Publié le Jeudi 22 juillet 2010 à 11h15.

TPE : petites combines entre amis

Le 8 juillet, les députés de droite ont voté contre une mesure présentée par Éric Woerth, visant à permettre une représentation syndicale dans les entreprises de moins de onze salariés. Dans la droite ligne de la loi de 2008 sur la « démocratie sociale » qui a profondément transformé les règles de représentativité syndicale, le gouvernement a transmis en mai dernier un projet de loi complémentaire portant sur le dialogue social dans les très petites entreprises (TPE – moins de onze salariés). Ce projet s’articulait autour de deux éléments : la mesure de l’audience des syndicats par un scrutin permettant aux 4 millions de salariés concernés de voter tous les quatre ans par correspondance pour des listes syndicales, et la possibilité de mettre en place des commissions paritaires territoriales, où auraient siégé représentants syndicaux et patronaux et permettant d’aborder l’ensemble des problèmes particuliers des TPE. Tollé du côté des organisations patronales, qui y voient de « nouvelles contraintes » et ont fait pression sur les députés de droite. Lors du premier examen, ceux-ci avaient donc fait disparaître cette mesure du texte, mais le gouvernement a tenté de la rétablir. L’examen à l’Assemblée nationale de ce projet, le 8 juillet dernier, a été l’occasion d’une crise ouverte entre le gouvernement et sa majorité : Éric Woerth, ministre du Travail, a été mis en minorité sur cet amendement, qui était soutenu par les députés PS-PCF présents lors de cette séance de nuit ! Mais le clash gouvernement/majorité UMP, largement couvert par les médias, dissimule les véritables enjeux de cette loi considérée par certains à gauche comme une mesure de bon sens. Il est indéniable que l’absence de structures de représentation des salariés des TPE pose de nombreux problèmes : méconnaissance de leurs droits, suivi de l’application des conventions collectives ou encore des mesures relatives à la formation, à la santé ou à la sécurité au travail… Une fois ce constat dressé, élaborer un projet commun avec le gouvernement comme l’ont fait les directions syndicales, c’est faire un choix politique lourd de conséquences. Car la mécanique lancée par la loi de 2008 est inéluctable ! En donnant satisfaction aux bureaucraties syndicales sur des points secondaires, le patronat et le gouvernement se sont donné un objectif clair : détruire tous les acquis des luttes du mouvement ouvrier au profit d’une gestion administrative de la conflictualité sociale, si possible avec des professionnels syndicaux les plus éloignés possible des préoccupations quotidiennes des travailleurs. Et la prochaine cible est déjà désignée : ce sont les prud’hommes ! Surtout, l’ensemble des attaques développées contre le monde du travail, depuis trois ans, impose un défi aux militants lutte de classe, politiques et syndicaux : il devient urgent de débattre en profondeur afin d’élaborer un véritable programme politique de représentation du monde du travail. Dans le contexte actuel par exemple, quel projet construire permettant l’intégration des salariés des TPE dans la perspective de la défense de nos acquis et la conquête de nouveaux droits ? Comment construire des luttes communes entre ces salariés et ceux des donneurs d’ordre qui décident et organisent la production, grâce à l’éclatement des collectifs de salariés, comme cela peut être le cas dans le bâtiment ? Voilà un débat essentiel à mener auprès des militants se réclamant de la transformation sociale. Henri Clément