Publié le Vendredi 1 août 2025 à 09h00.

Lutte contre l’antisémitisme : faisons le point

La montée de l’extrême-droite et le péril fasciste dans le monde font de l’antiracisme un enjeu central au cœur de l’ensemble de nos luttes. L’agression le 25 avril d’un homme visiblement Juif adossée à des représentations antisémites souligne la réalité très concrète de l’antisémitisme en France. Si nous plaidons depuis longtemps pour la convergence des luttes et l’unité du mouvement ouvrier, l’articulation de l’antiracisme à nos luttes se pose désormais comme une urgence politique, en raison d’une part de la pression sur notre droite et dans le camp adverse, et d’autre part par la nécessité d’actualiser un marxisme dont la matrice reste nettement eurocentré. Il faut donc faire le bilan de la séquence qui vient de se terminer.

La question spécifique de l’antisémitisme se pose dans cette perspective de manière singulière. En effet, si l’antisémitisme est un racisme dont l’actualité ne se dément pas, il est au cœur de dispositifs d’État qui visent à l’endiguer mais qui en produisent également en le dépolitisant et en le réduisant à une forme de haine. Ce qui distingue l’antisémitisme d’autres formes de racisme, c’est l’absence d’antisémitisme d’État. Au contraire les politiques mémorielles autour de l’antisémitisme sont prégnantes dans l’éducation nationale, ou dans les programmations documentaires des services publics — si bien que le génocide des Juifs d’Europe, malgré la participation de la France, ne fait pas l’objet d’un discours ambigu ou d’une minimisation de la culpabilité européenne — sans pour autant nourrir un discours antiraciste, mais plutôt une affirmation morale universaliste face à la violence qui devient elle-même un terrain fertile pour diverses formes de racisme.

L’antisémitisme, un racisme à part ?

Au-delà de cette reconnaissance, acquise au cours du siècle dernier, la lutte contre l’antisémitisme défendue par l’État français se traduit principalement de deux manières : d’une part, le soutien aux personnalités juives, en dépit de leurs positionnements (comme lorsque le président Macron avait témoigné de sa « solidarité » à Éric Zemmour suite à une agression verbale)et d’autre part la défense systématique de l’État d’Israël. Plus largement, la « tolérance » et l’intégration des Juives et Juifs est l’objet d’un discours politique spécifique, qui en fait une minorité modèle, « intégrée » et « attachée aux valeurs de la République », qui précisément ne revendiquerait pas une visibilité propre mais plutôt une forme d’assimilation et serait donc la preuve de la valeur de l’universalisme français. Elle est en cela notamment opposée à l’autre minorité racialisée sur une base religieuse la minorité musulmane, quand elle ne joue pas activement un rôle de médiation avec celle-ci comme suite à l’affaire Houellebecq.

Pour autant, cette lutte institutionnelle contre l’antisémitisme ne constitue pas une réponse adéquate au racisme qui vise les Juives et Juifs : d’une part, elle reste articulée à des principes libéraux individualisants — autour du « préjugé » ou de l’agitation d’une « monstruosité » rampante après le génocide des Juifs d’Europe, et d’autre part, elle valide une identification essentialiste des Juifs à l’État sioniste et entend interdire toute critique d’un État colonial et aujourd’hui génocidaire — ce qui ne peut, qu’en retour, nourrir l’antisémitisme qu’il prétend combattre.

Un 8 mars pas comme les autres

Le discours public qui prétend défendre les Juifs sur la base d’un argumentaire en soutien de l’État d’Israël percute directement l’actualité du sionisme expansionniste en Palestine occupée et les positionnements traditionnels de l’extrême-gauche. Dans cette perspective, nous sommes aisément taxé·e·s d’ « antisémites » quand il s’agit d’affirmer notre soutien aux Palestinien·nes opprimé·es : si cette accusation est fréquente pour l’extrême-gauche, elle l’est beaucoup moins pour l’ensemble de notre camp social. Les positions appelant à la reconnaissance de deux États ou à limiter l’expansion de l’État d’Israël, souvent sans même considérer le droit au retour des réfugié·es,qui pouvaient constituer la routine d’organisations à tendance sionistes de gauche sont mises à mal par la violence du génocide et appellent à une prise de position plus courageuse, à laquelle il est difficile de décider notre camp.

