Publié le Jeudi 25 janvier 2024 à 14h00.

EPR : stop ou encore ?

L’EPR (European Presurized Reactor) n’est rien d’autre qu’un gros réacteur à eau sous pression, similaire aux 56 autres du parc EDF. Les 14 EPR2 (EPR « optimisés ») ont été rebaptisés Evolutionnary Power Reactor.

En vérité, du marketing pour faire oublier les turpitudes de l’EPR Flamanville : nombreuses malfaçons, coût multiplié par 6 (20 milliards d’euros en 2023), mise en service repoussée à fin 2024, soit douze ans de retard 1.

EPR saison 1

Grâce à des dossiers falsifiés cachant des défauts de fabrication connus d’EDF depuis 2007, la cuve défectueuse de l’EPR de Flamanville a été installée dans l’enceinte du réacteur en 2014. Malgré un risque évolutif de rupture de cette cuve non conforme, l’ASN a autorisé en 2020 EDF à remplir la piscine de l’EPR Flamanville de combustible nucléaire pour un chargement du cœur du réacteur en 2022, sous réserve d’un remplacement du couvercle de la cuve en 2024. L’ASN autorisait ainsi EDF à mettre en route l’EPR avec une cuve dérogeant à ses propres normes.

Pire, depuis 2021, les avaries et arrêts des 3 autres EPR (un en Finlande et deux en Chine) 2 ont révélé un grave défaut de conception de la cuve, qui provoque des vibrations entraînant une rupture rapide des gaines de combustible qui contamine les circuits, mais aussi une perte de contrôle du pilotage de la réaction nucléaire. Informé par des lanceurs d’alerte d’EDF, le laboratoire indépendant CRIIRAD 3 avait alors interpelé l’ASN et EDF, sans obtenir de réponse satisfaisante. Mais en 2022, l’IRSN a confirmé la gravité du problème. Discrètement, en 2023 EDF a retiré les assemblages combustibles des piscines 4. Ils seront remplacés en mars 2024 par des assemblages renforcés produits à l’usine Framatome de Romans-sur-Isère. 

EPR saison 2

Pour les EPR2, la recherche de la rentabilité par effet de taille avait conduit EDF à vouloir passer la puissance de 1 650 à 1 750 MW. L’ASN a répondu que les modifications nécessaires « sont de nature à réduire les marges de sûreté. L’ASN n’est donc pas favorable à une telle augmentation de puissance » 5. De plus, pour l’EPR de Flamanville, compte tenu des graves anomalies constatés sur les EPR chinois et finlandais, EDF envisage un fonctionnement entre 25 % et 60 % de sa puissance nominale (moins que les réacteurs de Fessenheim !) et un remplacement accéléré du combustible, avec potentiellement trois fois plus de déchets. À ce stade, l’EPR2 est loin d’être certifié et a fortiori construit. Les travailleurEs du nucléaire eux-mêmes doutent qu’avec la désindustrialisation et EDF en quasi-faillite 6 (que Macron envisage de renflouer en puisant dans les livrets A), la filière ait la capacité technique et les moyens humains pour 14 EPR opérationnels en 2050…

RTE et Négawatt ont élaboré des scénarios viables sans nucléaire. Le NPA aussi 7, avec deux gisements à exploiter : la sobriété-efficacité et les énergies de flux (EnR) à la place des énergies de stock (fossiles et nucléaire). Cela passe par l’expropriation des groupes de l’énergie sans indemnités ni rachat au sein d’un monopole public et par une révolution dans l’organisation sociale et économique : agriculture, urbanisme, ­transports, services publics…

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  • 1. Voir l’Anticapitaliste n° 551 du 14 janvier 2021.
  • 2. Voir l’Anticapitaliste n° 574 du 24 juin 2021.
  • 3. Rapport CRIIRAD 15 mars 2023.
  • 4. Ouest-France du 27 octobre 2023.
  • 5. Avis n° 2019-AV-0329.
  • 6. Le Canard enchaîné du 10 janvier 2024.
  • 7. Voir l’Anticapitaliste n° 592 du 25 novembre 2021.