Annoncée par Macron, le 12 octobre 2020 aux Mureaux, la loi « séparatisme » a été adoptée le 16 février à l’Assemblée nationale et sera examinée au Sénat à partir du 30 mars. Ce vote, avec 353 voix pour, 65 abstentions et 151 contre, est le marqueur raciste et régalien du quinquennat. Retour sur les débats et les positionnements autour de cette loi.
Àl’issue des votes, Darmanin et Schiappa ont déclaré, dans un communiqué commun, « s’engager solennellement à lutter contre l’islamisme et le repli identitaire en y apportant des réponses concrètes ». Ils peuvent être effectivement satisfaits : les 51 articles de cette loi apportent plus d’outils sécuritaires, la macronie sort renforcée (253 députés LREM votent pour) – peu importe que ce soit sur le terrain privilégié du RN – et toute une partie de l’opposition dite de gauche ne s’est pas opposée franchement à cette loi scélérate.
Leurs « réponses » : plus de contrôle et de répression
Les contrôles administratifs des associations et clubs sportifs seront renforcés. Pour recevoir des subventions il faudra signer un « contrat d’engagement républicain sur le respect des principes et valeurs de la république ». Cela s’accompagne d’une extension des motifs de dissolution des associations qui menacent « l’ordre public ». Le débat sur le voile dans l’espace public, au grand regret de Marine Le Pen, a été évacué. Mais pas totalement puisque la neutralité des agents des services publics est étendue aux agents du secteur privé chargés d’une mission de service public, avec toutes les obligations qui vont avec, notamment l’interdiction du port du voile.
Les seules réponses à la haine en ligne ou aux pressions sur des fonctionnaires et élus se résument à une répression accrue : des peines de prison allant de trois à cinq ans accompagnées d’amendes de 45 000 à 75 000 euros. Rien sur la prévention de tels agissements comme, par exemple, le renforcement des moyens de l’éducation nationale, le déploiement de services publics sur tous les territoires, un emploi pour tous et toutes…
Le fichier FIJAIT relatif aux auteurs d’infractions terroristes s’étend désormais aux auteurs de délits relatifs à la provocation et l’apologie d’actes terroristes, des notions mal définies. Ces auteurs seront interdits de travail auprès du public.
Une loi islamophobe
L’affichage de cette loi est la chasse à « l’islamisme » mais les conséquences seront bien l’accentuation de la discrimination contre les musulmanEs ou supposéEs telEs. Macron ne s’en était pas caché : « Pour mettre fin aux discours de haine dans les lieux de culte, les préfets pourront fermer les mosquées pendant deux mois s’ils jugent que les sermons incitent à la haine ». La loi traduit cette volonté présidentielle par un contrôle accru sur les mosquées, une obligation de déclarer les dons reçus de l’étranger, le passage du statut des activités cultuelles islamiques de la loi 1901 à la loi de 1905, plus contraignante. Et un alourdissement du contrôle sur toutes les activités de leurs associations culturelles.
Plus profondément, il s’agit de réduire au silence les musulmanEs et leurs organisations, de les harceler en les rendant responsables des discriminations qu’ils et elles dénoncent.
Des députés « de gauche » pas franchement dans l’opposition
Si les 17 députés de la FI ont touTEs voté contre cette loi, huit députés du groupe du PCF se sont abstenus, dont plusieurs « ténors » : Fabien Roussel, André Chassaigne, Marie-George Buffet ou encore Stéphane Peu… Celui-ci a expliqué qu’il s’était abstenu non pas en raison de ce que contenait la loi mais plutôt en raison de ce qui n’y était pas ! Ce qui signifie qu’il n’a pas trouvé les raisons dans le texte proposé de voter contre… Elsa Faucillon, qui a voté contre, explique pour sa part, et à juste titre, que cette loi participe du vrai-faux duel Le Pen/Macron pour 2022. Le Pen ne s’y est pas trompée, qui s’est seulement abstenue !
Nous devons continuer de nous opposer à cette loi, qui non seulement jette à nouveau le discrédit sur tous les musulmanEs, mais sème aussi la division dans notre classe et renforce les mécanismes de discrimination, par le développement d’une défiance et d’un racisme devenu hélas quasiment « légal ».