Cette problématique s’est notamment posée avec vigueur dans les cadres féministes : le collectif « Nous vivrons », qui prétend défendre les femmes victimes de crimes sexuels lors des attaques du 7 Octobre n’a ainsi, en dépit de ses positions sionistes, pas été dans un premier temps exclu du mouvement féministe lors de la date du 25 Novembre. La nature du mouvement, qui intègre pourtant des figures issues de l’UEJF, et son caractère raciste a ainsi du attendre une manifestation de violence directe contre le cortège d’Urgence Palestine pour que le mouvement féministe puisse clarifier sa position — alors alors même que « Nous vivrons » accusait les féministes qui s’étaient engagées en soutien des Palestinien·nes d’antisémitisme. Face à la sidération qu’impliquerait cette fois une rupture de solidarité avec les femmes israéliennes, assimilées par les discours institutionnels à des femmes blanches, l’argumentaire sioniste de Nous Vivrons, de facto articulé à la domination des Palestinien·nes et la rupture de la « solidarité » entre les femmes qu’il implique n’ont pas pu être clairement identifiés par un mouvement féministe encore inégalement pénétré de l’antiracisme politique. La présence d’un autre collectif, Nemesis, dont la position nettement fémo-nationaliste, en marge de la manifestation du 23 Novembre, qui entendait y défendre un discours raciste sur les violences faites aux femmes a participé à interroger l’ensemble du mouvement féministe qui s’est organisé progressivement pour faire de l’antiracisme et du barrage antifasciste une priorité du 8 Mars.

Ces difficultés de notre camp se manifestent et se réitèreront tant que la clarté politique nous manquera : elles se posent à chaque nouvelle sollicitation politique. La récente polémique autour de l’affiche de LFI sur la manifestation de 22 Mars, qui reprenait les codes graphiques de l’antisémitisme, produit un double effet de dénégation : d’une part, l’antisémitisme comme enjeu apparaît nié devant l’ « instrumentalisation » de l’extrême-droite, et d’autre part, elle participe à tempérer ou à fragiliser la démarcation politique de l’antisionisme et antisémitisme.

Le soutien aux organisations antiracistes comme boussole

La clarification politique est dès lors rigoureusement essentielle, et doit s’articuler en deux temps : dans un premier temps, il est essentiel de reconnaître la permanence de l’antisémitisme, voire son augmentation dans la période. La violence du sionisme et l’hégémonie d’un discours médiatique en faveur du sionisme ne peuvent que constituer des ressorts de l’antisémitisme. De fait, l’impunité de l’État d’Israël, l’exceptionnalité des mesures prises par l’État sioniste — en violation du droit international, de la souveraineté des États arabes — constituent des arguments pour qui recherche une justification aux théories du complot de la domination des Juifs sur l’ordre mondial, ou même de manière plus large à la haine des Juifs : l’actualité implique donc indéniablement la croissance de l’antisémitisme. Nier l’évidence revient à produire une simplification du réel qui nierait notre propre analyse du sionisme, selon laquelle c’est un objectif politique qui ne correspond pas aux intérêts des Juives et Juifs. Le sionisme est un facteur d’antisémitisme, l’État d’Israël et sa politique impérialiste ne constituent pas une défense pour les Juives et Juifs mais leur mise en danger par un État guerrier.

Dans cette perspective, la lutte antiraciste est une boussole : c’est elle qui doit permettre de défaire l’assimilation des Juifs à la politique israélienne et de construire la solidarité des Juives et Juifs avec les autres catégories sociales racialisées. A rebours des spéculations racistes sur l’organisation communautaire des Juifsves, il s’agit de soutenir un discours anti-impérialiste et anticolonial cohérent. C’est en luttant politiquement contre le rôle de l’État d’Israël dans la géopolitique occidentale que l’argumentaire antisémite contre Israël peut être combattu. C’est dans cette perspective antiraciste que le NPA-A s’est exprimé dès le 7 Octobre en faveur de la résistance palestinienne, et a continué à s’engager résolument en soutien des organisations antiracistes et pro-palestiniennes qui avaient adressé, par exemple en soutenant l’appel d’Urgence Palestine, de Samidoun et du mouvement antifasciste à s’organiser pour que l’objectif du 8 Mars soit de repousser les fascistes et les sionistes.

