Publié le Lundi 7 décembre 2020 à 18h58.

Manifestation du 5 décembre contre la LSG : un échec dont il faut tirer les leçons

La manifestation parisienne du samedi 28 novembre contre la Loi Sécurité Globale a été un succès important, malgré quelques incidents en fin de parcours, avec de 80 000 à 100 000 manifestantEs sur un parcours classique République-Bastille. Le samedi suivant 5 décembre, la manifestation n’a, de fait, pas pu se tenir, permettant au pouvoir macronien de reprendre la main sur le thème des « casseurs » avec des images en boucle sur les chaines d’info de voitures incendiées, vitrines brisées et autre mobilier urbain fracassé. Les cortèges organisés, dont celui du NPA, ont été contraints de faire demi-tour sous une pluie de lacrymos. Comment est-on arrivé à un tel fiasco ?

Une envie de revanche de la Préfecture de Police ?

Retour en arrière : la manifestation prévue le 28 avait été interdite le mardi 24 par un arrêté du Préfet de Police de Paris, l’ineffable Didier Lallement, au prétexte de la crise sanitaire et de l’impossibilité de faire respecter une distance d’un mètre entre les manifestants. Double manque de chance pour Lallement et le gouvernement, une décision de justice a autorisé la manifestation en lieu et place du rassemblement statique voulu par la PP et le tabassage du producteur de musique Michel Z. par des policiers, dont la vidéo est devenue virale, a fortement contribué au succès de la mobilisation. Résultat, la Préfecture a dû reconnaitre la mobilisation la plus importante depuis le début de la crise sanitaire, comptabilisant 46 000 manifestants, un chiffre sans doute inférieur de moitié à la réalité.

Baisse de la mobilisation et traquenard policier

Au vu de la mobilisation, le gouvernement a dû faire en partie marche arrière et promettre « une nouvelle écriture complète » de l’article 24 du projet de loi. Ce qui pose problème et est en écho aux difficultés d’organiser les mobilisations dans la période, c’est que ce recul du pouvoir n’a pas été le prélude à un regain de mobilisation. Au contraire les manifestations du samedi 5 ont connu une affluence moindre que le 28, que soit à Paris ou en régions.

À Paris, la manifestation, initialement prévue contre le chômage et la précarité a été également appelée par la coordination contre la LSG, avec un départ Porte des Lilas, dans un lieu excentré par rapport à République, avec un parcours dans des rues plus étroites et moins sécurisables qu’habituellement. Ceci d’autant plus que le parcours n’avait pas fait l’objet du « nettoyage » auquel on pouvait s’attendre avec la présence de chantiers et de véhicules encore en stationnement, une sorte de « click and collect » gracieusement mis à disposition par la Préfecture de police à l‘usage de ceux qui pensent renverser l’ordre capitaliste en détruisant du mobilier urbain et en incendiant des agences bancaires. De plus les forces de maintien de l’ordre ont été en permanence au contact rapproché du cortège, collant à la tête de la manifestation, lui interdisant une progression normale.

Tout était donc en place pour le désastre auquel les manifestants atterrés ont pu assister : constitution d’un black bloc, jets de projectiles, violence riposte policière en retour, manifestation bloquée et finalement demi-tour général sous une pluie de gaz lacrymogènes, images de violences et d’incendies dont les chaines d’infos ont pu faire leurs choux gras.

Nous organiser pour faire face aux pièges de la police

Cette situation a de fait permis à la Préfecture de se passer d’un quelconque arrêté pour interdire la manifestation. 

La Préfecture a fait ce samedi la démonstration qu’elle reste maitresse du maintien de l’ordre et peut, à son bon vouloir et selon les directives qu’elle reçoit du pouvoir en place, faire qu’une manifestation se passe bien, ou contraire qu’elle soit émaillée d’incidents plus ou moins graves, voir interdire dans les faits une manifestation de se tenir.

Cette manifestation est donc un échec politique et organisationnel dont il faudra tirer les leçons, échec d’autant plus dommageable qu’il altère les capacités de mobilisation pour les échéances importantes à venir, à commencer par la nécessaire mobilisation contre la loi « Séparatisme » du samedi 12 décembre.