Après 139 jours de grève, les facteurs et les factrices du 2e arrondissement de Marseille ont repris leur tournée. Bien qu’il n’y ait eu pendant ce conflit aucune protestation collective contre leur grève, ils s’inquiétaient un peu. Comment allaient-ils être reçus ? Quelques heures plus tard, c’est avec le sourire qu’ils sont revenus au centre, tellement l’accueil avait été chaleureux de la part d’habitants tout heureux de retrouver leur facteur habituel. Il est vrai qu’en 139 jours, les usagers de ce quartier populaire ont pu faire la différence entre une équipe de postiers attachés au service public et le système mis en place pour les remplacer : distribution deux à trois fois par semaine par des intérimaires non formés, obligation de se déplacer pour aller chercher colis ou lettres recommandées. Une préfiguration du système que la direction de la Poste cherche à instituer et qu’elle mettra en place si elle ne rencontre pas partout la même résistance.Les postiers ont obtenu le maintien des emplois permanents, un volant de remplacement égal au quart de l’effectif sans recourir à l’intérim ; le recrutement en CDI de la factrice en CDD que la poste voulait licencier pour la remplacer par un intérimaire ; le maintien du service colis de proximité au lieu de le confier à la filiale Colisposte ; le report de la mise place dans ce bureau de « facteur d’avenir », projet de liquidation du service public, des postiers professionnels et de transformation de l’usager en client. Comment un tel succès a-t-il pu se construire, avec une telle durée, alors même que le conflit ne s’étendait pas aux autres centres de la ville ?La longueur s’explique, bien entendu, par le refus de la direction de négocier pendant 100 jours, comptant sur l’isolement et le découragement. Mais surtout cette ténacité et ce succès s’expliquent par le fait que les facteurs de Marseille 02, en grève à près de 100 %, cadres compris, syndiqués à la CGT à 90 % sont restés mobilisés et actifs pendant 139 jours commençant leur journée dès 6 h 30, heure de la prise de travail, par une AG quotidienne, pour aller ensuite à la rencontre de la population du quartier, rendre visite aux autres centres postaux, s’unir avec ceux de Fralib et de Netcacao en lutte également, participer aux actions du comité de soutien des usagers avec les militants locaux du NPA et du PCF, recevoir la presse ou des responsables politiques de gauche. La direction de la Poste a fini par comprendre qu’ils ne céderaient pas !« On lâche rien » chantaient-ils à la reprise du travail, un chant de vigilance, la direction le sait, ils sont prêts à remettre ça si les engagements n’étaient pas tenus.Alain Castan
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