Dans un deuxième temps, la clarification politique implique également d’identifier l’antisémitisme à un cadre bien plus large et à un temps plus long que celui de l’existence de l’État d’Israël. La seule racine de l’antisémitisme n’est pas la politique israélienne, et, faut-il le rappeler dans un pays qui a collaboré au génocide des Juifs d’Europe alors qu’il maintenait des colonies en Afrique, ne repose pas sur la seule solidarité avec les Arabes. L’antisémitisme a une histoire européenne longue, qui s’appuie d’une part sur l’altérisation religieuse des Juifs, c’est sa racine antijuive, et d’autre part sur l’altérisation communautaire des Juifs, c’est sa racine plus proprement « antisémite ». Cette altérisation communautaire est à la fois le lieu d’une intolérance à des différences culturelles réelles qu’il ne s’agit pas d’invisibilser, et le résultat d’une discrimination subie par les Juives et Juifs en Europe.

Dans cette perspective, la lutte antiraciste constitue également une nouvelle boussole de la lutte contre l’antisémitisme : en effet, l’antiracisme contemporain s’est doté d’outils d’analyse capables de défaire et de porter une critique sur les discours dits d’ « émancipation » du siècle des Lumières et qui ont en réalité constitué une entreprise de blanchiment des Juifs et de l’affirmation de l’hégémonie blanche. Ces outils d’analyse doivent être mobilisés pour construire des revendications antiracistes pour une minorité juive qui n’ignore pas ces effets de dominations et la fragilité de l’assimilation des Juives et Juifs à la majorité nationale blanche. La conscience claire de cette fragilité constitue indéniablement un ressort politique de la légitimation du sionisme parmi les Juives et Juifs : ne pas reconstruire de dénégation universaliste, mais opposer un discours antiraciste à l’alternative sioniste est une tâche urgente. Plus encore, ces outils participent à la formation d’une conscience politique commune des racisé·es — comme la continuité des logiques antijuives et islamophobes participent à le montrer.

Lutter contre l’antisémitisme culturel : une bataille politique contre l’extrême-droite

Les polémiques autour de l’affiche de LFI, dans le camp de l’antiracisme politique, renvoient à une double accusation : d’une part, il s’agirait de « faire le jeu de l’extrême-droite » en confirmant que cette affiche était effectivement antisémite, et d’autre part, il s’agirait de nuire à des alliés objectifs de l’antisionisme politique en accusant LFI .

Il faut se pencher sur ce qui prête le flanc aux accusations d’antisémitisme dans séquence. L’image d’un Cyril Hanouna sous des traits caricaturaux est-elle réellement le problème ? S’il est indéniable qu’il y a un problème dès lors que des personnes juives, et d’autres au-delà, ont perçu cette affiche comme antisémite et que simultanément LFI se borne à le nier en bloc sans développer, il convient de se demander pourquoi une affiche faisant partie d’une campagne contre l’extrême droite (qui est pourtant un danger mortel pour les Juifs) a été perçue comme telle. Ce que paye LFI ici ce n’est pas d’avoir laissé passer une affiche rappelant l’imagerie nazie. Dire qu’il s’agit d’une affiche parmi d’autres n’est pas satisfaisant étant donné que Cyril Hanouna était le seul juif représenté. C’est pourtant un des arguments qui a été utilisé par LFI pour se défendre. Et c’est là que le bât blesse.Si sa ligne sur l’antisémitisme et sa compréhension plus large du racisme était claire, le mouvement aurait pu présenter une défense cohérente et ne permettant pas une attaque honnête en antisémitisme.

