Du New York Times à la LDH en passant par Amnesty International et le Syndicat de la Magistrature, on s'inquiète pour les libertés individuelles et collectives en France. En cause, le projet de Loi sur le Renseignement qui sera débattu à l'Assemblée à partir du lundi 13 avril.
C'est-à-dire ? Dans le contexte des mesures anti-terroristes confortées par les manifestations « Charlie », l'exécutif (sollicité par la Défense, l'Intérieur, l'Economie et les Finances) pourrait, en court-circuitant l'autorité judiciaire, demander aux services de renseignement d’obliger les FAI (fournisseurs d'accès à internet) à installer des « boites noires » (des mécanismes de détection automatique). Le but : repérer des « successions suspectes de données de connexion ». Le contenu des communications ne serait pas examiné... seules les « métadonnées » seraient concernées (source du message, destinataire, adresse IP d'un ordinateur, sites visités..). L'idée est que les djihadistes auraient des habitudes caractéristiques et donc repérables. Mais la surveillance des seules métadonnées devrait aussi permettre, selon le projet de loi, de définir de nouveaux profils de terroristes potentiels.
Et là commence le « problème » ! Car comment ces nouveaux profils pourraient-ils être repérés par des « boites noires » programmées pour les seuls anciens profils ? Et sans « lire » le contenu des mails ? Comment ne pas recourir à ce que la CNIL appelle, avec inquiétude, « des mesures de surveillance beaucoup plus larges et intrusives » ?
Par exemple, la « sonorisation » (pose de micro sur un véhicule, à un domicile), le piratage d'ordinateur ou de portable, la prise de photo à son insu, ou encore l'installation de « IMSI catchers », antennes relais mobiles captant toutes les communications d'un suspect.
Quel est le motif de cette surveillance de masse, accrue ? C'est « la prévention des violences collectives de nature à porter gravement atteinte à la paix publique ». La CGT Police (!) s'inquiète à son tour : « Qui va décider de ce qu'on doit considérer comme violences collectives ? ». Comment ne pas inclure dans ces possibles violences collectives, les mouvements sociaux, les mobilisations, les manifestations ? demande le Syndicat de la Magistrature. Le journal L’Humanité note une autre dérive possible : la surveillance particulière des quartiers populaires, « des initiatives politiques qui y naissent, au nom de la prévention des émeutes de banlieue »… Par ailleurs, « On voit se nicher, dans le projet, des mesures de surveillance de personnes qui remettraient en cause les intérêts du patronat ».. Que de dérives possibles concernant les syndicats ou les partis !
Qu'en serait-il de la sécurité des données « sensibles » des avocats ou des journalistes, des organisations de défense des droits ?
Pourquoi ces données seraient-elles désormais conservées 5 ans selon le projet ?
Ces activités de renseignement seraient-elles encadrées ? Est créée une commission de contrôle (CNCTR) qui n'aurait finalement qu'un avis consultatif…
Afin de protester contre cette surveillance de masse, un rassemblement est organisé lundi 13 avril Place Edouard Herriot à 12h30 à l’appel de la LDH, Quadrature du net, le Syndicat des avocats de France, le SM, Amnesty International, Attac, la Fondation Copernic, Solidaires, l’Observatoire des libertés et du numérique…
Jacques B.