La crise que traverse la CGT met en évidence l’impasse dans laquelle se sont engagées les directions de la confédération au fil du temps, cela quelque soient les positionnements des différentes structures. Lepaon se maintient encore car la tradition et les pratiques de la CGT ne permettent aucune sortie de crise simple, qui réponde aux problèmes soulevés.
Le fonctionnement complètement bureaucratique ne laisse la place à aucune critique, aucune alternative même minimum, que ce soit des équipes dirigeantes ou dans le domaine des orientations. Pour ce qui est des dirigeantEs, les multiples péripéties qui avaient abouti à l’élection par défaut de Lepaon avaient déjà montré qu’une fois abandonné le mode de tri fait par le bureau politique du PCF, les différents appareils ont bien du mal à se mettre d’accord.En ce qui concerne l’orientation, la pression exercée au cœur de la crise par le patronat et le gouvernement laisse peu de place à une stratégie qui refuse l’affrontement tout en répondant aux colères accumulées.
Des positionnements multiformesCes difficultés se retrouvent dans les déclarations qui montent de dizaines de structures de la confédération. Venues de fédérations, unions départementales, unions locales, syndicats locaux, régionaux, nationaux, personnalités, etc. les prises de positions se multiplient, avec des préoccupations et des propositions multiples.De ces déclarations et du déroulement de la réunion des responsables de structures du lundi 15 décembre se dégagent plusieurs positionnements. Tout d’abord, une partie non négligeable de ces responsables affirment un soutien à Lepaon, avec des motivations différentes faites soit de repli identitaire soit de soutien de fond. Il y a également de nombreuses structures qui se « contenteraient » de la démission du secrétaire général. Mais le plus grand nombre de structures se prononcent ouvertement pour la démission de l’entièreté du bureau confédéral, avec à la clef la préparation d’un congrès extraordinaire posant à la fois les questions de fonctionnement et celles d’orientation.
Une bataille à l’issue incertaineCes différentes prises de positions ont au moins le mérite de refléter, même de façon déformée et pour des motivations variables, la multiplicité des réactions et exigences des syndiquéEs. Reste à savoir comment vont évoluer les positionnements dans les semaines qui restent jusqu’au prochain comité confédéral national, instance officielle et décisionnelle qui se déroulera le 17 janvier.Une préoccupation est largement partagée : ne pas reproduire la cacophonie de l’élection de Lepaon. C’est pour cela que la solution du maintien de l’actuel secrétaire général n’est pas complètement à écarter. L’autre porte de sortie consisterait en la mise en place d’une équipe collégiale provisoire pour préparer un congrès extraordinaire. Il n’est pas sûr que l’absence d’homogénéité des partisans de la démission du bureau confédéral, préalable à cette solution, permettent cette sortie par le haut. Et ce d’autant plus que les problèmes ne feraient alors que commencer : comment débattre démocratiquement de l’orientation de la confédération, d’une orientation stratégique qui permette de sortir de l’attentisme actuel de la CGT ?
Une alternative à partir de la mobilisation ?Les traditions, les habitudes ancrées dans la CGT rendent l’issue de ces pistes fort aléatoire. Les compromis pour faire bouger les lignes le moins possible, pour préserver les prérogatives de chaque appareil, risquent fort de l’emporter.La meilleure façon de (re)construire une image de la CGT conforme à celle qu’ont encore une grande partie des syndiquéEs, des salariéEs, celle d’un syndicat qui défend leurs intérêts, serait de se lancer dans la construction de l’affrontement au patronat, au gouvernement. L’organisation du combat contre la loi Macron, véritable provocation antisociale montée par le gouvernement, pourrait être la meilleure façon d’affirmer que la CGT n’est pas morte.
Robert Pelletier