Publié le Vendredi 22 février 2019 à 23h08.

Le macronisme : une main de fer dans un gant d’acier chromé

Loin d’être un supplément d’âme, les politiques autoritaires et liberticides du gouvernement Macron doivent être appréhendées comme le corollaire de ses politiques antisociales. 

Depuis son élection, Emmanuel Macron a largement confirmé que sa posture de « libéral » dissimulait mal un projet de société dont l’un des piliers est une concentration des pouvoirs qui, si elle est grandement facilitée par la nature même des institutions de la 5e République, n’en prend pas moins des formes inédites. On parle ici tout autant de la mainmise, sur les leviers de décision, des technocrates et autres start-upeurs non élus qui composent le proche entourage de Macron, que des politiques répressives et des législations liberticides, contre les droits démocratiques, contre la liberté de l’information, contre les ­libertés individuelles. 

Négation de la légitimité de la contestation

Ainsi, comme nous le soulignions la semaine dernière dans nos colonnes, la loi dite « anti-­casseurs », qui n’est rien d’autre qu’une loi anti-manifs, n’est pas un accident de parcours ou un coup de tonnerre dans un ciel serein. Elle s’inscrit « logiquement » dans une dérive autoritaire globale, corollaire d’une idéologie et de politiques ultra-libérales qui portent en elles la négation non seulement de la contestation, mais aussi de la légitimité de la contestation. Dans la mesure où elle se pense comme dépositaire de « la » vérité, la Macronie ne s’encombre guère de détails aussi insignifiants que le pluralisme, les mécanismes démocratiques, le débat public. Comme le souligne le journaliste Romaric Godin, « l’identité politique de l’hôte de l’Élysée peut se comprendre comme l’idée qu’il convient de briser avec les compromis du passé et de soumettre le pays, pour son "bien", à l’ordre économique. […] Alors la solution cesse d’être politique. Le débat n’oppose plus la droite et la gauche, mais les défenseurs de la vérité, rebaptisée «réel» ou «modernité», et ceux de l’erreur. La fonction du chef de l’État n’est plus que de faire entrer son pays dans cette vérité. »1

Une composante du macronisme

L’autoritarisme est rien moins qu’une composante du macronisme, dont les projets d’adaptation brutale des structures économiques et sociales françaises aux nouvelles configurations du capitalisme mondialisé passent par une caporalisation de la société, une marginalisation des corps intermédiaires et une mise sous tutelle des contre-pouvoirs. Macron, c’est une main de fer dans un gant d’acier chromé, et les artifices communicationnels du président ont déjà fait long feu, comme le montrent les critiques de plus en plus nombreuses venues d’éditorialistes rapidement revenus de leur Macron-béatitude. À la tête d’un exécutif mal élu et disposant d’une base sociale particulièrement réduite, le manager Macron et ses chefs d’équipe, pour la plupart issus de la « nouvelle économie » et des grandes écoles de commerce, entendent exercer le pouvoir comme s’ils administraient une start-up ou un cabinet d’avocats de Wall Street : une vitrine décontractée et moderne, mais une gestion brutale et autoritaire des « ­ressources humaines ».

Julien Salingue