Publié le Mercredi 18 décembre 2024 à 14h30.

Mayotte, victime du colonialisme français

Le cyclone le plus violent et le plus destructeur que l’île de Mayotte ait connu depuis 90 ans a frappé le 14 décembre. Des centaines de morts gisent sous les décombres des habitations de fortune dans lesquelles vivent près de 40 % de la population, essentiellement de nationalité comorienne — toujours considérés comme des « étrangers » par l’État français bien qu’un tiers d’entre elleux soient néEs sur place.

La plupart des routes sont impraticables, les communications extrêmement difficiles. Beaucoup de services, de ­commerces, d’écoles sont détruits.

L’hôpital a subi des dégâts des eaux importants et des dégradations dans tous les services. Le personnel décrit une situation proche du chaos. Seuls deux blocs opératoires sont encore opérationnels, et les médicaments manquent.

Des moyens mobilisés

Un hôpital de campagne va être déployé par le service de santé des armées depuis Paris en milieu de semaine à Mayotte, ce qui ne va pas sans difficulté en raison d’un problème logistique majeur : la distance.

C’est la Réunion, située à 9 000 km de Paris, qui sert de « hub » pour le pont aérien en direction de Mayotte. Un premier avion militaire est déjà arrivé avec 20 tonnes de matériel et des secouristes spécialisés après avoir parcouru 1 400 km de plus depuis la Réunion.

À ce pont aérien s’ajoute un pont maritime. Un premier bateau de la marine nationale est parti lundi 16 décembre de la Réunion avec du matériel militaire, des vivres et du ­matériel EDF. Il sera suivi par des gros-­porteurs de compagnies maritimes qui arriveront à Mayotte autour du 20 décembre avec de l’alimentation et de l’eau.

Un drame de la crise climatique ?

Selon les experts, le cyclone Chido est le dernier en date d’une série de tempêtes alimentées par la crise climatique mondiale. Ce cyclone exceptionnel a été dopé par les eaux particulièrement chaudes de l’océan Indien, qu’il a traversé de part en part.

Ce drame met en évidence à quel point ont raison ceux et celles qui nous alertent sur les conséquences tragiques du changement climatique pour les populations les plus vulnérables de la planète. Mais ce drame ne peut être imputé au seul changement climatique.

Les victimes : les habitantEs les plus pauvres des pays pauvres

TerroriséEs par l’opération Wuambushu 1, il apparaît que les immigréEs sans papiers, qui composent la majorité des habitantEs des bidonvilles, n’ont pas rejoint les abris prévus par la préfecture, craignant que ce soit un piège pour les conduire hors des frontières. « Ces gens-là, témoigne un infirmier, sont restés jusqu’à la dernière minute. Quand ils ont vu le cyclone arriver, ils ont paniqué et ont tenté de se rendre dans les abris qui leur étaient réservés. Mais c’était déjà trop tard. Ils ont été victimes de débris projetés de toutes parts. »

Mayotte, martyr de l’ambition impériale de Macron

Le drame que vivent les MahoraisEs et leurs compatriotes ComorienNEs est le résultat de la situation postcoloniale imposée par l’État français. Le retard pris dans la construction de services publics dignes de ce nom n’est pas seul en cause : en privant les ComorienNEs du droit de venir travailler librement à Mayotte avec la mise en place du visa Balladur 2, en attisant les rivalités plutôt que d’encourager la coopération avec les peuples frères des pays environnants, l’État Français a isolé les MahoraisEs et les a mis dans une situation de dépendance tragique en leur faisant miroiter un type de développement aujourd’hui mondialement remis en cause. Il est clair que le choix qu’ont fait ses dirigeants néocolonialistes s’avère criminel. 

Correspondant

  • 1. Les opérations Wuambushu 1 et 2 ont donné lieu à des expulsions de sans-papiers en 2023 et 2024
  • 2. En vigueur depuis le 18 janvier 1995, le visa Balladur, du nom du Premier ministre, forme une nouvelle frontière entre Mayotte et les îles comoriennes, Mohéli, la Grande Comore et Anjouan