce gouvernement a depuis bien longtemps renoncé à s’adresser. Ceci dit, plus facile à dire qu’à faire, la crise est passée par là. En effet, 2014 a été une année noire pour la construction de logements, la pire depuis 1997 tant pour les constructions individuelles privées (moins de 300 000) que pour le logement social. En Île-de-France, là où la crise du logement est maximale, à peine 27 584 logements sociaux ont été agréés en 2014, soit une baisse de 9 % par rapport à 2013... alors qu’il faudrait en construire 70 000 par an pour répondre à la demande de logement des franciliens. C’est aussi sans compter avec la capacité de résistance des locataires eux-mêmes aux attaques contre le logement social HLM pour le démanteler. Autant de bonnes raisons de manifester samedi 28 mars à l’occasion de la fin de la trêve hivernale et de la reprise des expulsions locatives.
Jean-Marc Bourquin