À l’évidence, les morts du Rana Plaza ne comptent pas pour le Conseil constitutionnel (CC), au regard des intérêts des multinationales...
La mort au Bangladesh en 2013 de 1 100 ouvrières et ouvriers lors de l’effondrement de l’immeuble du Rana Plaza – qui abritait des ateliers textiles de marques telles que Mango, Benetton ou Auchan – avait provoqué une vague universelle d’indignation.
Aussi, une proposition de loi avait été déposée devant le Parlement français obligeant les multinationales françaises (150 entreprises de plus de 5 000 salariéEs) à établir un plan de vigilance pour s’assurer que leurs sous-traitants ou fournisseurs à l’étranger respectent les droits humains et environnementaux fondamentaux. Pour assurer le respect de ces obligations, la loi prévoyait un mécanisme de sanctions graduées pouvant aller jusqu’à des amendes.
Dès son adoption, ce texte a suscité la fureur du Medef, et des députés des Républicains se sont chargés de déposer un recours devant le CC. Résultat : le Conseil a validé la loi... mais l’a vidée de sa substance en supprimant la possibilité d’une amende. Le Medef s’est immédiatement réjoui de cette décision, évoquant par la voix de l’un de ses porte-parole « une décision (qui) nous rassure un peu sur les conséquences très néfastes que cela aurait pu avoir sur l’économie française dans sa globalité ».
Avoir un bon copain...
Une fois de plus, le CC se révèle être un allié du patronat. À plusieurs reprises ces derniers mois, il l’avait déjà été en matière fiscale.
Ainsi, en octobre 2016, il a mis son veto à un décret instituant un registre public des trusts dont au moins un des bénéficiaires serait imposable sur le territoire français (le trust permet à un individu ou à une entreprise de transférer à un administrateur le contrôle de son patrimoine, un dispositif largement utilisé à des fins d’évasion fiscale...).
En décembre dernier, il a censuré un article de loi sur le reporting public « pays par pays », c’est-à-dire l’obligation pour les multinationales de donner des informations sur leurs activités à travers le monde.
Et toujours en décembre, il y a eu censure de la « taxe Google » votée par les parlementaires dans le cadre du budget 2017, taxe qui visait à obliger toute entreprise qui réalise des activités et des profits en France... d’y payer des impôts.
Henri Wilno