Publié le Samedi 1 février 2014 à 12h28.

Visa : lutter contre l’extrême droite dans le monde du travail

La montée du Front national et des idées réactionnaires percutent le mouvement ouvrier et ses organisations. À l’occasion du lancement d’une campagne unitaire intersyndicale (cf. ci-dessous), nous ouvrons nos colonnes à Visa (Vigilance et initiatives syndicales antifascistes) (1), association de syndicalistes en lutte contre l’extrême droite.Ce mercredi 29 janvier 2014, a été lancée la « campagne unitaire contre l’extrême droite, ses idées, ses pratiques » à laquelle participent plusieurs organisations syndicales. Des syndicalistes de la CGT, de la FSU et de l’Union syndicale Solidaires ont participé d’abord à une journée d’ateliers et de débats à la Bourse du travail de Paris, puis à un meeting unitaire. Ce dernier a eu lieu le soir à Montreuil, au siège de la confédération CGT, avec prise de parole de Thierry Lepaon (CGT), Bernadette Groison (FSU) et Annick Coupé (Solidaires).Les syndicats confrontés à l’extrême droiteCet événement unitaire est d’une importance capitale dans la mesure où il s’agit de lancer la contre­-offensive syndicale, progressiste et solidaire contre l’avancée de l’extrême droite et de ses idées. Cette dernière cherche à faire avancer son influence idéologique au sein des classes populaires, au sein du salariat et des quartiers populaires, et d’y recruter des électeurs­-électrices. Sur fond de déception et d’amertume vis-à-vis d’un gouvernement « de gauche », alors que la droite et l’extrême droite ont massivement occupé les rues tout au long de l’année 2013 (notamment à travers leur combat contre le « mariage pour TouTEs »), l’extrême droite tente de capitaliser électoralement. Sa « prise de la rue » n’est d’ailleurs pas terminée, comme l’aura montré la mobilisation de divers courants d’extrême droite pour le « jour de colère » dimanche dernier à Paris.Plus grave, l’extrême droite arrive parfois à attirer des militantEs jusqu’à l’intérieur des organisations syndicales, et à les gagner à ses « idées ». L’affaire Fabien Engelmann aura servi de signal d’alerte : ce jeune militant syndicaliste, passé à l’extrême gauche (LO et NPA) pendant six ans avant d’être attiré vers l’extrême droite à travers la mouvance « Riposte laïque », a été candidat aux élections cantonales de mars 2011 pour le Front national. Son syndicat local de la CGT en Lorraine s’était d’abord solidarisé avec lui, avant d’être dissout par la confédération en vue d’exclure Engelmann. D’autres organisations syndicales ont été confrontées à des problèmes similaires, de FO (dont la déléguée régionale pour les personnels civils de l’armée dans le Nord-Pas-de-Calais a été candidate du FN) jusqu’à Solidaires, confrontée à un militant FN chez les territoriaux dans le département de Haute-Garonne.Une réaction unitaireDans le mouvement syndical, l’association intersyndicale et unitaire Visa s’est consacrée depuis des années à la lutte politique et idéologique contre les tentatives d’influence de l’extrême droite. « Vigilances et initiatives syndicales antifascistes », Visa est une association issue de l’ancienne « commission syndicale » de la structure Ras l’front (RLF, le sigle était aussi utilisé pour « Réseau de lutte antifasciste »). Ras l’front était né de l’« Appel des 250 » lancé en 1990 en réaction à la montée du Front national et à la profanation antisémite du cimetière juif de Carpentras en mai de la même année. Sa commission syndicale s’est structurée en 1996 et s’est donnée une publication d’abord diffusée sur papier et sous le nom d’Isa (« Informations syndicales antifascistes »). Puis Isa est devenu Visa, la publication sur papier est devenue une publication sur Internet, et la commission éditant un bulletin est devenue une association structurée.La spécificité de Visa est de s’intéresser au discours prétendument « social » de l’extrême droite, qu’il s’agisse du FN ou d’autres mouvances d’extrême droite telles que les groupes