Publié le Mercredi 23 novembre 2016 à 09h59.

Agression sur C8 : le reflet d’une société sexiste ?

Le 13 octobre dernier, Soraya Riffy est invitée sur le plateau de l’émission « Touche pas à mon poste » animé par Cyril Hanouna sur C8. Une émission populaire, en particulier chez les jeunes.

Comme à l’accoutumée, l’émission est l’occasion de jeux et défis en tout genre. Ce soir-là, à la suite d’un défi perdu dans laquelle la jeune actrice jouait Kim Kardashian, Cyril Hanouna demande à Soraya Riffy (sûrement comme gage ou punition), d’embrasser l’un des chroniqueurs présents, en l’occurrence Jean-Michel Maire, celui qui dans la bande joue plutôt le rôle du « Don Juan » sauce franchouillarde donc plutôt du macho en règle générale. Cette dernière exprime son refus à plusieurs reprises, malgré l’insistance de l’animateur. Ni une ni deux, Jean-Michel Maire l’embrasse alors sur le sein. Rires dans l’assemblée. Fin de la séquence...

Réactions

Le soir même, les premières réactions d’indignation apparaissent sur les réseaux sociaux, pour rappeler – ce qu’a fait une des chroniqueuses présentes en plateau – une chose fondamentale : quand une femme dit non, c’est non, et pas oui, si ça arrange.

Le lendemain, l’association Osez le féminisme a déposé une plainte auprès du Conseil supérieur de d’audiovisuel (CSA) pour dénoncer cette agression doublée d’une humiliation publique. Malgré les près de 2 500 signalements reçus, le CSA se contentera d’un simple rappel à l’ordre...

Mise en scène des « excuses »

L’emballement médiatique provoquée par l’affaire oblige Cyril Hanouna et ses chroniqueurs a revenir sur l’affaire. Au-delà des plates excuses de l’intéressé, qui explique avoir pleuré tellement l’acharnement contre lui était dur (« J’admets aisément être un gros lourd mais je respecte réellement les femmes » dira-t-il...), l’ensemble des chroniqueurs va chercher à minimiser les faits et à soutenir leur copain (un réflexe de groupe assez courant) en rejetant le terme d’agression sexuelle. Cyril Hanouna ira même jusqu’à dire que s’il n’approuve pas le geste, il ne le trouve pas « si grave »...

Présente sur le plateau, la principale intéressée évoquera, elle, un geste qu’elle juge déplacé et peu professionnel, même si elle a choisi de ne pas porter plainte. Fin de la séquence. Tout le monde est content.

Voilà, nous en sommes encore là en 2016, dans une émission regardée par plus d’un million de téléspectateurs en direct : on peut humilier une femme, nier le fait qu’une agression sexuelle se soit produite, sans que cela ne produise un quelconque effet, ni plus de réactions. Aucune sanction prise contre le chroniqueur, ni contre la chaîne qui diffuse de telles images, ne sont à l’ordre du jour. Cela instille donc l’idée dans l’inconscient collectif que le corps d’une femme reste à la disposition des hommes et de leur bon vouloir. Comme pourrait le dire ce même Cyril Hanouna, décidément « la télé, c’est que de la merde ! »

Hélène Pierre