La déroute du régime issu de l’occupation de l’Afghanistan semble clore 20 ans de « guerre contre le terrorisme », officiellement déclarée après les attentats du 11 septembre 2001. Cette guerre se poursuit pourtant comme le 29 août 2021 où des bombardements US ont encore tué sept enfants en Afghanistan. C’est encore au nom de la « guerre contre le terrorisme » que la France a occupé et bombarde le Sahel, ce que nous dénoncerons à l’occasion du Sommet France-Afrique du 7 au 10 octobre à Montpellier. Ci-dessous la déclaration adoptée à la dernière assemblée générale du collectif Ni guerres ni état de guerre, auquel participe le NPA.
Depuis 2001, la France est engagée dans la « guerre contre le terrorisme » initiée par les USA et à laquelle participent la plupart des grandes puissances : occupation de l’Afghanistan depuis 2001, soutien à l’occupation de la Cisjordanie par Israël à partir de 2000 et blocus et bombardements de Gaza depuis 2005, opérations françaises Serval puis Barkhane au Mali, puis au Burkina Faso, en Mauritanie, au Niger et au Tchad depuis 2014, bombardements et déploiement de troupes contre l’État islamique en Irak à partir de l’été 2014, puis en Syrie. Cette « guerre contre le terrorisme » justifie et passe aussi par le soutien aux crimes de l’occupation contre le peuple palestinien, ainsi qu’aux régimes dictatoriaux d’al-Sissi en Égypte, d’Idriss Déby au Tchad et du Maréchal Haftar en Libye.
1) La « guerre contre le terrorisme » nous désigne comme cible d’attentats
La « guerre contre le terrorisme » n’a en rien empêché les attentats qui se sont multipliés depuis 2015, elle nous a même désignés comme cible.
Selon une des nombreuses études sur le sujet, « les pays "interventionnistes" sont, statistiquement, 55 fois plus touchés par les attentats "terroristes" transnationaux que les pays non-interventionnistes. »1.
On ne saurait le dire mieux que l’un des participants direct à cette guerre, le colonel français Legrier, engagé en Afghanistan puis en Irak : « Nous avons détruit massivement les infrastructures et donné à la population une détestable image de ce que peut être une libération à l’occidentale, laissant derrière nous les germes d’une résurgence prochaine d’un nouvel adversaire. Nous n’avons en aucune façon gagné la guerre. »
2) La « guerre contre le terrorisme » justifie les lois liberticides et entraîne le développement de l’islamophobie
24 lois « antiterroristes » ont été votées depuis 1986. Ces lois votées en urgence sont quasi systématiquement devenues permanentes, et leur cible s’est étendue à toute contestation de l’État.
Deux nouvelles lois viennent encore d’être ajoutées : la loi de « sécurité globale » qui renforce les pouvoirs de la police et limite encore les libertés publiques, et la loi « séparatisme » pudiquement renommée « loi confortant le respect des principes républicains » qui ajoute de nouvelles mesures d’exception visant les musulmanEs et leurs organisations : « contrat d’engagement républicain », obligation d’une nouvelle déclaration préalable en préfecture pour les associations cultuelles ; les libertés fondamentales d’association, d’expression, d’enseignement et de culte sont menacées.
La spirale de violence initiée par la « guerre contre le terrorisme » débouche sur une nouvelle étape en France même : interdiction de Baraka City et du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), fermetures d’écoles et de mosquées, plusieurs milliers de perquisitions en 2015-2016 et 2020, arrestations et intimidations, diffusion toujours plus large des thèses racistes encouragée par le pouvoir.
3) La « guerre contre le terrorisme » est un crime qui vise à l’assujettissement des peuples aux puissances impérialistes
20 ans après son déclenchement officiel, la « guerre contre le terrorisme » apparaît d’abord comme une guerre sans fin, et qui ne cesse de s’étendre à travers le monde. Les États-Unis et leurs alliés ont largué plus de 326 000 bombes et missiles depuis 2001 dont plus de 152 000 en Irak et en Syrie. Cela représente une moyenne de 46 bombes et missiles par jour pendant près de 20 ans. Aucun de ses objectifs affichés n’a été atteint : les attentats se multiplient en réponse aux bombardements des puissances, et les États (Afghanistan, Irak) que les occupations prétendaient démocratiser sont détruits.
Son bilan humain est monstrueux : plusieurs centaines de milliers de morts, en Irak, en Afghanistan, et au Pakistan. Des villes comme Mossoul en Irak (2 millions d’habitantEs avant-guerre) rasées à 80 %, plus de 37 millions de personnes déplacées après avoir vu leur vie réduite en cendres par les bombardements des grandes puissances.2
À ces millions de réfugiéEs fuyant leurs pays ravagés par la guerre prétendument menée pour les libérer, les puissances impérialistes n’offrent rien d’autre que la traque policière, les barbelés des camps de rétention.
Au Sahel, cette guerre ne cesse de s’approfondir et affecte de plus en plus directement les populations civiles, comme l’illustre une nouvelle fois le bombardement par l’armée française du village de Bounti au Mali le 3 janvier 2021, qui a tué 19 civils participant à un mariage. Sachant aussi que de nombreux massacres de civils sont perpétrés par des armées locales largement équipées et formées par la France. Elle est l’occasion d’un renforcement de l’occupation directe par l’armée française, par laquelle la France cherche à maintenir sa place sur la scène internationale, son ingérence politique dans les pays africains et ses intérêts économiques régionaux dans le cadre du pillage de l’Afrique.
Les crimes commis contre les civils à une échelle de masse, la destruction des villes et des nations, les occupations militaires directes, le soutien aux dictateurs, trahissent le fait que la « guerre contre le terrorisme » est une guerre contre les peuples qu’elle vise à assujettir par la terreur.
Pour la liberté des peuples écrasés par les puissances impérialistes, pour nos libertés ici, parce que nous ne voulons plus compter les morts ici et ceux encore plus nombreux tués en notre nom, nous appelons à refuser la « guerre contre le terrorisme », à lutter pour l’arrêt des bombardements et des occupations militaires, l’arrêt des ventes d’armes et du soutien aux régimes écrasant les peuples.
- 1. Alex Braithwaite, « Transnational Terrorism as an Unintended Consequence of a Military Footprint », Security Studies, vol. 24, 2015-2.
- 2. David Vine, Cala Coffman, Katalina Khoury, Madison Lovasz, Helen Bush, Rachael Leduc et Jennifer Walkup, « Creating Refugees : Displacement Caused by the United States’ Post-9/11 Wars », septembre 2020, en ligne sur https://watson.brown.edu… %20et %20al_Costs %20of %20War %202020 %2009 %2008.pdf