identitaires ou encore les catholiques intégristes, afin de l’analyser et de le déconstruire. Il s’agit de prémunir le mouvement social contre les tentatives de l’extrême droite de détourner les questions sociales. C’est à quoi s’emploie l’extrême droite, en occupant le terrain avec un discours tactiquement adapté… mais dont les fondamentaux sont toujours diamétralement opposés aux valeurs fondatrices du mouvement ouvrier et syndical : solidarité, égalité et internationalisme.Des réponses à la propagande réactionnairePour contrer ces tentatives de l’extrême droite, il faut étudier son discours, ses initiatives, ses propositions, ses modes d’action. Et parfois aussi ses tentatives d’infiltrer des organisations syndicales (ou autres) et/ou d’en retourner des membres ou des structures. L’affaire Fabien Engelmann, déjà mentionnée, n’est qu’un exemple qui souligne l’extrême nécessité d’une vigilance accrue. La crise, avec son cortège de destructions d’emplois et de peurs engendrées, a encore renforcé cette nécessité.En 2003, Visa a publié un premier livre sous le titre le Front national au travail, regroupant une série de contributions à travers lesquelles les lecteurs et lectrices peuvent observer le principal parti d’extrême droite, tenter d’occuper le terrain « social ». Depuis, Visa a continué ce travail à travers deux brochures largement diffusées : le FN, pire ennemi des salarié-e-s  (2010) etContre le programme du FN, un argumentaire syndical (2012). Ce mois de janvier vient de sortir sa dernière brochure : Pas de pouvoir au FN ! Barrage syndical antifasciste, dans un contexte où se préparent les élections municipales puis européennes des mois de mars et de mai 2014 (2). Pour lutter collectivementDès le début, Visa (et la « commission syndicale » de Ras l’front auparavant) a regroupé des syndicalistes appartenant à différentes structures et confédérations syndicales. Aujourd’hui, l’association regroupe des militants et militants FSU, CGT, Solidaires, CFDT, FO, qui sont des adhérentEs de sections d’entreprises, éluEs de syndicats nationaux ou encore représentantEs de fédérations professionnelles.Visa a pour ambition d’être un outil d’information et de réflexion pour toutes les forces syndicales qui le souhaitent, afin de lutter collectivement et le plus efficacement possible contre l’implantation et l’audience de l’extrême droite dans le monde du travail.Le combat antifasciste se mène à tous les niveaux, du syndicat de base à la confédération, dans l’unité la plus large. Il se mène par la participation aux mouvements sociaux, mais aussi par les discussions quotidiennes des militants syndicaux avec leurs collègues dans les entreprises.Visa se veut outil et partie prenante de la bataille syndicale contre l’extrême droite et elle entend y contribuer :• en livrant un maximum d’information sur les dangers et le développement de l’extrême droite en France, en Europe et dans le monde, mais aussi sur les « passerelles » jetées vers d’autres mouvances politiques, notamment dans une fraction la droite ;• par des analyses servant à démystifier les pseudo-propositions sociales de l’extrême droite ;• en relayant sur le site de l’association toutes les prises de position, actions des organisations syndicales contre l’extrême droite ; • en dénonçant toutes les discriminations racistes, sexistes, homophobes au sein et hors des entreprises ;• en se faisant l’écho de toutes les actions de solidarité avec les salariéEs de toutes les origines, dont les travailleurs et travailleuses sans papiers ;• en aidant, par des outils adaptés (journées de formation, interventions dans des séminaires, brochures, affiches etc.), les équipes syndicales à se former et se mobiliser pour démystifier à leur tour les soi-disant propositions sociales de l’extrême droite, dans les discussions avec l’ensemble des salariés.1 – visa-isa.org2 – Cette brochure volumineuse et riche en contenu (100 pages) est vendue à deux euros auprès des militantEs ou à la Librairie La Brèche.