D’aucunEs n’hésitent plus à parler de « trumpisation » du débat politique. Et ces derniers jours, force est de constater que le discours mais aussi les actes sexistes, homophobes et plus largement réactionnaires, sont bien présents.
Du côté de la primaire de la droite, pour Fillon, les appels du pied aux franges les plus conservatrices de la droite se multiplient. Haro sur le couple homosexuel ! Certes, il indique ne pas pouvoir revenir sur le droit au mariage, mais entend bien exclure tout droit d’adoption plénière aux gays et lesbiennes. Et évidemment, la procréation médicalement assistée (PMA) restera un outil réservé aux seuls couples hétérosexuels. Car Fillon ne rigole pas avec les valeurs familiales qu’il considère comme « fond[ant] notre société » : les parents, c’est un papa et une maman qui élèvent leur(s) enfant(s) dans le cadre républicain, crénom ! Et de proposer un contrat de responsabilité parentale afin de « permettre la suspension des allocations familiales en cas d’absentéisme ou de comportements irrespectueux des valeurs fondamentales de la République »...
Quant au droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), il assure ne pas vouloir le remettre en cause... mais lâche en juin dernier lors d’une réunion publique dans les Yvelines que « philosophiquement et compte tenu de ma foi personnelle, je ne peux pas approuver l’avortement. » De quoi réjouir la droite catholique traditionaliste, et de quoi s’inquiéter, tant on sait que le droit à l’IVG est déjà difficile à faire valoir concrètement, faute de structures ou de médecins acceptant de le pratiquer, la fameuse « clause de conscience » étant toujours inscrite dans les textes.
L’ambiance est lourde
Ce double discours et ce flou volontairement entretenu permettent à Fillon de s’adjoindre les soutiens des plus conservateurs, à commencer par la courant Sens commun (issu de la Manif pour tous). Un élu angevin de ce même regroupement, Roch Brancour, a d’ailleurs la semaine passée réussi à peser sur le maire de la ville afin de faire supprimer les affiches de la campagne de prévention contre le VIH montrant des couples homosexuels enlacés. Pour Roch Brancour, c’est trop : « les premières victimes de cette campagne sont les enfants à l’innocence bafouée ou les personnes homo réduites à leur libido ». D’autres maires ont également pris des arrêtés pour interdire la diffusion de cette campagne lancée par le ministère de la Santé, comme Bruno Beschizza, maire LR d’Aulnay-sous-Bois (93) pour qui ces affiches sont « contraires aux bonnes mœurs et à la moralité »...
Cette semaine, déjà bien lourde, s’est soldée par le jugement inique envers la demande d’aménagement de peine de Jacqueline Sauvage. Celle-ci, condamnée à 10 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de son mari qui lui avait fait connaître des dizaines d’années d’enfer de violences conjugales, avait bénéficié d’une grâce présidentielle partielle lui permettant de demander immédiatement une libération conditionnelle. Las, sa demande a été rejetée par le tribunal d’application des peines de Melun, jugement confirmé – bien que le Parquet n’ait pas été opposé à accéder à la demande de Jacqueline Sauvage – par la Cour d’appel de Paris jeudi 24 novembre... veille de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes ! Les arguments restent scandaleux : pour les juges, Jacqueline Sauvage « continue de se poser en victime » et « sa réflexion demeure pauvre et limitée puisqu’elle peine encore à ce jour à accéder à un réel et authentique sentiment de culpabilité »... Alors que les cathos les plus réacs s’en donnent à cœur joie pour peser sur le débat politique, Jacqueline Sauvage, épuisée et renonçant à se pourvoir en cassation, reste en prison.
Abby Taro