La logique du profit régit totalement La Poste, avec des conséquences dévastatrices pour les travailleurEs de cette entreprise. Depuis 2012, il y a eu 28 suicides de collègues. Au moins 9 sont directement liés aux conditions de travail au sein du groupe...
Normal dans une entreprise qui a supprimé entre 2002 et 2012 plus de 100 000 emplois. Et ça continue : en 2016, ce sont 7 656 emplois qui ont été supprimés. Pendant ce temps, l’État « assiste » généreusement les patrons de La Poste en offrant 350 millions d’euros au titre du CICE (Crédit impôt compétitivité emploi) en 2015... Sans aucune garantie d’embauche derrière bien sûr ! Pire, c’est l’explosion du recours au travail précaire, avec toutes sortes de contrats aidés et de boîtes d’intérim. On peut donc remercier les gouvernements successifs.Cette attaque contre La Poste n’est pas sans conséquence sur la qualité du service public rendu. Plus de 7 000 bureaux ont déjà été fermés ces 10 dernières années en zone rurale et La Poste réfléchirait à faire de même d’ici 2020 en zone urbaine.La multiplication des suicides, et surtout leur médiatisation, a contraint La Poste à faire mine de prendre en compte l’urgence sociale. Elle a donc décidé d’ouvrir des négociations au courrier. Certaines directions syndicales ont trop vite crié à la victoire et à un pseudo gel des réorganisations. En réalité, rien de tel : les projets de suppressions d’emplois continuent d’avancer, ce ne sont que leurs mises en place effectives qui sont repoussées à la fin des pseudo négociations. Pire, la direction prend prétexte de ces négociations pour déployer dans l’accord proposé tout son arsenal stratégique... avec toujours plus de réorganisations.
Un réel point d’appuiLa CGT et SUD, rejoints par l’UNSA, ont donc quitté la table des négociations et ont appelé jeudi dernier à une journée tous métiers de grève nationale. La dernière grève de ce type datait de 2009. La Poste a annoncé un chiffre de grévistes volontairement minoré de moins de 5 % : elle prend en compte les effectifs globaux (y compris les agents en vacances, repos ou malades ce jour-là...). Le décalage avec les chiffres observés sur certains services par les syndicats par rapport à ceux de la direction peuvent atteindre jusqu’à 30 % ! Il est évident que la grève a mieux fonctionné là où un travail militant préalable avait été effectué, mais aussi sur les sites visés par des projets de réorganisation. Cependant, il n’y a pas eu de raz-de-marée.Cela s’explique en grande partie par les tergiversations pour annoncer publiquement cette date de grève. Pour autant, le 8 décembre est un réel point d’appui. Il y a eu des rassemblements dans plusieurs dizaines de directions départementales. Cela a aussi été l’occasion d’activer des intersyndicales départementales, parfois plus larges que la simple intersyndicale nationale. Mais surtout ce 8 décembre, au-delà des postierEs, tout le monde a entendu parler de l’urgence sociale que traverse l’entreprise. Et le lendemain, des centaines d’usagerEs ont exprimé leur soutien aux facteurEs et guichetierEs.Cette journée a donc donné confiance et rompu l’isolement. Mais il faut proposer des perspectives, d’autant plus que la direction se voit contrainte de concéder un petit recul (mais un recul quand même) en repoussant la date de fin des négociations sur le projet d’accord, actuellement en discussion, du 19 décembre au 12 janvier. Dès à présent, l’intersyndicale nationale doit annoncer des actions et grèves pour ce 12 janvier, et une grève tous métiers avec montée nationale à Paris fin janvier début février. Des échéances qui pourraient devenir des succès importants si elles étaient connues des travailleurs de La Poste dès maintenant pour permettre aux équipes locales de mobiliser largement. Cela pourrait avoir un impact d’autant plus important si cette grève se combinait avec un soutien des usagerEs et de l’ensemble de la population qui, à maintes reprises, ont exprimé leur attachement à un service postal public et de qualité.
Olivier Roman