Publié le Mercredi 16 décembre 2009 à 10h41.

Élections régionales : orientation et débat

Quelle orientation et quelles propositions politiques pour le NPA lors des élections régionales ? Quels regroupements ou alliances possibles à cette occasion, tant au niveau national qu’au niveau régional ?
C’est pour répondre à ces questions que les militants et les militantes du NPA ont été démocratiquement consultés début décembre. L’enjeu de cette consultation était, notamment, d’apprécier les résultats des nombreuses rencontres unitaires initiées par le NPA pour explorer les possibilités de listes unitaires aux régionales.
Les militants et les militantes du NPA se sont prononcés sur les trois approches proposées, sans que se dégage de majorité absolue en faveur d’une des options.

Il revenait donc au Conseil politique national de tirer les enseignements de la consultation et de fixer une orientation respectant point par point ce qu’avaient exprimé les militants. C’est ce qui a été fait avec l’adoption – par plus de 70% des membres du CPN – d’une série de mandats qui fixent l’orientation du NPA pour le scrutin de mars prochain.

Tout est à nous! publie ce document, ainsi que trois tribunes permettant à chacune des plateformes en présence de donner son point de vue.

François Coustal

Motion et résolutions adoptées par le CPN (13 décembre 2009)

Motion :Le mandat donné au CE pour les élections régionales est constitué de l'ensemble des votes au CPN du 13 décembre.Votes majoritaires au CPN : 1/ En dépit des délais imposés par le calendrier électoral et le rythme des rencontres unitaires, la consultation que nous venons d'organiser, préparée par un long débat démocratique, est un exercice inédit et réussi qui a mobilisé un grand nombre de militant-e-s. Le CPN observe que le débat a été globalement de bonne qualité, même si des imperfections ont pu être notées qui soulignent la nécessité de progresser dans la structuration départementale et régionale dans un certain nombre d'endroits. Cela témoigne de la vitalité démocratique du NPA, un acquis à faire progresser encore. 2/ Le CPN constate qu’aucune majorité ne s’est dégagée de la consultation des militant-e-s du NPA.Les votes indiquent toutefois cinq grands axes largement partagés : * la légitimité d'une démarche unitaire, par delà les appréciations que nous pouvons porter les uns et les autres sur la façon dont nous l'avons conduite ; * la rupture avec le Front de gauche au plan national résulte des conditions politiques imposées par celui-ci, dans lequel le PCF a joué un rôle décisif, visant à nous contraindre à gérer les régions avec le PS ; * la poursuite des discussions unitaires relève dorénavant de la compétence des structures du NPA dans chaque région, dans le cadre des dispositions prévues par nos textes fondateurs (statuts, principes) ; * la volonté de participer à la défaite des listes soutenues par Sarkozy en adaptant dans chaque région, en fonction du contexte et des résultats obtenus au premier tour, la forme précise de l'attitude au second tour, fusion « démocratique », appel à battre la droite, abstention, maintien de la liste ; * la volonté d'obtenir des élus, indépendants qui conservent leur liberté de vote dans l'institution, pour mettre en œuvre un programme anticapitaliste qui répond aux aspirations populaires, donc sans accepter de participer à des majorités de gestion et des exécutifs (gouvernements des régions) dominés par le PS et/ou Europe écologie 3/ Le NPA mènera une campagne nationale, qu'il participe à des listes du NPA ouvertes à des partenaires locaux ou à des listes unitaires plus larges.Les régionales sont un rendez vous politique national important. Dans le cadre de la campagne, nous défendrons des mesures d'urgence répondant aux aspirations de celles et ceux qui ne veulent pas payer la crise capitaliste et qui veulent éviter la catastrophe écologique, conséquence du réchauffement climatique : interdiction des licenciements ; augmentation des salaires, des pensions de retraite, des minima sociaux de 300 euros nets ; pas un revenu inférieur à 1500 euros nets ; allocation d'autonomie pour les jeunes ; réduction du temps de travail, sans perte de salaire, sans flexibilité ni annualisation, avec embauches correspondantes ; création de centaines de milliers d'emplois publics, dans l'éducation, la santé, l'énergie, la petite enfance, le quatrième âge ; arrêt