Le gouvernement, affaibli, redouble d’énergie pour s’attaquer aux politiques sociales. Sa politique n’a pas uniquement pour but de réaliser des économies à tout prix sur le dos de la population, il veut réduire la Sécurité sociale et les prestations sociales à la portion congrue.
Début août, le Premier ministre Édouard Philippe et Agnès Buzyn, ministre « des Solidarités et de la Santé », ont envisagé de faire prendre en charge par les entreprises les indemnités journalières (IJ) de moins de huit jours versées par la Sécurité sociale à partir du quatrième jour d’arrêt de travail1.
Une mesure de privatisation
L’intention du gouvernement n’était évidemment pas d’augmenter ainsi la masse salariale, mais d’amorcer un nouveau recul de la Sécurité sociale en incitant les entreprises à adhérer aux institutions de prévoyance. Une majorité de celles-ci font désormais partie des groupes de protection sociale, et les assurances privées siègent de plus en plus souvent en leur sein. Le fonctionnement de ces institutions de prévoyance est paritaire, et les employeurs cofinancent donc avec les salariéEs le versement d’indemnités complémentaires lors d’arrêts de travail en raison de maladies ou d’accidents du travail. Le paiement du délai de carence peut être inclus dans leurs garanties.
Le remboursement des frais de santé est de plus en plus privatisé, la part du financement par la Sécurité sociale diminuant au profit des régimes complémentaires de santé au sein desquels les assurances privées rognent chaque année un peu plus de parts du « marché de la santé ». L’objectif du gouvernement était d’étendre ce processus aux versements des -indemnités journalières.
Les employeurs se sont opposés à ce dispositif qui aurait augmenté leurs « charges », les cotisations ou le paiement des IJ. Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, est venue à leur secours en déclarant que « cela risque de mettre un coup d’arrêt net à la perception d’un gouvernement pro-business »
Édouard Philippe renonce à ce « transfert brutal ». Cette mesure ne sera donc pas appliquée dans l’immédiat. Par contre les patrons bénéficieront encore en 2019 du Crédit d’impôt compétitivité (CICE), transformé en baisse directe de la part patronale des cotisations, équivalent à six points de la masse salariale. Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), le CICE et les allégements de cotisations sociales représenteront en 2019 près de 40 milliards d’euros. Il faut donc, une fois de plus, trouver de l’argent pour compenser ces royalties accordées aux patrons.
Des économies sur le dos des malades, des pauvres, des retraités…
Tous les moyens sont bons pour cela : le gouvernement poursuit sa campagne contre « les abus ». Après les chômeurEs, les malades et les médecins sont dans son collimateur. Agnès Buzyn a ainsi osé déclarer que « 15 % des arrêts de travail sont inappropriés, sont des abus. Il y a quelqu’un qui paye pour tout le monde, c’est la Sécu. Le médecin prescripteur, ce n’est pas lui qui paye… »
Alors que l’inflation est au plus haut (+ 2,3 % en juillet sur un an), Édouard Philippe annonce un taux d’augmentation de 0,3 % des APL, des allocations familiales et des retraites. Il « regarde s’il pourrait accorder un peu plus aux petites pensions et un peu moins pour ceux qui ont des retraites élevées ». Il envisage aussi « la suppression des allocations familiales pour les familles aisées ». Cette modulation des prestations selon les revenus pourrait évoluer à maintes reprises vers la baisse et devenir ainsi une arme contre toute la Sécurité sociale en faveur des assurances et fonds de pensions…
Il est urgent pour le mouvement social d’engager une campagne pour faire connaître le plus largement possible toutes ces attaques et préparer ainsi une puissante riposte le 9 octobre, jour de grève nationale annoncé par la CGT, FO et Solidaires.
S. Bernard
- 1. Dans le privé, les trois premiers jours, le délai de carence, ne sont pas indemnisés par la Sécu ou sont payés par les employeurs lorsque les conventions collections le prévoient.