Publié le Mercredi 23 novembre 2016 à 10h04.

Solidarité avec les femmes réfugiées !

Partir, une question de survie…

Auparavant, le fait migratoire était majoritairement masculin, peu de femmes seules, et les femmes avec enfants rejoignaient les maris lorsque ceux-ci étaient « installés ». Ce n’est plus le cas depuis quelques années. Les femmes fuient les guerres, les persécutions, les famines, tout comme les hommes, mais elles fuient aussi des violences spécifiques : les mutilations sexuelles, les mariages forcés, les séquestrations, et dans les pays en guerre, les viols pratiqués massivement comme arme de destruction.

Elles partent, cela malgré la connaissance qu’elles ont de leur vulnérabilité et des difficultés qui les attendent dans leur trajet... Ainsi cette jeune fille Érythréenne qui s’était fait injecter un contraceptif pour « être protégée » le temps du voyage... Elles partent parce que c’est leur dernier recours, parce qu’elles n’ont pas le choix, parce que c’est une question de survie.

En 2013, selon une source du Monde, « 111 millions de femmes ont pris la route de l’exil, représentant 48 % des migrants dans le monde ». Et Christophe Boulierac, porte-­parole de l’Unicef, indiquait que parmi les 3 000 migrantEs qui transitaient chaque jour par la Macédoine début septembre 2015, un tiers étaient des femmes et des enfants, contre 10 % en juin de la même année. 12 % environ des femmes étaient enceintes1.

Pendant le trajet, c’est l’enfer !

Elles doivent affronter les violences et les chantages des passeurs, des autres migrants, des États traversés. Un rapport de Human Rights Watch (HRW), publié le 21 septembre 2015, faisait état de nombreuses « violences spécifiques » contre les femmes, soit des agressions sexuelles allant du harcèlement au viol. Ce rapport corroborait les faits de violences sexuelles et de viols commis par des policiers à l’intérieur du camp de Gaz Baba en Macédoine, faits rapportés par plusieurs témoignages.

Maryline Baumard, journaliste ayant passé cet été trois semaines à bord de l’Aquarius (bateau ONG qui secourt les migrants en mer), révélait dans un article paru le 8 septembre dernier que la « quasi-totalité des femmes recueillies avaient été victimes d’abus sexuels en Libye. À l’appui, de nombreux témoignages mettaient en évidence l’organisation de véritables réseaux de traite humaine à partir des passeurs et de guerre entre milices pour le contrôle de ce juteux marché » ! La marchandisation des femmes à la faveur de la mondialisation des conflits... À quand le retour des marchés aux esclaves ?

Les femmes ont honte. Elles ne parlent pas, ne se plaignent pas. « Ce qui arrive est de leur faute » leur a-t-on répété, « si elles vont en Europe, c’est pour se prostituer... ». « Elles se croient fautives, responsables de toutes les violences qu’elles ont subies », explique Hassiba Hadj Sahraoui, juriste de Médecins sans Frontière (MSF) à bord de l’Aquarius. Un lieu non mixte y a été créé pour permettre aux femmes de se poser en sécurité...

L’« accueil » en France aggrave les situations d’oppression

La France, où plusieurs hommes politiques de droite comme de gauche n’arrêtent pas d’instrumentaliser les combats féministes à leur profit, ignore les violences spécifiques auxquelles ont été confrontées les femmes migrantes, et donc ne met rien en place pour y répondre.

Pire, en n’ouvrant pas des hébergements dignes et en nombre suffisants, en ne mettant pas à disposition de façon urgente des lieux de prise en charge des questions de santé, en maintenant les femmes dans une extrême précarité, elle aggrave leur situation d’oppression.

Après la phase d’accueil, la galère continue, les lois sur le séjour ne sont pas faites pour favoriser leur autonomie – ce que nombre d’entre elles espéraient trouver –, mais au contraire les renvoient sous la coupe des maris ou les poussent à chercher un « protecteur ».

Ce qu’il faudrait...

D’abord des lieux d’accueil non mixtes avec des personnels formés pour favoriser l’écoute des femmes migrantes ; la création massive de lieux d’hébergement permettant un accueil dans la dignité, une prise en charge des questions de santé et un accompagnement vers l’emploi qualifié ; des démarches simplifiées et une réelle prise en compte des faits de violences spécifique pour l’accès au statut de réfugiée pour les femmes ; enfin une individuation des droits – non dépendant du mari ou du père – pour l’obtention des titres de séjour pour les femmes.

Sonia

 

  • 1. Article de Lucie Soulié publié dans le Monde du 12 octobre 2015.