des privatisations et développement des services publics ; monopole de la banque et du crédit dans le cadre d'un grand service public bancaire ; monopole de l'énergie dans le cadre d'un grand service public qui donne la priorité aux énergies renouvelables et tourne la page du nucléaire ; transports en commun publics gratuits ; pour une agriculture vivrière et de proximité ; contre les discriminations et le racisme, pour la régularisation de tous les sans papiers, pour l'égalité entre les hommes et les femmes, pour l'égalité des droits et dans les faits entre les hétéros et les personnes LGBTI ; solidarité internationale avec les peuples en lutte contre l'impérialisme ; retrait des troupes d'Afghanistan et d'Afrique ; solidarité avec le peuple palestinien notamment par le refus des accords des conseils régionaux avec l'État d'Israël. Mais il s'agit aussi d'une élection locale et nous répondrons également sur ce terrain. Nous mènerons campagne pour tourner la page des politiques de renoncement qui, dans les conseils régionaux, dilapident l’argent public pour les intérêts privés ce qui suppose de ne pas se laisser enfermer dans le carcan budgétaire et institutionnel qui risque de se durcir encore avec la réforme territoriale annoncée. Il s’agit de mobiliser les fonds publics dans le strict intérêt des classes populaires et dans le cadre d’un plan conséquent de lutte contre le réchauffement climatique. Cela passe par exemple par l’arrêt de toute subvention, au patronat, aux lycées privés, à la formation professionnelle contrôlée par le Medef ; par la récupération des fonds publics versés aux entreprises qui ont licencié ; par la mobilisation des fonds publics pour l’emploi public territorial statutaire ; pour le développement du service public de formation professionnelle, les lycées publics ; par le développement des services publics de transports gratuits. Une politique qui s'établit dans la transparence, s'appuie sur les mobilisations sociales et sur la mise en place de procédures démocratiques permettant d'associer la population aux principales décisions. Pour imposer ces mesures, il faut un rapport de force et œuvrer à la convergence des luttes. C’est pourquoi - en lien avec notre campagne - nous continuerons à expliquer que seul un mouvement d’ensemble est susceptible de les imposer. C’est ce mouvement d’ensemble que nous continuerons à populariser au travers de notre intervention, y compris pour ces élections. 4/ Le CE est mandaté pour éditer dans les meilleurs délais : * une brochure « régionales » présentant nos principales analyses et propositions, * un modèle de profession de foi adaptable dans les régions. 5/ Les coordinations régionales sont invitées à établir le plus rapidement possible les listes et à établir le plan de campagne. Le CE veillera, dans le dialogue avec les régions, à ce que les têtes de liste régionales soient le reflet de la diversité militante du NPA et de notre exigence du respect de la parité. 6/ Quel que soit le vote de chaque militant-e, nous devons maintenant nous rassembler autour de ces constats pour faire face aux responsabilités de notre parti dans les semaines à venir, dans un contexte de crise sociale et écologique majeure. Nous aurons à contribuer aux mobilisations au travers de cadres unitaires dans lesquels nous avons un rôle important à tenir, mener une campagne électorale ouverte et continuer à nous implanter dans la jeunesse, les quartiers populaires, les lieux de travail. Nous devrons favoriser les débats politiques et démocratiques à tous les niveaux de l'organisation tout en poursuivant la construction du parti (développement des comités, remontée des cartes, souscription) afin de rassembler toutes celles et tous ceux qui veulent en finir avec le capitalisme.

Tribunes des 3 motions défendues devant les militants

Position A

Cette consultation sur un sujet déterminé était une première pour le NPA. Au-delà des imperfections et des améliorations possibles à apporter pour une prochaine fois, c'est une réussite. Elle a permis un débat démocratique en profondeur dans notre parti. La participation est plutôt satisfaisante. Aucune des trois positions soumise au vote dans le cadre de la consultation nationale sur les régionales n'a obtenu de majorité absolue. Preuve que le «jeu» n'est pas verrouillé dans le NPA et si la position A arrive en tête, elle a obtenu un score décevant.

