Le 13 avril à Vaulx-en-Velin pour la loi « égalité et citoyenneté », et le lendemain au Val-Fourré pour le plan « pauvreté », Valls semble parti en mission électorale dans les quartiers populaires… qui l’ont assez mal pris !
«Depuis 2012, le taux de pauvreté qui avait fortement augmenté entre 2008 et 2011 s’est stabilisé autour de 14 %. Aujourd’hui, les choses s’inversent .» Donc, selon Valls, la pauvreté diminue ? On ne dirait pas mieux que Nouria citée par RFI : la situation a empiré depuis 2012... « Le problème, c’est l’emploi. Il faut que les gens travaillent. François Hollande ou le gouvernement précédent, c’est la même chose.»
Mesurettes et déclarations d’intention
On ne pouvait pas attendre beaucoup d’une loi pour « l’égalité et la citoyenneté » née des propos racistes et discriminants de Valls après les attentats de janvier 2015, liant un « apartheid territorial, social et ethnique » au terrorisme qui aurait donc ses racines dans les quartiers populaires, sommant les musulmans de « se désolidariser » des terroristes... Et on n’est pas déçus !
Aucune des mesures simples, efficaces, indispensables à cette égalité citoyenne – par exemple le droit de vote de tous les résidents étrangers ou l’interdiction des contrôles au faciès – n’est à l’ordre du jour. À la place, on a un fourre-tout de mesurettes et de déclarations d’intention, ou comme le dit Valls lui-même avec ses mots « un maillage très dense de mesures ciblées qui visent à retisser l’égalité »... Durcissement des sanctions des actes racistes (la police n’est pas concernée), élargissement de la réserve citoyenne (Valls rêve d’une garde nationale), possibilité pour les Conseils citoyens de saisir les préfets en cas de difficulté dans la mise en œuvre sur les quartiers de la politique de la ville, parrainage des jeunes diplômés issus des quartiers, 10 000 contrats d’apprentissage ouverts dans la fonction publique, etc. et plein d’autres propositions qui dans leur ensemble ne changent pas la donne mais ressemblent fort à de la communication pré-électorale.
Répartir la pauvreté ou la combattre ?
La loi comprend un versant concernant la politique du logement qui propose de modifier quelques règles d’attribution des logements sociaux, dont la principale est la possibilité pour les bailleurs de fixer le montant des loyers indépendamment de leur mode de financement. Histoire de faire croire qu’ainsi les bailleurs pourront jouer de la « mixité sociale » en attirant ou en repoussant des catégories d’habitants désirées.
Quand il y a 1,7 million de personnes inscrites sur les listes d’attente pour un logement social et plus de 3,8 millions de mal-logés, alors que dans le même temps à peine 100 000 nouveaux logements ont été engagés en 2015, bien loin des objectifs que le gouvernement s’était lui-même fixés, on voit bien que cette loi n’est pas là pour réduire les inégalités, la pénurie de logements, les discriminations. Elle vient donner au mieux un coup de pouce à la politique de peuplement chère à Valls, et mise en œuvre par le Nouveau Programme de renouvellement urbain (NPRU) : « casser les logiques de ségrégation », c’est-à-dire éclater les concentrations urbaines populaires, tenter de répartir la pauvreté plutôt que de la combattre...
Cette loi ne changera rien à l’accroissement des écarts entre les plus pauvres, de plus en plus nombreux, et les plus riches, de plus en plus riches, écarts encore aggravés par les lois Macron et peut-être El Khomri. Elle est à l’opposé de ce que serait un plan d’urgence pour le logement : construire là où il y en a besoin et pour ceux qui ont besoin de logements de qualité mais à bas loyer, développer les services publics au lieu de les détruire. Bref une tout autre politique qu’il reste à imposer par la mobilisation.
JMB et Isabelle Guichard