Publié le Jeudi 15 mai 2025 à 08h00.

Joséphine et ses camarades sont élues conseillères municipales

Elles sont sept en tout à être élues sur des listes municipales dans des bastions de la classe ouvrière : Joséphine Pencalet à Douarnenez, Marie Chaix à Saint-Denis, Marthe Tesson à Bobigny, Augustine Variot à Malakoff, Marguerite Chapon à Villejuif, Émilie Joly et Adèle Métivier à Saint-Pierre-des-Corps. 

Une dizaine de femmes se retrouvent en position éligible sur les listes municipales alors qu’elles n’ont pas le droit de vote. En banlieue parisienne, une femme est présente dans chaque commune, ainsi qu’à Paris. À Avignon, Antoinette Bellot conduit la liste communiste. Les autres formations politiques dont le Bloc national et le Bloc des gauches s’opposent à cette initiative en déclarant qu’ils ne décompteront pas les voix portées sur les candidates.

Sitôt élues, sitôt invalidées

Le 3 mai 1925, Marthe Tesson est élue dès le premier tour à Bobigny. Elle est nommée deuxième maire-adjointe. Le 10 mai, trois autres candidates de la banlieue ­parisienne sont élues au second tour dans des conseils municipaux : Augustine Variot à Malakoff, Marie Chaix à Saint-Denis et Marguerite Chapon à Villejuif. Le conseil de préfecture de la Seine prononce ­l’­invalidation de l’élection de Marthe Tesson le 20 mai, puis celle des trois autres femmes le 28 mai. Marie Chaix et Marthe Tesson formulent un recours devant le Conseil d’État. Elles restent à leur poste jusqu’à ce que celui-ci confirme leur inéligibilité, le 29 janvier 1926. Augustine Variot siège au conseil municipal de Malakoff jusqu’à sa révocation le 29 mars 1926 par le préfet.

La dame Pencalet

Sardinière de son état, Joséphine Pencalet commence à être un peu célèbre. Discrète pendant la grève des Penn Sardin, à l’hiver 1924-1925, l’on sait d’elle qu’elle a été une gréviste assidue et active, syndiquée à la CGT-U. La célébration du centenaire de la lutte a mis en évidence la modernité de ce conflit. Le traitement souvent romanesque de cette histoire a toutefois laissé de la place à une étude plus documentée, notamment au travers de l’ouvrage de Fanny Bugnon1.

Pourquoi Joséphine ? La volonté du maire, Daniel Le Flanchec, de surfer sur la victoire toute chaude de la grève, son implication personnelle dans le conflit, suffisent probablement à le convaincre de prendre sur sa liste, en bonne place, une gréviste de l’hiver. L’implication de Lucie Colliard dans le soutien aux grévistes et ses liens avec le secrétariat Femmes de l’internationale auront fait le reste. Mais pas si facile de trouver une femme qui accepte de figurer sur la liste, et, d’être élue ! Le choix de Joséphine s’impose, notamment par son engagement et sa situation personnelle — veuve du cheminot Leray, avec des enfants, ayant vécu à Paris. Aucun homme n’aura à donner son aval. Ça aide !

Quant à Douarnenez, c’est le début du « bastion rouge ». Le maire est communiste, mais d’un type particulier, rien à voir avec les communistes qui suivront : il porte sur sa main le tatouage « Mort aux vaches », s’est engagé en première ligne dans le soutien à la grève, dans les manifs, contre la police, ce qui lui a valu d’être suspendu, puis rétabli.

 

  • 1. Fanny Bugnon, l’Élection interdite, Éditions du Seuil, 2024.