Les gouvernements français, de gauche comme de droite, ont entrepris depuis de nombreuses années une offensive générale contre les services publics et les fonctionnaires...
Les services publics sont une sorte d’empiètement « socialiste » dans le système capitaliste, et on comprend mieux les attaques incessantes dont ils sont victimes. L’offensive contre les services publics n’a rien de spécifique à la France, puisqu’elle fait partie de l’offensive internationale lancée au cours des années 1990 de remise en cause de tous les budgets sociaux. La raison de l’attaque était double : permettre d’améliorer la marge des entreprises en limitant voire en baissant le « coût » du travail ; soumettre à la logique marchande le secteur public afin de s’approprier les formidables richesses qui leur échappent encore.
Une offensive du privé aux conséquences néfastes
Les dégâts provoqués par cette offensive sont nombreux et génèrent des dysfonctionnements, des suppressions de postes et licenciements, servant de prétexte à de nouvelles casses, fermetures de bureaux, de lignes de transport, d’hôpitaux, éloignant de plus en plus les usagerEs des services auxquels ils auraient le droit de prétendre.
Cette politique est aggravée par les lois de décentralisation, la réforme territoriale, qui réduisent les moyens des collectivités locales. Le recours à la concurrence entraîne dégradation des services et hausse des prix pour le plus grand bien du secteur privé. Si la remunicipalisation de la distribution de l’eau dans certaines villes représente une remise en cause partielle de l’accaparement des biens communs par les multinationales, les attaques contre l’école, notamment avec la réforme des collèges, l’université et la recherche, et les concessions faites au privé, confirment que les capitalistes veulent dévorer l’ensemble des espaces publics à potentiel lucratif. Même les finances publiques, un outil pourtant essentiel des politiques fiscales de l’État, sont attaquées...
Les fonctionnaires, ces « privilégiés » ?
Depuis des mois, on nous répète que les fonctionnaires seraient le principal problème : trop nombreux, fainéants et privilégiés. D’après le candidat de la droite, il faudrait donc en supprimer 500 000 (sur 5,6 millions), les faire travailler 39 h (payés 37 h), et en finir avec « leurs privilèges »...
Le rapport annuel sur l’état de la Fonction publique publié le 15 novembre dernier remet à leur place certains « populistes ». Si ce rapport ne permet pas de faire un bilan du quinquennat d’Hollande puisqu’il ne concerne que l’année 2014, il permet de faire le point sur une fonction publique affaiblie par les politiques d’austérité successives. Concernant les rémunérations « faramineuses » des fonctionnaires, ce rapport montre qu’en euros constants, le salaire net moyen a augmenté seulement de 0,2 % en moyenne... contre 0,6 % dans le secteur privé. De plus, dans de nombreux secteurs, on constate une baisse de la rémunération moyenne des agentEs. On y apprend aussi que 36,7 % des fonctionnaires travaillent le dimanche... contre 25 % des salariéEs dans le privé, et 17,5 % travaillent de nuit... contre 15 % dans le privé. Concernant le temps de travail, la majorité des agentEs travaillent déjà plus de 35 heures par semaine. Et dans la fonction publique hospitalière et la fonction publique d’État, les « Crédits épargne temps » sont pleins, et les heures supplémentaires non payées sont nombreuses. Les fonctionnaires trop nombreux ? Après les 150 000 suppressions sous l’ère Sarkozy et les 22 000 sous Hollande de 2012 à 2014, il faudrait donc accélérer des suppressions qui fragilisent voire font disparaître les missions de service public, pénalisant en premier lieu les usagerEs.
L’appropriation sociale pour répondre aux besoins
À l’opposé de ces combats d’arrière-garde, les luttes pour les services publics représentent un enjeu de société, la défense d’un projet fondé sur la solidarité et la satisfaction des besoins sociaux contre une société basée sur le profit, la satisfaction des intérêts des actionnaires et des propriétaires des moyens de production et d’échange.
L’éducation, la santé ou le logement sont des droits qui doivent être totalement retirés du secteur privé marchand. Il faut étendre les services publics, par exemple dans la petite enfance, créer des postes et développer de nouveaux services répondant aux besoins du plus grand nombre. Nous revendiquons la création d’un million d’emplois dans la fonction publique pour renforcer et développer les services publics afin de répondre aux besoins essentiels de la population : la santé, l’éducation, l’eau, l’énergie, le logement, les transports…
Contre la société de la concurrence généralisée, la construction d’une société solidaire passe par la réappropriation publique des secteurs privatisés. À la production de biens et de services en fonction du profit doit se substituer l’appropriation sociale pour produire, selon les nécessités du plus grand nombre, des biens et des services sociaux correspondant aux besoins fondamentaux définis par la population elle-même.
Sandra Demarcq