Sentiments d’incompréhension, d’écœurement, de rage et de colère se partageaient lundi 6 février au rassemblement organisé par plusieurs centaines d’ habitantEs du quartier « la Rose des vents ».
Interpellé jeudi soir après avoir tenté de s’interposer et de « calmer le jeu » lors d’une altercation entre jeunes du quartier et quatre policiers de la BST (brigade spécialisée de terrain), Théophile, 22 ans, respecté de tous à la cité des 4000, sans passif connu avec les « forces de l’ordre », va voir sa vie basculer en quelques minutes.
« J’ai cru que j’allais mourir » se souvient-il dans une interview réalisée de son lit d’hôpital par son avocat. Copieusement tabassé, il a ensuite été traîné par ses tortionnaires dans l’angle mort d’un bâtiment, à l’abri des caméras de surveillance, où des sévices très graves vont lui être infligés. Pantalon baissé, il est alors sodomisé avec la matraque de l’un de ses agresseurs, des tâches de sang couvrant les murs. Les tortionnaires continueront à le violenter et à proférer des insultes racistes dans la voiture qui le conduira au commissariat... Cela jusqu’à l’arrivée du SAMU qui va l’emmener directement au bloc chirurgical pour y être opéré en urgence.
Une indignation (presque) générale...
Cet acte de barbarie, ce viol, commis par des fonctionnaires « dépositaires de l’autorité publique » suscite une énorme indignation. Le maire LR d’Aulnay, ex-syndicaliste policier, note que Théo a été « blessé et humilié » et s’oppose à la requalification pour trois des quatre flics, dans un premier temps tous inculpés pour viol (un crime passible des assises), en simple « violence volontaire par une personne dépositaire de l’autorité publique, avec arme et en réunion ».
Comme on pouvait s’y attendre, le syndicat d'extrême droite Alliance Police (majoritaire dans la profession...) n’a pas hésité une seconde à apporter son soutien inconditionnel à ces singuliers collègues. Son secrétaire général adjoint, Frédéric Lagache (Lagachette ?) dénonce le « déferlement médiatique dont ils sont victimes », s’indignant « que l’on fasse le procès avant les procès »... et bien sûr ne reconnaît pas le viol. Ce déni permanent des violences policières, l’offensive pour légaliser « la présomption de légitime défense » défendue dans les manifestations sauvages de ces derniers mois approfondissent chaque jour davantage le fossé entre le mouvement social, les jeunes, et la police.
L’urgence d’une riposte collective face aux violences policières
Comme on l’a vu à de nombreuses reprises depuis le printemps dernier, la solidarité s’organise autour de celles et ceux qui sont victimes des violences policières. De nombreux collectifs de quartier tentent avec raison de dénoncer la situation intolérable à laquelle ils sont confrontés, et apportent leur solidarité aux victimes et à leurs familles. L’assassinat d’Adama Traoré en est la plus récente illustration.
Mais face à l’appareil répressif de l’État que sont la police et la justice, nous avons besoin d’une réponse collective qui soit autrement plus efficace. C’est ce qu’ont compris les familles regroupées dans le collectif Urgence notre police assassine, collectif qui participera dimanche 19 mars à la Marche pour la justice et la dignité. Le crime commis contre Théo ne doit pas rester impuni, toute la vérité doit être faite autour de l’assassinat d’Adama Traoré, et son frère Bagui doit être immédiatement libéré. C’est l'engagement que nous devons prendre collectivement dans toutes les réunions de préparation de la marche.
Pas de justice, pas de paix !
Alain Pojolat