« Le PCF va rester une force incontournable par le nombre de ses élus locaux sur tout le territoire » déclarait Fabien Roussel à l’heure des comptes de la séquence des municipales. Cette tonalité réjouie qu’il promenait sur les plateaux de la soirée électorale, relève pour le moins de l’auto-persuasion. Elle est, en tout cas, bien loin de répondre aux interrogations de nombre de militantEs du PCF.Le nombre de conseillerEs élus dans les municipalités ne suffit pas à masquer le recul politique global. De même, les dirigeants de LREM ne trompent personne en se félicitant de l’augmentation du nombre de conseillers enregistrée par le parti gouvernemental, car le problème se résume principalement aux démonstrations politiques que l’on peut faire. Or la force du PCF, qui lui a permis de résister, depuis 40 ans, au pari de Mitterrand d’en finir avec la particularité d’un parti communiste hégémonique sur la gauche, était de diriger des municipalités importantes dans les zones ouvrières. C’est aussi ce qui lui a permis d’exister dans le bras de fer avec Mélenchon dans le Front de Gauche et la campagne 2012. Les reculs encaissés aux municipales 2014 ont pesé dans le rapport de forces, ainsi que l’enterrement du Front de Gauche face à l’émergence des Insoumis, alors même que ce sont les élus PCF qui avaient assuré la possibilité de la candidature Mélenchon 2017. D’où le sentiment d’enregistrer une défaite qui fragilise davantage le PCF et met en cause les formes d’existence militante.
La fin du « communisme municipal »
Un des bilans des élections 2020, c’est que le « communisme municipal » a subi le dégagisme dans les villes perdues (Saint-Denis, Aubervilliers, Villetaneuse, Champigny, Choisy-le-Roi, Villeneuve Saint-Georges, Gardanne, Saint-Pierre-des-Corps…), alors que les villes gagnées, sans même parler des conseillerE élus dans des listes d’union dirigées par des écologistes ne l’ont pas été autour d’un programme de « communisme municipal ».
Dans les communes gérées, souvent sans discontinuité depuis 1944 (parfois avant) par le PCF, le filet de sauvetage social que constituent les centres municipaux de santé, le maillage associatif (sportif, culturel…), le soutien à un parc de logement social important, s’est amenuisé. Par-delà des évolutions sociologiques indéniables, la désindustrialisation, et la précarisation généralisée des salariéEs et du prolétariat ubérisé, les phénomènes de gentrification de certaines ex-banlieues ouvrières, il y a aussi la question politique de l’austérité budgétaire.
En effet, les maires PCF ont géré leurs municipalités incapables de résister autrement que symboliquement (« les Plumés de l’austérité » dans le 93) aux politiques de gouvernements auxquels le PCF a parfois participé ou qu’il a soutenus de manière critique. Politiques qui ont abouti à restreindre de plus en plus l’autonomie politique des municipalités à travers deux leviers : suppression des ressources des taxes professionnelles, d’habitation… remplacées par des dotations gouvernementales, et transmission aux intercommunalités de nombreuses compétences municipales. Prises dans l’étau, les municipalités communistes ont arbitré des choix de « sacrifices » à coups de délégations de services publics. Processus accompagné de concessions idéologiques sur le terrain de politiques sécuritaires (mise en place de polices municipales, vidéosurveillance…) et de renoncement aux politiques de solidarité avec les mal-logéEs, les réfugiéEs…
Dans le cadre du capitalisme en crise, il n’y aura pas de retour en arrière. Pour les militantEs, l’enjeu des bilans à tirer est de savoir s’il s’agit d’accompagner la longue agonie du PCF ou de se tourner vers les jeunes et les travailleurEs qui se politisent à travers les expériences actuelles, vers les militantEs anticapitalistes, pour construire dans les luttes un projet politique qui redonne son actualité révolutionnaire au mot « communisme ».