Publié le Dimanche 17 février 2013 à 20h36.

Hôpital : du drame de Port-Royal à la réforme Couty

Gestionnaires hospitaliers et pouvoir politique veulent éviter toute réflexion sur l’environnement du drame survenu la semaine dernière à la maternité de Port-Royal (cf. Tout est à nous ! n°181). C’est qu’une fois encore sont mises en lumière les conséquences des politiques imposées à l’hôpital depuis 10 ans.À l’hôpital, un lit vide ne « rapporte pas ». Le « taux d’occupation des lits » doit être le plus élevé possible. C'est l’obsession des gestionnaires hospitaliers. De même, la « durée moyenne de séjour » doit être la plus courte possible, puisqu’un séjour qui se prolonge rend celui-ci déficitaire pour l’hôpital.Dans ces conditions, disposer de lits vides et de personnel disponible est une faute de gestion, tout comme conserver un malade « trop longtemps ». D’où le renvoi à domicile systématique de toute personne ne nécessitant pas dans l’instant des soins « quantifiables » et susceptibles d’être facturés. Le doute, la prévention, le temps de comprendre n’ont plus ici leur place, la dictature du temps et de l’urgence s’impose. C’est dans ce contexte que travaillait la sage-femme de Port-Royal qui a pris la décision de renvoyer la maman chez elle. Il semble qu’elle l’ait d’ailleurs rappelée un peu plus tard pour s’assurer que l’enfant bougeait.Rentabilité = insécurité…La pression gestionnaire qui s’exerce au quotidien sur les soignants et à laquelle il est extrêmement difficile de résister est destructrice de l’acte de soin (réduit à un acte technique effectué le plus rapidement possible) et de l’éthique professionnelle. Elle peut mettre en cause la sécurité du malade. « Rentabilité » et « gains de productivité » sont au cœur du système de financement dit « tarification à l’activité » (dans le jargon gestionnaire T2A), et de la « gouvernance » d’entreprise imposés à l’hôpital par les contre-réformes depuis 2003.Leur abrogation n’est pourtant pas prévue par ce gouvernement dans le « pacte de confiance pour l’hôpital » actuellement en préparation sous la houlette d’E. Couty. Pire, appliquant la méthode gouvernementale du « dialogue social », Couty semble avoir réussi à faire cautionner un simple « toilettage » des contre-réformes par les syndicats et mouvements de médecins hospitaliers.Pour éviter de nouveaux drames, c’est pourtant l’abrogation des contre-réformes hospitalières depuis 2003 (dont la loi Bachelot) qui est à l’ordre du jour !J.C. Delavigne