Publié le Mercredi 9 juillet 2014 à 10h54.

Leur “dialogue social” est malade, achevons-le !

Il fallait tout l’aplomb d’un Manuel Valls pour oser tenir lundi 7 et mardi 8 juillet une « grande conférence sociale » censée être un temps fort du « dialogue social », le respect d’un des engagements du Président Hollande. Car la politique réelle du gouvernement c’est l’aplatissement devant le froncement de sourcil du patronat, le mépris des organisations de salariéEs, même les plus disponibles pour négocier des reculs.

Côté social, toutes les dernières annonces et décisions du gouvernement sont des régressions pour les salariéEs. Report du déclenchement du dispositif pénibilité pour le calcul de l’âge de départ en retraite, report de l’entrée en vigueur de la règle stipulant que les nouvelles embauches à temps partiel doivent fixer à 24 heures au minimum le temps de travail hebdomadaire, remise en cause des seuils sociaux déclenchant notamment la mise en place d’institutions représentatives du personnel. Et pour être cohérents, les ministres se sont relayés pour dénoncer les grévistes de la SNCF, de la SNCM, les intermittentEs du spectacle, tout en couvrant la politique régressive et répressive à La Poste, Toyota et ailleurs...

Des régressions même pas discutablesCôté dialogue, Valls, Sapin se font concurrence pour annoncer ces mesures, les faire approuver par des députés plus godillots que jamais – même les soi-disant contestataires – dès que le Medef fait connaître une exigence. Mais le comble du mépris est affiché par Sapin : « Nous avons à répondre à une très belle question : “Y a-t-il une finance heureuse, au service d’investissements heureux ?” Je l’exprimerai autrement et vous verrez ma part de provocation. Notre amie c’est la finance : la bonne finance». Donc non seulement ministre des Finances mais ministre de La Finance, celle dont le candidat Hollande avait failli nous convaincre qu’elle était son ennemie. La seule finance que nous connaissons est celle au service des actionnaires, des patrons, qui organise la fermeture des entreprises, le blocage des salaires, la dégradation des conditions de travail, la destruction des services publics.Ceci est bien le signe de l’évolution de la politique gouvernementale, entre les « promesses électorales » de Hollande et la mise en œuvre par Valls. Une politique d’attaques toujours plus violentes contre les salariéEs et de cadeaux toujours plus importants au patronat, actionnaires et financiers. Cette politique s’apparente à celles de régressions sociales sans précédent imposées par Blair en Grande-­Bretagne et Schröder en Allemagne au début des années 2000.

Marché de dupesCette radicalisation antisociale de la politique gouvernementale met encore plus en évidence celles des organisations syndicales. Si Solidaires s’est extrait de ce bourbier, pas de surprise du côté des syndicats qualifiés de réformistes (CFTC, CFE-CGC, UNSA) qui cautionnent cette politique depuis des mois. Les reculs du gouvernement, annulant les maigres contreparties qui avaient servi de justification à la CFDT, n’ont pourtant pas convaincu Laurent Berger de se retirer. Pour FO qui s’est retirée en cours de conférence, la traditionnelle posture radicale ne rend pas compte de la politique réelle de la majorité des structures imprégnées de « dialogue social » et de « responsabilité ».Pour la CGT, c’était aussi un moment de vérité mais non choisi. Comment préserver son statut de première (?) organisation représentative des salariéEs ? Résultats électoraux, animation des luttes emblématiques, ces derniers mois mettent en lumière une situation contradictoire : la CGT reste perçue comme la confédération où se retrouvent les militantEs combatifs mais bien souvent en décalage par rapport à l’orientation confédérale. Ceci explique les campagnes anti-CGT menées par le patronat et largement répercutées par les médias. Son semi-retrait de la conférence sociale risque de poser plus de problèmes qu’il n’en résout… Et la FSU s’est aussi retirée de la comédie, emboîtant bien tardivement le pas à la CGT.

Tout à gagner, par la lutteLe gouvernement cherche la caution des « partenaires sociaux ». Le patronat, dont toutes les revendications sont satisfaites, va poursuivre son offensive en exigeant la simplification du code du travail. Les représentantEs des salariéEs dignes de ce nom, n’avaient vraiment rien à faire dans cette arnaque.Les intermittentEs et précaires, les cheminotEs, les marins de la SNCM, les postierEs, les milliers de manifestantEs contre l’Ayraultport de Notre-Dame-des-Landes, par leurs mobilisations montrent la voie qu’il faut suivre, le combat qu’il faut rejoindre. C’est là que se trouve la responsabilité des organisations syndicales, politiques et des associations qui refusent la politique des Hollande, Valls et Sapin : soutenir les luttes, aider à leur coordination, préparer l’affrontement avec ce gouvernement ami de la finance et du patronat.

Robert Pelletier