Dans la lignée de sa politique de casse du droit du travail, le ministère s’en prend aux agents de l’inspection qui refusent de se muer en relais du gouvernement des patrons. Les contrôleurs et inspecteurs du travail, chargés de contrôler l’application du droit du travail dans les entreprises, font l’objet d’une répression sans précédent par leur hiérarchie, qui s’attaque à leur rémunération. À Paris notamment, la moitié d’entre eux ont reçu fin octobre une lettre les informant de la baisse de leurs primes. En juin, une partie du remboursement des frais de déplacement leur avait déjà été supprimée. Par leur ampleur, ces sanctions pécuniaires n’ont pas d’autre finalité que de briser l’actuel mouvement de contestation des orientations politiques du contrôle du droit du travail. À travers une « politique travail » définie par le gouvernement, l’inspection du travail tend en effet à être instrumentalisée. Son activité est orientée d’une part vers des domaines sur lesquels le patronat peut, du fait des insuffisances de la réglementation (amiante, produits chimiques, souffrance au travail), reporter sa responsabilité pénale sur l’État, lequel la renvoie sur ses agents, et d’autre part vers des objectifs répondant davantage à des impératifs de conseil aux entreprises et de régulation de la concurrence que de protection des droits des travailleurs. Dans le prolongement de cette politique, la réforme de l’État (RGPP) intègre l’inspection du travail dans une « direction régionale de l’entreprise » conçue comme guichet unique au service des employeurs. Au sein de l’inspection du travail, cette politique est déclinée par la fixation bureaucratique d’objectifs individuels chiffrés par domaine de contrôle prioritaire, associée à un outil statistique de compte rendu d’activité qui n’est en réalité qu’un outil de flicage. Elle oblige les agents de contrôle à orienter leur activité sans lien avec la demande sociale qu’ils reçoivent, et incite à leur mise en concurrence au travers de l’évaluation individuelle des résultats. Ces changements sont fortement contestés et entraînent diverses actions de désobéissance (boycott de réunions de service, d’entretiens d’évaluation, de remontées statistiques) qui souffrent cependant de l’absence de structuration et du manque de perspective donnée par les syndicats. Or, le succès de la politique travail suppose la mise au pas des agents de contrôle et la destruction de toute forme de contestation. Elle peut compter sur une hiérarchie, pourtant issue de l’inspection du travail même, particulièrement zélée qui, lorsqu’elle ne parvient pas à soumettre les agents, met en œuvre des pratiques dignes du patronat le plus vil (menaces constantes, dénigrement des syndicats, sanctions aveugles et systématiques). Ce climat accroît le malaise d’une profession aux moyens déjà dérisoires. Cette politique vise à couper le lien entre l’inspection du travail et les travailleurs et à la détourner de leurs préoccupations. Elle doit être combattue sans réserve, autant par les agents de contrôle que par les travailleurs, car elle s’intègre aux attaques contre un droit du travail de moins en moins protecteur, permises par la dégradation du rapport de forces, et s’appuie sur la quasi-impunité de la délinquance patronale. Mais cela ne suffira pas. Parce que c’est par le droit du travail que s’organisent juridiquement les rapports d’exploitation, seuls le renversement du rapport de forces à l’échelle de la société et la remise en cause de la propriété privée des moyens de production permettront l’émergence de règles réellement protectrices et le contrôle de leur effectivité. Le comité inspection du travail - emploi Île-de-France