Reprenons le cours de l’analyse des propositions du ministre Bayrou contenues dans le projet de loi « pour la confiance dans notre vie démocratique » (sic)...
Le ministre évoque, de manière très lapidaire, un ensemble de mesures de contrôle et de publicité des comptes des partis, mais surtout de l’identité de leurs donateurs. Sous couvert de respect du plafond annuel des dons versés aux formations politiques et donc de lutte contre le financement illégal, en particulier via les pseudo-micro partis, cette future loi risque bien de faire aboutir une offensive amorcée avec la « loi Cahuzac ». Celle-ci demandait la transmission d’une liste exhaustive de tous les donateurs et cotisants à la CNCCFP, quels que soient le montant versé et la structure concernée. En clair, le fichage pur et simple pour touTEs, et même l’affichage public pour les plus généreux...
Dans l’air du temps
Enfin, bien que non citées par le ministre, deux mesures sont évoquées par le député PS René Dozière dans un rapport remis au ministre Bayrou. Seront-elles incluses dans la loi finale ? La conférence de presse du ministre Bayrou peut laisser penser que non. Mais on peut les considérer comme tout à fait cohérentes avec l’esprit du projet de loi mais aussi avec l’air du temps... Elle seront donc, tôt ou tard, mises en œuvre.
La première mesure consiste à préciser la définition d’un parti politique afin de réduire le nombre d’organisations pouvant être reconnues comme telles. Là encore, il s’agit officiellement de lutter contre les pseudo partis qui pratiquent la collecte décentralisée de dons pour les formations politiques plus importantes, ainsi que d’autres malversations comme le FN l’a pratiqué lors de tous les suffrages depuis 2011. Mais une fois posée l’évidence, combien de conditions faudra-t-il remplir pour être un parti ? On ne peut que s’inquiéter d’une approche dont on voit le début... mais pas la fin ! D’ailleurs, le projet du député Dozière contient déjà une condition inquiétante qu’un parti devrait remplir pour être reconnu comme tel : « soutenir des candidats aux élections locales et nationales ». On voit bien que certains tournent autour du sacro saint article 4 de la Constitution, lequel dit que les partis « se forment et exercent leur activité librement ». Une base libérale, dont aucun démocrate, bourgeois ou socialiste, ne saurait renier la nature élémentaire...
La seconde mesure, cousine de la première, peut-être même siamoise, consiste à remonter le plafond au-delà duquel l’aide publique peut être touchée par un parti dans le cadre des élections législatives. Passant de 1 % dans 50 circonscriptions à 2,5 % dans 100 circonscriptions, ce relèvement fera évidemment le ménage parmi les petits partis. Par ailleurs, là aussi, jusqu’où le plafond sera-t-il relevé ?
L’État fort en marche...
Concluons et élargissons de nouveau la focale. La dynamique actuelle de recul démocratique laisse penser que l’État fort est en marche. Le projet de loi de transposition de l’état d’urgence dans le droit commun en est son glaive. Mais toute la machinerie de contrôle des partis, moins compréhensible et visible, et ce d’autant qu’elle a une face positive, en est peut être l’un de ses boucliers, sans parler des réformes électorales...
Car il est très probable que la séquence 2022 verra s’abattre de nouvelles barrières pour toute formation qui serait trop faible et/ou trop dangereuse. Pour ne parler que de la mesure la plus brutale et visible, le silence des politiques sur ce point n’étant que l’envers du volontarisme affiché de certains éditorialistes à son sujet, prenons le pari que le nombre de parrainages à récolter pour présenter un candidat à l’élection présidentielle sera certainement relevé...
Arrêtons-nous là... Et n’oubliez pas de soutenir financièrement le NPA !
Sylvain Madison