Compte tenu de la situation, le CPN a eu la responsabilité de mettre en lumière les éléments qui apparaissaient majoritaires de façon transversale à chacune des positions. Cela a permis de sortir du CPN avec des motions qui ont recueilli autour de 70 % des votes.

S'il n'existe plus de possibilités au plan national d'un accord unitaire large, c'est d'abord à cause de la direction du PCF et de son allié le PG. Ces deux partis voulaient à toute force nous obliger à épouser une orientation qui se situe dans le prolongement des politiques d'union de la gauche sous la direction du PS dans les conseils régionaux sortants, alors que nous souhaitons la rupture, sur le terrain social comme sur le terrain de l'écologie.

En revanche, les discussions unitaires se poursuivent – et c'est positif – dans une série de régions pouvant au moins aboutir à des accords unitaires partiels dans une série d'entre elles. Pour ce qui est du second tour, la volonté d'empêcher Sarkozy de reprendre des régions est massive. Dans chaque région, les listes que nous soutiendrons décideront de l'attitude à adopter en fonction des coordonnées politiques locales spécifiques et des rapports de forces issus du premier tour.

Enfin, nous nous battrons pour envoyer dans les conseils régionaux des élus anticapitalistes qui conservent leur indépendance. Ils seront un point d'appui pour les luttes et proposeront inlassablement des mesures qui visent à mobiliser les fonds publics dans le strict objectif de satisfaire les besoins sociaux et de défendre l'environnement et ils s'opposeront à tout ce qui ne va pas dans le bon sens. Cette liberté de vote suppose de ne pas se trouver enfermé dans la solidarité de gestion avec un PS qui vire de plus en plus à droite.

Nous savons que le contexte est difficile mais que ce soit dans le soutien à des listes unitaires ou dans le cadre de listes NPA, il faut maintenant que l'ensemble des militantes et des militants se rassemblent. Nous mènerons une campagne nationale faisant écho aux luttes sociales et écologiques, exprimant les exigences populaires en terme de mesures d'urgence et en les déclinant également en mesures régionales.

Le NPA va relever le défi et faire entendre haut et fort sa spécificité : pour dénouer une situation à bien des égards désastreuse sur le plan social et inquiétante sur le plan écologique, il faut la rupture, il faut révolutionner la société.

Position B

Lors de la consultation nationale des militants sur la politique du NPA sur les régionales, un large débat démocratique a animé le parti. Aucune des positions n’a emporté de majorité. Celle que nous défendons, intitulée «Dans les luttes comme dans les élections: une politique de rupture avec le capitalisme», a recueilli 29,4% et est arrivée en tête dans 7 régions (Bourgogne, Franche-Comté, Île-de-France, Lorraine, Nord-Pas-de- Calais, Haute-Normandie).

Les militants qui ont soutenu cette position défendaient, partiellement ou complètement, les axes suivants : une campagne des régionales qui soit en continuation de notre orientation prioritaire vers les luttes, la nécessité d’un cadre national basé sur des revendications anticapitalistes d’urgence dans les discussions avec des partenaires régionaux après l’échec de la politique d’alliance avec le Front de gauche, le refus des fusions «techniques» avec le PS et ses alliés au second tour et, enfin, l’absence de consigne de vote avant le soir du premier tour.

Nous avons donc proposé au dernier Conseil politique national un moyen de sortir notre parti de l’impasse et du risque d’éclatement dans lequel il se trouve. Nous avons donc porté un amendement qui consistait simplement à ajouter à la formule de la majorité («la poursuite des discussions relève dorénavant de la compétence des structures du NPA dans chaque région dans le respect des dispositions prévues dans les textes fondateurs»), le bout de phrase suivant: «en prenant comme base le programme défini au niveau national».

Le geste que nous faisions était un geste important: nous étions prêts à voter le texte proposé par la majorité du CE si on prenait en compte cet amendement. qui était d’autant plus ouvert qu’il faisait du programme défendu par le NPA dans ces élections une «base». Notre amendement étant refusé, nous nous sommes abstenus sur le texte dans son ensemble.

