Publié le Mercredi 19 février 2020 à 09h23.

Psychiatrie : douleur et colère après la mort d’Élodie

Le 13 février, Élodie, infirmière en psychiatrie au Centre hospitalier de Thouars (près de Niort), a été frappée à l’arme blanche par un patient voulant semble-t-il quitter l’établissement. Elle est décédée de ses blessures au CHU de Poitiers.

À la veille de la journée de mobilisation des hôpitaux, ce drame, dont ni le monde politique ni les médias ne se sont beaucoup émus, est fortement entré en résonance avec la souffrance et la colère des professionnels de la psychiatrie, parent pauvre et délaissé d’un hôpital en pleine crise. Des minutes de silence en mémoire d’Elodie ont été observées lors des rassemblements du 14 février.

Si le moment est au recueillement et à la solidarité avec la famille et les collègues d’Élodie, il est aussi à la colère face à la manière dont sont traités celles et ceux qui souffrent psychiquement et celles et ceux qui tentent d’en prendre soin.

Il y a 15 ans, à l’hôpital psychiatrique de Pau, une infirmière et une aide-soignante étaient assassinées par un jeune patient. Déjà, à l’époque, le monde de la psychiatrie avait dit sa colère et crié « Plus jamais ça », mais les seules réponses apportées depuis par les gouvernements successifs ont été des réponses sécuritaires. Une stigmatisation des personnes schizophrènes, présentées comme des meurtriers potentiels a été orchestrée, faisant resurgir de vieilles peurs. Des lois répressives ont été votées.

Les seuls nouveaux crédits accordés à la psychiatrie l’ont été pour embaucher des vigiles, renforcer les dispositifs de contrôle et de surveillance, créer des unités carcérales pour malades dits « difficiles », tandis que les moyens accueillir humainement les personnes en souffrance, prévenir les situations de crise et prendre soin d’elles n’ont cessé de s’étioler sous les coups d’une gestion d’entreprise de l’hôpital, et des coupes sombres dans les budgets.

Le résultat est la montée de la maltraitance institutionnelle, tant pour les soignantEs que pour les soignéEs, une maltraitance qui renforce la violence et parfois débouche sur le drame.

Rendre hommage à Élodie, c’est aussi transformer notre peine et notre colère en actes, pour que ce qui n’est pas supportable ne soit plus supporté.