Chères et chers camarades,
nous avons pris connaissance avec étonnement de la lettre que votre première secrétaire Martine Aubry vous a adressée concernant les parrainages à l’élection présidentielle, appelant à ce que « aucun parrainage d'élu socialiste et républicain ne manque à notre candidat ».
Il ne fait aucun doute que François Hollande n’a nul besoin des parrainages de tous les éluEs socialistes, puisque le Parti socialiste rassemble des centaines de députés, sénateurs, conseillers régionaux et généraux, maires, etc.
Cela est également vrai pour EÉLV et le Front de gauche.
En revanche, le NPA a peu d’élus et doit consacrer beaucoup de temps et d’énergie pour rencontrer les 30 000 maires des communes de moins de 5000 habitants et trouver beaucoup de portes fermées, à cause, entre autres, de démarches comme cette lettre de Martine Aubry.
Cette lettre a donc bien une seule conséquence : contribuer à tenter d'interdire aux candidats des petits partis qui ont peu ou pas d’élus d'être présents dans la campagne présidentielle, puisqu’un élu ne peut parrainer qu’un seul candidat.Elle vient renforcer le caractère injuste et antidémocratique de la loi électorale, elle tend ainsi à nier tout simplement l’utilité d’un premier tour, à censurer le débat politique public national et demande aux élus socialistes de s’inscrire dans une logique de bipolarisation de la vie politique.
Cette pression exercée à votre encontre est en opposition à l’aspiration à plus de démocratie qui souffle partout dans ce pays comme dans le monde. Quel intérêt la gauche peut-elle avoir à reprendre à son compte l'attitude de la droite exprimée il y a peu par Jean François Copé ?
La campagne présidentielle est un moment important du débat politique, toutes les forces politiques représentatives d'un réel courant d'opinion dans ce pays doivent pouvoir y participer.
Il serait aberrant que nous ne soyons pas présents à cette échéance. En effet le NPA a été de toutes les échéances électorales (municipales, cantonales, régionales, européennes…) ainsi que de tous les combats contre la politique de la droite. Une formation politique comme la nôtre, qui représente un courant politique reconnu, doit pouvoir être présente pour que le débat politique soit le plus riche devant les électeurs. Ce sont eux qui sont appelés à choisir.
Vous n'êtes pas sans savoir que l’abstention, conséquence de la méfiance croissante au sein du monde du travail et de la jeunesse à l'égard des institutions et des partis, guette cette prochaine échéance. L’appauvrissement du débat par l’absence, la censure, d’importants courants politiques qui se situent à la gauche de la gauche ne pourrait que contribuer à accroître ce discrédit.
Nous souhaitons en finir avec le règne de Sarkozy et de sa politique qui ne font qu'approfondir la crise économique et sociale. Cela passe par la mobilisation de toutes les forces populaires et ouvrières, par la démocratie permettant à toutes celles et ceux qui portent la résistance sociale de s’exprimer.
Certains invoquent le risque que ferait courir à François Hollande la multiplication à gauche des petits candidats. Plusieurs analyses ont démontré que notre courant n’était pas responsable des voix qui ont manqué au candidat socialiste en 2002 ou 2007. Par ailleurs, le nombre de candidats à gauche est plus faible cette année que lors des élections précédentes. De plus, faire vivre la démocratie dans ce pays ne peut pas nuire à une victoire de la gauche, bien au contraire.
C’est pourquoi nous pensons que contrairement à ce que vous demande Martine Aubry, vous n’avez aucune raison de fermer des portes déjà bien difficiles à ouvrir pour des formations politiques comme la nôtre.
Nous avons, vous le savez, plusieurs désaccords avec François Hollande, mais parrainer la candidature de Philippe Poutou, candidat du NPA, ne signifie nullement soutenir notre politique, partager nos idées. Il s'agit d'un geste démocratique. Nous espérons que votre volonté de démocratie, de défense des libertés et du pluralisme,
l'emportera et que la direction de votre parti saura revenir sur les pressions qu’elle voudrait exercersur vous.
Nous vous prions de recevoir nos meilleurs vœux pour 2012 et nos cordiales salutations.
Philippe Poutou et Olivier Besancenot, le 3 janvier 2012.