Cela étant dit c’est justement parce que LFI est une organisation ancrée dans notre camp social qu’il est important de ne pas retenir nos critiques. Une partie du camp antiraciste prend appui sur les revendications de l’antiracisme politique pour produire un impératif en direction des Juives et Juifs à « tolérer » une forme d’antisémitisme. La lutte contre le sionisme devrait ainsi aboutir à une solidarité de type campiste : tous les sionistes d’un côté, tous les antisionistes de l’autre. Un tel campisme a indéniablement constitué une errance grotesque du mouvement ouvrier au siècle dernier. Il nous faut donc affirmer avec plus de finesse que de même que la défense du sionisme protège une partie des Juifs, mais seulement temporairement, et ne constitue pas une lutte réelle contre l’antisémitisme, l’antisionisme ne constitue pas une lutte suffisante contre l’antisémitisme et ne protège qu’une partie des Juives et Juifs. Plus encore, l’antiracisme politique se saisit de l’épouvantail de l’antiracisme moral : l’affiche reprendrait des « tropes », et l’antisémitisme, puisqu’il ne serait pas systémique ni associé à une surexploitation structurelle des Juives et Juifs de France, ne constituerait pas un véritable enjeu matériel.

Ici, il faut s’interroger : la représentation de Cyril Hanouna proposée par la France Insoumise n’a pas seulement repris ou mobilisé des tropes, elle a constitué la « citation » d’une scène antisémite. Les images, tout autant que les discours, existent et structurent les imaginaires. Il est de fait surprenant qu’une figure comme Houria Bouteldja, qui insiste sur l’importance des imaginaires politiques et souligne l’insuffisance d’un travail sur celui-ci à l’extrême-gauche se montre ensuite aveugle à la réactivation d’un imaginaire antisémite. La défense de la « nation », qui par ailleurs ne s’est pas faite en Europe sans exercer une violence assimilatrice sur les Juives et Juifs, devait-elle la rendre si aveugle à ce sur le mépris desquels elle s’est construite ?

Les effets matériels de l’affiche de LFI sont donc bien là : l’imagerie antisémite à nouveau circule, et a pu interpeller l’ensemble du camp politique et des Juives et Juifs. Dès lors, le geste n’est pas sans effet politique, ni sans effet matériel.

Mais plus largement, et au-delà des représentations, LFI n’a jamais su comment réagir face à des accusations d’antisémitisme fondées. Par exemple lorsque Jean-Luc Mélenchon a dit en 2021 qu’Eric Zemmour n’était pas antisémite car son conservatisme reproduirait beaucoup de « scénarios culturels » issus du judaïsme, il était indéniable que ces propos étaient antisémites. Quelle fut la réaction de LFI ? Tout d’abord des accusations d’instrumentalisation des propos de Mélenchon par la droite, puis un mea culpa tiède du tribun qui reconnaît seulement s’être mal exprimé. S’il est vrai que cette sortie antisémite a été instrumentalisée par la droite pour discréditer LFI en l’accusant à tort d’être un parti avec un projet antisémite, il est aberrant de refuser d’admettre que ces propos étaient antisémites et de refuser de présenter des excuses.

S’agissant de la situation actuelle quelles sont selon nous les erreurs commises par les insoumis ? En premier lieu le silence pendant trois jours après le retrait de l’affiche montre un manque de préparation et l’inexistence d’une ligne claire sur le sujet de l’antisémitisme. Par la suite Manuel Bompard reconnaît une erreur mais sans développer suffisamment sur la nature de cette dernière. Enfin Jean-Luc Mélenchon réagit en parlant uniquement d’instrumentalisation de l’affaire par l’extrême-droite, négligeant totalement de parler de la réalité de l’antisémitisme.

