Publié le Mercredi 22 septembre 2021 à 08h00.

Contre l’extrême droite et ses idées, il y a urgence !

#EtHopDuBonBoulot : le recollage des affiches d’Éric Zemmour par Philippe Poutou n’est pas un « buzz » éphémère. On est là, tant qu’il le faudra, face à Marine Le Pen ou Zemmour, candidat ou pas. Tous participent de la même extrême-droitisation des débats, une dérive qui se traduit jusque dans la rue, ou encore avec l’affaire des « fiches » du site d’extrême droite FDesouche.

À Fréjus, lors de la réunion du Conseil national du RN, Marine Le Pen a, sans surprise, passé le relais à Jordan Bardella pour se consacrer à la présidentielle. Bien que sa présence au second tour (voire pire) soit probable, son équipe devra quand même affronter quelques difficultés. La première est financière, avec un parti passé près de la cessation de paiement. Pourra-t-elle compter sur ses sbires, dont les derniers montages lui ont coûté cher en frais de justice ? Autre difficulté persistante, les dissensions internes : le refus de la « clique d’Hénin-Beaumont », ainsi qu’est surnommée, notamment par les proches de Marion Maréchal, la garde rapprochée de Marine Le Pen (Bruno Bilde, Steeve Briois, David Rachline…), continue à faire claquer la porte. Mais le grand règlement de comptes attendra avril 2022. Dernière épine, la candidature attendue d’Éric Zemmour, avec un Robert Ménard en entremetteur des droites qui ne convainc personne.

La supercherie Le Pen

Là où Zemmour multiplie les déplorations, Marine Le Pen joue la perspective positive : « Libertés, libertés chéries », annonce son slogan de campagne. Dans son discours de Fréjus, elle a officialisé sa candidature par un enchaînement fastidieux d’exemples. Qui pourrait être contre les libertés ? Retenons la « liberté syndicale », vieille lubie de l’extrême droite visant à monter des syndicats maison. Ou la « liberté d’entreprise », rengaine patronale sur les « contraintes » et les « normes absurdes ». Marine Le Pen réaffirme n’être « ni de droite ni de gauche ». Elle lance deux mesures « pour le pouvoir d’achat des Français » : nationalisation des autoroutes et privatisation de l’audiovisuel public. Quand le RN avance son programme social, il ne parvient qu’à faire des clins d’œil à Bolloré, magnat de la logistique et des médias... Le maintien de la retraite à 60 ans, noyée dans ce fatras, ne suffit pas à faire un programme qui réponde aux intérêts du monde du travail. Il faut ­continuer de dénoncer la supercherie !

« C’est Zemmour qui parle comme nous »

Dès son premier discours de campagne, Marine Le Pen puise dans son fonds de commerce : insécurité-immigration-islam... sans crainte de l’outrance, qui fait des quartiers populaires des « zones talibanisées ». En matière de politique familiale, Marine Le Pen est « inspirée par le modèle hongrois » (le Figaro, 9 septembre), pas franchement un exemple de féminisme. Ajoutons « la liberté d’enseignement y compris à domicile », petit signe aux cathos les plus conservateurs. Stéphane Ravier conclura : « Je reste un opposant au mariage homosexuel, un partisan de la peine de mort et reste sur cette ligne de nécessité d’organiser l’inversion des flux migratoires. »

Quelques jours après le meeting de Fréjus, Nicolas Bay publiait un communiqué pour se plaindre des trop faibles « décisions d’expulsion de migrants extra-européens » en listant des mesures que d’autres nommeraient « remigration ». Les dirigeants du RN se servent des sorties outrancières de Zemmour, sexistes et islamophobes, pour lisser leur image... tout en tenant le même discours. Stéphane Ravier ne vient-il pas de l’affirmer : « C’est lui qui parle comme nous ».

Derrière le « phénomène » Zemmour

L’équipe et les soutiens actuels de Zemmour pourraient tenir dans une petite salle : des Républicains qui n’ont jamais osé le rapprochement avec le FN ; un notable du sud, issu du FN et son staff « d’ex »-Identitaires ; un souverainiste qui enchaîne les partis ; un ancien de l’UNI, directeur de cabinet de maire LR ; un jeune start-upper et des banquiers, un premier de la classe sorti de l’Institut catholique de Vendée et un vieil homme d’affaires richissime. Quelques anciens du FN moins propres sur eux tentent même d’entrer par la fenêtre. Cela suffira-t-il pour récolter les parrainages de maires ? Un tel blocage permettrait au moins à Zemmour de se plaindre sur tous les plateaux de télé et doper les ventes de son bouquin. Dans tous les cas, le discours de Zemmour polarisera le débat.

La campagne de Marine Le Pen est faite d’allers-retours, déjà dans une stratégie de second tour : prendre ses distances, en affirmant sa crainte que les propos « souvent très radicaux » de Zemmour « puissent être assimilés aux [siens] » (le 11 juin sur Linfo.re) puis reconnaître, par la voix de Laurent Jacobelli sur CNews, que « Éric Zemmour avait fait en journalisme et en littérature, ce que le RN avait fait en politique : mettre au cœur du débat des problèmes de société que personne d’autre n’osait dévoiler ». Entre propositions radicales pour facho décomplexé et posture de « présidente de la paix civile », dont le discours social se construit sur le racisme et la destruction des solidarités de classe, cette présidentielle risque de nous filer la nausée.

La dynamique donnée par Zemmour et Le Pen, favorisée par le contexte global raciste-autoritaire, participe d’une même offensive dont la déclinaison violente se voit à l’œuvre jusque dans des cortèges anti-pass sanitaires (mots d’ordre antisémites, attaques menées par des groupuscules d’extrême droite...). C’est cette dynamique qu’il faut analyser, à travers ses contradictions mais aussi dans ses ressorts communs. C’est contre elle qu’il faut construire la riposte, #EtHopEncoreDuBoulot.