Le 10 mai a eu lieu la Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions. Emmanuel Macron a cru pouvoir profiter de cette journée commémorative pour une fois de plus vendre une marchandise frelatée : « L’histoire nous l’enseigne : la France unie surmonte toutes les épreuves […], nous sommes le pays des droits de l’homme, et une République une et indivisible qui puise dans sa diversité la force de l’universel ».
Que vient faire la prétendue « France unie » en cette journée ? Dans les Antilles françaises malgré la féroce domination des planteurs esclavagistes, la résistance multiforme des esclaves n’a pas cessé.
Ce n’est pas la « France unie » qui a une première fois aboli l’esclavage dans ces colonies mais la Révolution française, mais même celle-ci a pris son temps car le poids des intérêts des planteurs pesait sur les assemblées révolutionnaires. En fait, c’est sous la pression de l’insurrection des esclaves à Saint-Domingue (la révolution haïtienne) que l’esclavage sera aboli dans les colonies le 4 février 1794 par la Convention nationale. Cependant, la mesure ne sera appliquée qu’en Guadeloupe, en Guyane et à Saint-Domingue.
Bonaparte, premier consul, va remettre en cause l’abolition : il rétablit l’esclavage et la traite en mai 1802. La traite sera théoriquement interdite en 1815 mais elle se se poursuit pourtant, les gouvernements fermant les yeux devant les pressions des colons et du lobby négrier, très influent dans les cercles du pouvoir.
Le Royaume-Uni ayant aboli l’esclavage en 1838, le débat reprend en France avec notamment l’idée d’indemniser, si l’esclavage est aboli, non les esclaves mais les colons ! Les planteurs continuent de s’opposer à toute amélioration de la situation, même si elle ne remet pas en cause l’esclavage. Il faudra donc une nouvelle révolution, celle de 1848, pour que, le 27 avril 1848, l’esclavage soit définitivement aboli en France. Une forte indemnité doit être versée aux planteurs dépossédés de leurs esclaves ; une proposition d’indemniser également les esclaves et de leur attribuer des lopins de terre n’est pas retenue.
La fin de l’esclavage ne verra pas la fin des inégalités et de la pyramide sociale et raciale en Guadeloupe et Martinique tandis que la « République une et indivisible » y réprimait les mouvements de protestation (sans doute plusieurs dizaines de morts en Guadeloupe en mai 1967). Dans les colonies françaises d’Afrique, la même République développait à grande échelle le travail forcé.