C’est ce genre d’erreurs qui a installé une situation dans laquelle la droite s’engouffre dans le tunnel que LFI a contribué à creuser en laissant planer le doute sur leur potentielle vision antisémite. Cette droite en profite pour installer de longues séquences pendant lesquelles il est difficile de parler de fascisme et de pointer du doigt leur offensive raciste qui permet la montée en puissance de l’idéologie suprémaciste blanche dans de larges pans de la société. LFI se conçoit comme une citadelle assiégée, et cette conception la mène à rejeter tout reproche et à parler d’instrumentalisation dès qu’une attaque est formulée contre le mouvement. Cela est délétère mais tout peut encore changer. Si LFI fonctionne encore largement sur un logiciel d’antiracisme moral, il faut remarquer leurs pas en direction d’organisations qui défendent un antiracisme politique. Ce n’est qu’en acceptant de continuer dans cette direction, en admettant la nature encore largement coloniale de l’État français, en développant un discours sur la racialisation des personnes juives et en ayant une ligne claire sur la nature ethnonationaliste et profondément coloniale de l’idéologie sioniste politique, en renonçant explicitement à l’universalisme Français et au modèle des Lumières que le mouvement insoumis pourra s’affranchir de ces longues séquences qui font perdre tant de temps à notre camp social.

Il faut avoir confiance en le fait que LFI n’est pas un parti avec un projet antisémite, il reste à le montrer clairement : faites mieux.

L’antisémitisme n’est ni culturel ni résiduel : le cas d’une agression antisémite

Mercredi 30 Avril dans le Gard, une agression antisémite d’une extrême violence a eu lieu au beau milieu d’une scène d’une extrême banalité : alors qu’il nourrissait les chats errants, un homme de 70 ans a été interpelé par un autre, ivre, pour lui demander de l’argent. Visiblement juif puisqu’il portait une kippa et des tsitsit, son refus a débouché sur de violentes injures antisémites, et une agression d’une rare violence : un premier coup dans le dos l’a fait chuter, puis, selon un témoin, plusieurs dizaines de coups de pied lui ont été envoyés alors qu’il était au sol. Le parquet d’Alès a immédiatement reconnu le caractère antisémite de l’agression. Et ce, malgré les circonstances qui associent le suspect à un profil « marginal », connu pour des faits de petite délinquance et manifestement sous l’emprise de l’alcool.

Une telle agression n’est pas anodine et n’est pas un simple fait divers anecdotique : il accroît la pression qu’ilEs ressentent quant au fait d’être une minorité racisée visible. Elle ne correspond pas non plus à un invariant historique de l’antisémitisme et de l’antijudaïsme européens : c’est bien maintenant que l’antisémitisme sévit et son actualité doit aussi être la nôtre. La réactivation suprémaciste blanche de thèmes sur la « submersion » et la « subversion » raciale en Europe, notamment impulsée par les mouvements d’extrême-droite proches de Renaud Camus ne peuvent que renforcer l’antisémitisme historique dont il emprunte les tropes. Pour le dire en un mot, le pays ne peut pas être aussi islamophobe sans être en même temps violemment antisémite. L’extrême-droite a déjà plusieurs fois souligné que, dans sa lutte contre la visibilité musulmane, elle demanderait des « concessions » aux Juives et Juifs — concessions que beaucoup ont déjà faites au nom de l’assimilation comme modèle républicain et dont il s’agit d’enrayer le modèle d’invisibilisation blanche.

Les racines communes de l’islamophobie et de l’antisémitisme ne doivent pas produire de mise en concurrence de la reconnaissance des racismes : il ne s’agit ni de faire de la reconnaissance de l’antisémitisme le modèle qui permette la lutte contre l’islamophobie, ni de faire l’islamophobie le « nouvel antisémitisme ». Si l’évidence de la qualification raciste contraste avec celle de l’assassinat d’Aboubakar à la Grand-Combe, géré par les mêmes instances, la reconnaissance institutionnelle de l’antisémitisme ne suffit pas à protéger les Juives et Juifs.

Après s’être relevée, la victime s’est sentie tellement en danger en raison de sa judéité visible qu’elle a voulu se découvrir pour se protéger. Non seulement le geste de cet homme est complètement compréhensible, mais surtout il reflète l’oppression que subissent les Juives et Juifs en France et leurs réflexes d’autodéfense. Aussi nous devons, en tant qu’antiracistes, nous positionner en soutien à l’ensemble des personnes Juives et soutenir leur visibilité, y compris religieuse, et ce par une politique volontariste de dénonciation de l’antisémitisme — sous toutes ses formes, afin de faire de notre camp un allié crédible des juives et juifs.