Cela ouvre donc la possibilité d’avoir des campagnes différenciées en fonction des régions. Le NPA s’était pourtant battu pour un accord national avec les autres forces à la gauche du PS. D’une région à l’autre, voire d’un département à l’autre, des tactiques électorales et des plateformes revendicatives risquent d’être contradictoires. Avec la crise du capitalisme, la crise sociale et écologique qui frappent très durement des millions de personnes, le NPA doit porter la clarté et la fermeté face au système et à Sarkozy.

Malgré les difficultés, des luttes existent: grève des travailleurs sans papiers, conflits dans les transports, début de mouvement chez les lycéens... le NPA doit se faire l’écho et le porte-parole de ces luttes et avancer la nécessité de construire un mouvement d’ensemble pour stopper les attaques de Sarkozy et des capitalistes. En ce sens, la proposition faîte par Olivier Besancenot d’une manifestation unitaire pour la défense des services publics fin janvier est une bonne chose.

Rassembler le NPA, cela veut dire mettre la question des luttes au centre de nos préoccupations dans la période qui vient. La campagne pour les régionales doit servir à porter des mesures d’urgence anticapitalistes face à la crise et les moyens pour les imposer, c’est-à-dire la nécessité d’une lutte d’ensemble des jeunes et des travailleurs contre la politique de Sarkozy et pour le renversement du capitalisme.

Position C

La plateforme C a défendu que le NPA ne devait pas prendre acte, ni se résigner à la rupture du cadre unitaire national et, au contraire, y reprendre sa place pour tenter d’aboutir à des candidatures unitairessur la base suivante :

- élaboration d’une plateforme de revendications en rupture avec le libéralisme permettant de différencier clairement les listes unitaires de celles du Parti socialiste et d’Europe Écologie;

- sur la question des exécutifs, rechercher une position commune sans en faire, en cas d’échec, un point de rupture. Cela signifiait concrètement que le PCF ne pouvait prétendre exiger du NPA un quelconque engagement à participer à des exécutifs dominés par le Parti socialiste et/ou Europe Écologie, à quoi il faut ajouter que les élu-e-s du NPA conserveraient une totale liberté de vote, y compris sur le vote du budget. Mais cela impliquait aussi que le NPA n’exige pas du PCF et de ses autres partenaires qu’ils s’engagent à ne pas participer à des exécutifs dominés par le Parti socialiste et Europe Écologie;

- établir un protocole technique garantissant à chacune des composantes d’être représentée dans des conseils régionaux en fonction de sa réalité politique et électorale, ce qui impliquait notamment un partage des têtes de listes régionales et départementales.

Cette orientation n’ignorait pas les blocages venant des directions nationales ou régionales du Parti communiste, comme en témoigne la remise en cause d’accords déjà avancés ou à portée de main dans plusieurs régions.

Mais le départ du cadre unitaire décidé par l’exécutif du NPA rendait caduque non seulement la possibilité, même si elle était minime, d’un accord national mais rendait plus difficiles les discussions au niveau régional, sans parler du fait qu’il donnait des armes au PCF pour isoler le NPA en lui faisant porter la responsabilité de la rupture du cadre unitaire.

Nous nous félicitons que pour une majorité de militant-e-s, bien au-delà de la position C, la recherche de l’unité soit un souci constant même si nous regrettons de ne pas avoir suffisamment convaincu que le NPA devait reprendre sa place dans les discussions nationales.

Nous avons lors du CPN mis en garde contre toute tentative de synthèse artificielle des trois positions largement contradictoires.

Nous avons donc proposé que le CPN enregistre le vote des militants, l’absence de majorité et se prononce:

- pour que le NPA, dans le cadre de listes unitaires ou de listes autonomes, mène une campagne sur la base d’un programme d’urgence dans chaque région, ces mesures d’urgence devant s’articuler aux revendications plus générales que nous défendons pour mettre un coup d’arrêt à la politique de Sarkozy;

- que la poursuite des discussions unitaires relève dorénavant de la compétence des régions, proposition qui a été acceptée par une majorité du CPN.

Léonce Aguirre, Monique Migneau, Olivier Mollaz, Christian Nguyen, Flavia Verri (membres du CPN ayant soutenu la position C).