Le gouvernement nous prépare à un énième rouleau-compresseur, alors même que les dividendes des entreprises du CAC 40 ont cette année atteint des records. Mais Bruno Le Maire l’a dit mi-mars : « La gratuité de tout, pour tous, tout le temps : c’est intenable ». Est-ce qu’on lui a dit pour sa voiture de fonction ?
C’était avant que le trésorier de la France soit épinglé par les parlementaires. La semaine dernière avait donc commencé sur une demi-allégation de ministre : « Je rappelle juste que sans doute nos prévisions n’ont pas été bonnes mais personne — personne — ne les a contestées lorsqu’elles ont été formulées ». Le Haut Conseil des Finances publiques avait certes déclaré que « les prévisions de prélèvement du gouvernement étaient plausibles », après avoir fait preuve d’une prudence bien courtisane en 2022 : « Les recettes pourraient pâtir d’une croissance de l’activité moins forte que prévu par le gouvernement, mais à l’inverse être soutenues par une base 2022 plus forte qu’attendu ».
Dérapage budgétaire
Un dérapage sur lequel Bercy avait néanmoins été alerté, quoi qu’il en dise. En tout cas, nous y sommes, les recettes ont donc pâti, l’inflation ayant pesé sur l’activité. Et pour le ministre de l’Économie et des Finances, le remède est simple : après avoir augmenté considérablement les cadeaux aux entreprises, assumé la dette pendant la crise du Covid, il préconise désormais une cure d’austérité. C’est donc le grand retour du mantra du déficit sous les 3 % du PIB à l’horizon 2027 !
Et il entend bien faire les coupes budgétaires… dans la protection sociale (beaucoup), les services publics (toujours), le budget de l’État (un peu). Alors que le déficit public s’établit à 154 milliards d’euros, le gouvernement ne dit mot des aides publiques aux entreprises qui atteignent pourtant les 200 milliards d’euros. Sans parler de l’évasion fiscale estimée à 80 milliards. Au contraire, pour Matignon, il faut qu’« il y ait plus de Français qui travaillent parce que ce sont des recettes supplémentaires ».
« Désmicardiser »
Rien donc sur les déductions fiscales, exonérations de cotisations sociales… qui visent surtout les bas salaires et dont le nombre a augmenté, avec l’indexation du smic sur l’inflation, comme l’analyse le Monde1. La part des salariéEs du privé payés au smic s’élevait ainsi le 1er janvier 2023 à 17 %, contre 12 % en 2021. Cette « smicardisation » dont le gouvernement fait mine de vouloir sortir… permet d’abaisser le coût du travail en général. Et Attal et Le Maire entendent bien poursuivre en ce sens, en s’attaquant à l’assurance chômage, donc la protection sociale, à cette part de notre salaire socialisée via la Sécurité sociale, qu’il voudrait finir d’étatiser… avant de privatiser totalement probablement !
Pression sur les salaires et assurance chômage
La semaine a donc continué sur les annonces du jeune vieux Premier ministre. La précédente réforme à peine en place, une nouvelle est donc déjà annoncée pour encore diminuer les droits des personnes sans emploi, alors même que de l’avis de la Délégation générale à l’emploi et à la formation (DGEFP) du ministère du Travail : « La conjoncture incertaine du marché du travail n’appelle pas un durcissement immédiat des conditions d’indemnisation »2.
Son idée : réduire la durée d’indemnisation de plusieurs mois, augmenter la durée de travail nécessaire pour bénéficier des allocations et baisser le montant perçu. Attal prétend vouloir négocier… en présentant une feuille de route abjecte, brutale et cynique de « chasse aux pauvres » qui aurait pour effet de contraindre à prendre n’importe quel emploi et donc de faire pression sur les salaires et de stigmatiser les chômeurEs.
Sécurité sociale et gratuité
Le gouvernement cherche à opposer celles et ceux qui travaillent contre de prétendus profiteurEs. L’assurance chômage, comme l’assurance maladie ou les retraites, ce sont nos cotisations, nos salaires socialisés qui permettent d’assurer une sécurité de revenus aux travailleurEs. Baisser les droits au chômage comme le prévoit Attal, c’est plonger de nouveaux foyers dans la misère en plus des millions de personnes qui vivent déjà sous le seuil de pauvreté.
Nous devons, partout, dans nos entreprises, rester vigilantEs, opposer au discours de justification de l’austérité, de discrimination des « chômeurEs », celui du partage des richesses, de la socialisation, du renforcement des services publics : construire dès aujourd’hui un autre horizon, celui de la socialisation des moyens de production et d’une démocratie réelle. Et réclamer la gratuité ! Partout et tout le temps !