Après avoir longtemps insisté pour rencontrer la mairie (mais surtout grâce à des pressions internes avec lesquelles les livreurEs conscients ont su admirablement composer), cette dernière s’est enfin décidée à rencontrer le 8 avril la délégation élue des Livreurs nantais en lutte. Mais l’espoir des livreurEs n’a été que de courte durée.
Les livreurEs sont mobilisés contre l’exploitation des plateformes mais aussi contre l’arrêté municipal (en application depuis le 8 mars) aggravant terriblement la précarité de leur situation en interdisant l’accès des zones piétonnes aux scooters thermiques. Après l’application de cet arrêté sans aucune concertation, ni des restaurateurEs ni des livreurEs, les Livreurs nantais en lutte n’avaient pas de grandes attentes sur ces négociations. Néanmoins, le très mince espoir de rencontrer une mairie prête à discuter est vite retombé : ont été envoyés, pour discuter avec les livreurs, M. Thibaut Guiné et M. Baptiste Le Coz, deux servants de l’autorité municipale sans aucun pouvoir de décision. Avaient-ils des propositions à faire aux livreurs dont le quotidien est devenu un calvaire ? Non, absolument aucune. Alors même que la ville est sous couvre-feu à partir de 19 h, la mairie n’a pas voulu céder sur la revendication d’ouverture du créneau horaire pour les livraisons entre 19 h et 22 h qui aurait permis aux livreurs de respirer un peu.
Une hypocrisie qui ne dupe pas les livreurs
Mais les livreurEs ne sont pas dupes et ils et elles ont bien conscience de l’hypocrisie des arguments avancés par la mairie. Une question de sécurité ? Les scooters électriques, pourtant beaucoup plus dangereux car on ne les entend pas, sont autorisés. Une question d’environnement ? Les livreurEs ont parfaitement conscience des enjeux écologiques. Pour nombre d’entre eux, migrants en France, leurs familles restées au pays sont d’ailleurs les premières touchées par les sécheresses, et en outre l’interdiction des scooters thermiques pour l’achat de scooters électriques neufs (dont la production est destructrice pour l’environnement) n’aura aucune conséquence sur ce fait-là. La mairie dite « socialiste » cherche seulement à s’acheter une vitrine écolo-bobo sur le dos des travailleurEs les plus précaires n’ayant que ce revenu pour nourrir leur famille, opposant ainsi la lutte pour la défense de la vie sur Terre à celle de l’intérêt des travailleurEs. Une honte sans nom. La mairie leur avait promis un retour rapide après étude de leurs revendications. Les deux courriers des livreurs sont restés jusqu’ici lettre morte.
La lutte continue et se durcit
Sans mauvaise surprise, les livreurEs restent donc sur leur faim, mais ne se laissent pas abattre. Ils et elles ont su aussitôt trouver le soutien de pas moins de dix organisations politiques et syndicales (UCL, Féministes révolutionnaires Nantes, Solidaires 44, CGT 44, Nantes en Commun, Lutte ouvrière, NPA, Ensemble !, La France insoumise Nantes, et la SCALA) qui ont signé un communiqué unitaire le 12 avril pour affirmer leur soutien à la lutte des livreurEs contre les plateformes, dénoncer l’arrêté municipal ainsi que l’attitude hypocrite de la mairie lors des pseudo-négociations du 8 avril. Le collectif des Livreurs nantais en lutte a tenu une conférence de presse le 15 avril et a invité ses soutiens à venir s’exprimer publiquement. La presse est venue nombreuse et l’événement a été une réussite.
Grâce à leurs soutiens, les Livreurs nantais en lutte espèrent pouvoir trouver les fonds pour attaquer juridiquement la légalité de l’arrêté municipal qui empêche des travailleurEs d’exercer leur travail alors qu’il n’y a eu aucune concertation préalable, ni délai de transition accordé ; mais aussi attaquer les plateformes de livraison de repas pour travail dissimulé afin d’obtenir une salarisation de l’ensemble des coursierEs sur le territoire français. Les dernières condamnations des plateformes dans les tribunaux des différents pays d’Europe (Grande-Bretagne, Italie, Espagne, Pays-Bas…) leur donnent l’espoir de trouver justice pour leur condition.