Publié le Lundi 26 octobre 2009 à 08h58.

Essai : Un monde défait

"Les communistes français de 1956 à nos jour"s par Bernard Pudal

Bernard Pudal figure désormais parmi les principaux spécialistes de l’histoire et de la sociologie du PCF. Dans son dernier ouvrage, il se penche sur l’après-1956. Il prend le temps de se distancer à la fois des nostalgiques, qui souhaitent réhabiliter la part présumée non stalinienne de l’histoire du PCF, et des anti-communistes qui souhaitent entériner l’échec du projet communiste lui-même. Il indique également à quel point la crise du PCF se nourrit de lourds paramètres exogènes, du point de vue des rapports de forces sociaux et politiques. Il s’attache à décrire, dans le cadre de l’aggiornamento consécutif à la mort de Staline, la tentative de refonder les bases intellectuelles du parti tout en maintenant les intellectuels communistes sous contrôle, ce qui implique à la fois une prise de distance progressive de nombre d’entre eux avec le PCF et une reprise en main brutale par l’appareil dirigeant des outils d’élaboration théorique. Il aborde également la nouvelle stratégie d’union de la gauche, conçue sur le modèle du Front populaire, qui attire au PCF, notamment dans l’après-68, des militants venus des classes moyennes séduites par ce projet. La combinaison de cette mutation sociologique profonde avec la rupture du programme commun en 1977 amène ensuite le PCF à une « politique de survie bureaucratique », sans repères stratégiques mais avec une politique interne visant à éliminer toute opposition. Dès lors, le désarroi militant s’étend dans les années 1980, encore aggravé dans l’après 1989-1991 puis par les échecs électoraux des années 2000. L’auteur ne semble pas considérer que les tentatives mises en place par Robert Hue puis Marie-George Buffet pour redéfinir le PCF puissent l’enrayer.

Il faut lire Pudal pour mieux comprendre la crise du PCF, mais aussi pour mettre en perspective les difficultés inhérentes à la construction d’un parti souhaitant offrir aux dominés un outil qui soit véritablement le leur.

Jenny Simons

Editions du Croquant, 215 pages, 18 euros