Les mobilisations du week-end dernier, celles des Gilets jaunes comme celles pour le climat, ont été massives. C’est la réponse des classes populaires à la crise profonde dans laquelle s’enfonce le capitalisme et à laquelle Macron ne parvient pas à trouver une issue.
Des dizaines de milliers de manifestantEs ont défilé, avec les manifestations des Gilets jaunes qui ont retrouvé un caractère plus massif, la marche des solidarités contre le racisme et les violences policières et les manifestations pour le climat, tant vendredi que samedi. La grève du 19 mars, sans être la déferlante nécessaire pour changer les choses, ajoute un élément capital : la mobilisation du monde du travail affirmé en tant que tel. Des manifestations d’ampleur ont eu lieu dans plusieurs villes, à commencer par Paris et Marseille, avec également des cortèges réunissant des milliers de manifestantEs dans plusieurs dizaines de villes. À noter, en outre, des taux de grévistes significatifs dans plusieurs secteurs de la fonction publique, notamment les Finances publiques et l’Éducation nationale (avec plus de 45 % de grévistes dans l’enseignement primaire, selon le SNUipp), ainsi qu’une présence remarquée de Gilets jaunes dans certains cortèges.
Fin du monde, fin du mois, même combat
La nouveauté de ces derniers jours, par rapport au mois de décembre, c’est que ces luttes commencent à converger, à percevoir qu’elles ont un lien entre elles. Le gouvernement a tenté de séparer les unes des autres, tant sur le plan politique (présence des ministres Gabriel Attal et Brune Poirson aux manifestations lycéennes pour le climat, volonté d’opposer les manifestations entre elles) qu’organisationnel (présence policière pour empêcher la fusion des cortèges).
Mais cela ne fonctionne pas, car même si les manifestantEs n’en ont pas encore touTEs pris conscience, c’est bien aux mêmes adversaires qu’ils et elles s’adressent.
Le mouvement des Gilets jaunes affirme la révolte populaire contre un monde qui tourne à l’envers : les sociétés du CAC 40 réalisent 91 milliards d’euros de profits en 2018 tandis que 8,8 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté en France.
Les politiciens bourgeois et leurs médias s’indignent de l’incendie du Fouquet’s alors qu’ils se moquent de la casse des services publics dans les campagnes et les quartiers populaires. Le réchauffement climatique menace la survie de l’humanité. La majorité macroniste, malgré des déclarations mensongères d’intentions écologistes, notamment contre la politique de Trump, vient de prolonger, sous la pression des lobbys, l’autorisation de l’utilisation des pesticides jusqu’en 2025. On estime que 70 % des émissions de gaz à effet de serre sont de la responsabilité de 100 entreprises seulement : c’est la soif de profits des capitalistes qui enfonce le monde dans la crise, et la complicité des gouvernements commence à être perçue largement.
La répression est leur réponse à notre colère
Et c’est ce qui fait peur au gouvernement : il ne voit pas d’issue à la crise. Il ne voit pas comment arrêter le mouvement des Gilets jaunes, le « Grand débat » ayant échoué et les élections européennes s’annonçant de même comme un moment très limité sur le plan politique. Ce sont les capacités de la démocratie bourgeoise à absorber les conflits de classe qui sont en cause et, même si cela reste encore limité, c’est une menace sans précédent pour la 5e République et les dirigeants de la classe dominante.
La seule réponse possible pour eux est donc la répression. C’est pour cette raison que le gouvernement envoie la police dans les manifestations, qu’il mutile et blesse les manifestantEs et que certains secteurs lui proposent, comme Marine Le Pen et Éric Ciotti, de dissoudre les organisations d’extrême gauche ou d’interdire les manifestations.
La crise au sommet de l’appareil répressif, avec la mise sous tutelle de Castaner par Édouard Philippe ou le limogeage du préfet de police de Paris, montre l’étendue des problèmes auxquels est confronté un pouvoir qui hésite sur l’ampleur de la répression à mettre en œuvre. D’autant qu’ils ne comptent pas arrêter les attaques antisociales, comme le démontrent les dernières décisions dans la santé, et doivent donc s’attendre à de nouvelles contestations.
TouTEs ensemble, « système dégage »
La voie pour les classes populaires n’est pas simple à tracer. Le mouvement syndical reste l’arme au pied, la pression d’en bas ne parvenant pour l’instant à faire bouger que la CGT et Solidaires, à petite échelle. Sans parler de la gauche politique réformiste, dont la crise semble sans fin puisqu’elle ne tente pas de se construire sur les mobilisations.
Pour nous, il reste à se former à la lumière des expériences internationales et à (faire) profiter de celles-ci. Comme en Égypte et en Tunisie il y a un peu plus de huit ans, deux jours de grève générale ont changé la donne en Algérie, obligé le gouvernement à se repositionner. Ici comme là-bas, nous avons besoin d’une mobilisation d’ensemble, unitaire, du monde du travail.
Et, ici comme là-bas, nous avons besoin que se fixent des revendications qui montrent clairement l’opposition entre les besoins des masses populaires et le capitalisme : pour une augmentation générale des salaires de 300 euros, s’attaquer aux profits ; pour le climat, réquisitionner les multinationales de l’énergie, imposer la gratuité des transports ; réquisitionner les banques, imposer une planification démocratique de la production, sous contrôle des travailleurEs.
Cela ne se fera pas en quelques jours, on perçoit bien autour de nous que la majorité de la population et des classes populaires n’est pas encore en mouvement, ne s’approprie pas encore cette politisation qui existe dans de larges secteurs, chez les Gilets jaunes, chez les jeunes pour le climat, dans certaines couches syndicales. Notre perspective est donc de construire les mobilisations, patiemment, dans les différents secteurs, tout en expliquant politiquement, par notre intervention en tant que parti, les liens qui existent entre les différentes causes, les possibilités de convergences et la nécessité d’une rupture révolutionnaire avec le capitalisme.