Publié le Dimanche 5 mars 2017 à 08h47.

Pour un droit au séjour autonome pour les femmes étrangères

Les femmes étrangères vivant en France affrontent une double difficulté, en tant que femmes subissant l’oppression patriarcale de leur pays d’origine et de leur pays d’accueil, et en tant qu’étrangères, en butte aux discriminations et au racisme.

La montée toujours plus insupportable de la xénophobie en France et dans les pays occidentaux, ainsi que les durcissements successifs des lois et règles autorisant le séjour, rendent ce problème plus aigu que jamais.

Depuis la fermeture des frontières aux migrations de travail en 1974, les liens familiaux et conjugaux sont devenus déterminants pour obtenir le droit au séjour en France soit par le mariage avec un ou une Française, soit par le regroupement familial, soit par la reconnaissance de la vie privée et familiale en France. La grande majorité des autorisations de séjour sont délivrées au titre du regroupement familial ou en raison du mariage avec une personne française. Les régularisations au titre du regroupement familial concernaient il y a quelques années 80 % de femmes, avec tout ce que cela impliquait pour elles de dépendance vis-à-vis de la famille, du père ou du mari...

À partir des lois Pasqua, le durcissement des conditions du regroupement familial en termes de conditions de ressources et de logement, a augmenté la précarité de la situation des femmes. Celles-ci sont venues plus souvent hors regroupement familial, et sont vouées à rester des années et des années sans papiers et sans aucun droits, par exemple le droit de travailler. Elles sont condamnées à accepter les conditions de vie dictées par leur mari ou père ou frères, et subissent aussi la surexploitation du travail clandestin.

Femmes et migrantes, la double peine

Aujourd’hui les caractéristiques de la migration des femmes a changé sous deux aspects. En premier lieu, c’est qu’elles fuient massivement les guerres et les violences spécifiques contre les femmes liées aux situations de conflits. De plus, avec la mondialisation, un nombre croissant de femmes migrent avec une aspiration à une vie plus indépendante et plus libre, l’espoir d’un avenir meilleur pour elles et leurs enfants.

Elles sont d’autant plus frappées par les mesures de fermeture des frontières, par les conditions inhumaines d’accueil quand elles arrivent malgré tout à passer les frontières, par l’imbroglio, la multiplication des procédures administratives dissuasives et par toutes les restrictions à l’obtention d’un droit au séjour.

Les femmes qui arrivent seules, ou seules avec des enfants, sont ainsi réduites à la galère d’une vie sans papier et sans droits. Elles ont le choix entre subir la surexploitation du travail clandestin, chercher un « protecteur », ou avoir recours à la prostitution. C’est donc à l’opposé de ce qui les a motivées au départ.

Quant aux femmes migrantes fuyant les violences sexuelles liées aux guerres ou aux mutilations sexuelles et mariages forcés, leur sort ne s’est pas véritablement amélioré. La loi du 29 juillet 2015 portant la réforme du droit d’asile, qui doit reconnaître l’asile aux femmes ayant subi des violences ainsi qu’une série de garanties tout au long de la procédure, peine à être appliquée faute de moyens et de volonté politique. Elle est impactée par toutes les autres mesures restrictives concernant l’obtention du titre de séjour dont la dernière en date est la difficulté à obtenir le formulaire à remplir pour faire sa demande. En effet, celui-ci est maintenant octroyé au compte-goutte dans les préfectures avec un pré-enregistrement. Une étape de plus.

C’est pourquoi nous demandons une individuation des droits – non dépendant du mari ou du père – pour l’obtention des titres de séjour pour les femmes, des démarches simplifiées pour toutes et tous, et des moyens pour garantir l’accès au statut de réfugiée pour toutes les femmes ayant subi des violences spécifiques.