Le Premier ministre Jean Castex prévient ne pas croire au « consensus mou » et prétend conclure le Ségur de la Santé dans les jours qui viennent et régler « à court terme » le dossier des retraites. Tambour battant, l’ex-secrétaire général adjoint de l’Elysée sous Nicolas Sarkozy, aux ordres d’un Macron qui annonçait en pleine crise sanitaire « un plan massif d’investissement et de revalorisation des carrières », veut en finir avec la contestation hospitalière.
L’arrivée à Matignon de l’ex-directeur de l’Hospitalisation et de l’offre de soins, artisan de la T2A, tarification à l’activité hospitalière pour soumettre celle-ci aux lois du marché, flanqué de Nicolas Revel, ex-directeur de l’Assurance maladie, promoteur de toutes les politiques d’austérité, comme chef de cabinet, donne le ton. Celui du retour au « monde d’avant » avec deux casseurs notoires de l’hôpital public.
Colères multiples
Le 30 juin dernier, la mobilisation affaiblie par des divisions à l’œuvre dans la représentation syndicale, qu’elle siège au Ségur ou pas, a connu, notamment en Île-de-France, un reflux dont a profité Véran, ministre de la Santé, pour lancer des miettes de revalorisation salariale à celles et à ceux qui, il n’y a pas si longtemps étaient portés aux nues. 80 euros mensuels pour les soignantEs, 35 pour les autres ! Bien loin des 300 euros revendiqués depuis l’année dernière par des hospitalièrEs qui n’ont pas dit leur dernier mot. D’autant plus que l’enveloppe de 6 milliards, avancée par le ministre, comprend le financement de la filière sanitaire associative et l’hospitalisation privée. En clair, permettre aux actionnaires du privé lucratif de préserver leurs dividendes…
Après avoir claqué la porte du Ségur, les médecins hospitaliers, privés d’une revalorisation décente alors qu’un tiers des postes de praticienEs sont vacants, s’étaient joints à l’appel du 30 juin. De leur côté, les internes, médecins en formation, font cavalier seul pour contester ce Ségur dont les propositions salariales ne permettent même pas d’atteindre une rémunération au SMIC horaire, et menacent d’une grève le 9 juillet. Les praticiens à diplôme hors Union européenne, les PADHUE, en majorité originaires du Maghreb, étaient aussi dans la rue, pour exiger la fin de leur statut précaire. À compétences égales, ces médecins n’ont pas les mêmes droits, des contrats courts et des salaires dérisoires, corvéables à merci. Le décret qui devait corriger cette injustice n’est toujours pas paru.
Répression
Concernant les embauches, la titularisation des contractuelEs, près de 20% dans le public, et l’arrêt de la fermeture des lits, aucune annonce. Quant à la gouvernance, le directeur reste le seul patron à l’hôpital. Dans le même temps, celles ou ceux qui, comme au CH du Rouvray ou à l’Ehpad de Livry-Gargan (93), se sont levés pour dénoncer la mise en danger de leurs collègues, sont aujourd’hui convoqués à des entretiens disciplinaires. Parallèlement, les autorités remettent en cause la reconnaissance automatique en maladie professionnelle, la limitant aux « cas sévères »de Covid-19. Sans oublier la rupture d’égalité dans l’attribution de la prime « Covid » annoncée fin mars par Macron. Le retour au monde d’avant est violent ! Nous n’oublions pas les violences policières qui le 16 juin, à Paris, n’ont pas épargné les hospitalierEs, chargés et gazés sans autre raison que de faire peur aux contestataires.
Par ailleurs, la question des salaires ne doit pas occulter le combat engagé depuis de longues années par les syndicats hospitaliers et depuis quelques mois par le Collectif inter-hôpitaux. Sortir de l’hôpital-entreprise, de la tarification à l’activité, défendre un budget décidé en fonction des besoins de la population, est au cœur de ce que doit être un hôpital public qui assure l’accès à des soins de qualité pour touTEs. Un hôpital public, bien commun géré par celles et ceux qui le font vivre, en lien avec les représentantEs des « usagerEs ».
Objectif 14 juillet
Le remaniement ministériel est invoqué pour justifier le report des conclusions du Ségur. La réalité est tout autre. Tous les syndicats encore présents à la table des négociations rejettent le protocole proposé. Inverser la vapeur est donc encore possible et la prochaine échéance du mouvement est cruciale. Le 14 juillet de République à Bastille, toutes les forces qui contestent la politique de casse sociale de ce gouvernement doivent se retrouver pour mettre à l’honneur les premières et les premiers de corvées, dont les hospitalierEs sont aujourd’hui le fer de lance.