Publié le Mercredi 20 mars 2024 à 18h00.

L’État condamné pour l’utilisation de nasses préventives… en 2010

Le 8 février 2024, par un arrêt de la CEDH (Cour européenne des droits de l’Homme), l’État français a été condamné pour la nasse organisée par préfet et chef de police de Lyon le 21 octobre 2010 sur la place Bellecour. 

Cet arrêt est donc une victoire donc pour le collectif lyonnais qui se félicite d’avoir su maintenir une action collective durant… treize ans afin de faire condamner l’utilisation des nasses préventives.

Souvenons-nous, le 21 octobre 2010, la jeunesse rejoignait la mobilisation unitaire contre la réforme des retraites (60 à 62 ans), et la police organisait pour la première fois à une aussi grande échelle, une garde à vue à ciel ouvert de centaines de manifestantEs : principalement des lycéenNEs et étudiantEs bloqués de 13 heures jusqu’à l’exfiltration avec contrôle d’identité de 17 heures à 20 heures.

Riposte et naissance d’un collectif

Cette garde à vue a révolté et provoqué une riposte le soir même dans le cadre préexistant du CIRDEL (Centre d’initiatives et de réflexion pour la défense des libertés) avec les syndicats de la magistrature et des avocats de France. Des dizaines de militantEs se réunissaient pour dénoncer cette répression policière.

Un premier travail de permanence s’est immédiatement organisé et a permis de récolter des témoignages nominatifs. Un meeting a eu lieu avec les manifestantEs : la FCPE69 et les syndicats comme la CGT, Solidaires, FSU, avec le soutien d’Attac, de la LDH, de SOS Racisme, du MRAP, du MFPF, et les organisations politiques PCF, NPA, les Alternatifs, GU.

De là est né le collectif du 21 octobre 2010, cadre unitaire d’individus et d’organisations qui a mené la bataille côte à côte contre cette nasse jusqu’à la Cour européenne en s’appuyant sur deux éléments. D’une part, une action en justice, collective, avec un seul avocat lyonnais Me Sayn, puis l’avocat parisien Me Spinosi quand l’affaire est passée en cassation et auprès de la CEDH. 

Le recueil de centaines d’écrits a permis l’engagement de 18 plaignantEs individuels, pièce maîtresse pour le juge d’instruction au départ. D’autre part sur des actions collectives de terrains : recherche de soutien financier pour déposer la caution, réunions, conférences, manifestations, liens avec d’autres actions contre les répressions policières.

Droit de manifester et liberté de circuler

Notre volonté de dépasser les divisions et de garder le cadre unitaire pour défendre le droit fondamental de manifester et la liberté de circuler a été très importante. Cette unité s’est réaffirmée à chaque étape du processus judiciaire : l’instruction, la cour d’appel, la Cour de cassation, et, bien sûr, à chaque action...

Le NPA a contribué à faire vivre cette unité par son engagement comme partie civile. Notre plainte a été instruite et a permis d’obtenir les chiffres de la police : entre 17 heures et 20 heures, le 21 octobre, place Bellecour, la police a exfiltré et contrôlé 621 personnes dont 90 mineurEs coincéEs depuis 13 heures

C’est une victoire en demi-teinte car la France est surtout condamnée par manque de textes réglementaires encadrant cet usage à l’époque. Depuis, l’État a un schéma de maintien de l’ordre faisant référence à la possibilité de nasse !

Françoise, Lyon