À l’évidence, Fillon, l’UMP et le Figaro semblent avoir trouvé une cible de prédilection : l’accord entre le Parti socialiste (PS) et Europe Écologie-Les Verts (EÉ-LV) qui acterait la sortie du nucléaire et, en conséquence, rien moins que… « le retour au Moyen Âge » voire, selon Sarkozy, « un retour à l’époque de la bougie » ! En fait, l’objet du délit est assez éloigné de ces fantasmes, puisque, au contraire, il enregistre les divergences maintenues sur le nucléaire entre le PS et EÉ-LV.
Par contre, les différentes péripéties qui ont accompagné cet accord constituent une véritable leçon de choses. D’abord, l’issue des négociations souligne une fois de plus que l’appétit d’EÉ-LV pour l’obtention d’un groupe parlementaire prime désormais sur toute autre considération : quelques circonscriptions « sûres » et réservées valent bien la poursuite des travaux de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes et de l’EPR de Flamanville ! La deuxième leçon concerne l’arrogance de François Hollande et de son équipe qui ont purement et simplement supprimé, a posteriori et sans en aviser les écologistes, l’un des passages du document pourtant négocié entre la direction d’EÉ-LV et celle du PS. Cette attitude en dit long sur la manière dont François Hollande, en cas d’élection, traiterait les écologistes et ce que seraient les rapports de subordination d’EÉ-LV par rapport au PS et au gouvernement.
Le troisième enseignement de cette séquence est, sans nul doute, le plus spectaculaire : ainsi, les médias, sans être démentis par les intéressés et comme s’il s’agissait là d’un fait courant, ont rapporté que ce caviardage d’un paragraphe de l’accord résultait en réalité de la pression – via Bernard Cazeneuve, député-maire de Cherbourg – du groupe Areva à qui le passage sur « la reconversion, à emploi constant, de la filière de retraitement et de fabrication du MOX » ne convenait pas ! Il ne s’agit sans doute pas d’une première, mais la grossièreté de cette intrusion d’une multinationale dans les discussions programmatiques entre partis politiques aura eu au moins l’intérêt d’attirer l’attention sur le rôle proprement politique que jouent les grandes entreprises qui se croient désormais autoriséEs à dicter aux femmes, hommes et partis politiques non seulement les décisions qu’ils doivent prendre mais aussi les programmes qu’ils doivent défendre…
La dernière leçon concerne, bien sûr, les rapports au sein du camp écologiste. À l’ouverture des négociations avec le PS, EÉ-LV avait fait de la sortie du nucléaire la condition d’un accord. Puis, progressivement, cette prétention s’est réduite à l’exigence de l’abandon de Flamanville ou, à tout le moins, de l’arrêt des travaux. Et là, c’est Eva Joly qui est montée au créneau. Avec, sans doute, d’autant plus de pugnacité qu’elle était sincèrement convaincue ! On comprend donc que l’accord finalement conclu « ne la fasse pas rêver » et que son enthousiasme pour Hollande – porte-parole d’Areva – soit modéré. Il fallait donc la « recadrer ». Ce qui fut fait…
François Coustal