Publié le Mercredi 30 juin 2010 à 19h40.

Le PCF, 
avec de Gaulle
 dans l’union
 nationale

 

Entré en résistance après l’invasion de l’URSS par l’Allemagne nazie1, le PCF y est rapidement devenu hégémonique, ce qui a permis au «parti des fusillés» de s’installer ensuite comme la première force politique du pays. Rappelons son record historique des législatives d’octobre 1946: 28,2 % des voix, 182 députés. Dès 1941, les premiers contacts sont pris entre la direction du PCF et les représentants de celui qu’il désignait auparavant comme un galonné peu fiable et par trop lié à l’impérialisme britannique. De Gaulle décide rapidement d’associer le PCF à son gouvernement, tandis que ses représentants collaborent avec les communistes au sein du Conseil national de la Résistance. Si les luttes d’influence entre gaullistes et communistes sont incessantes, l’alliance prime toujours sur le conflit.

La reconstruction de l’État bourgeois

Contre les attentes de sa base, mais en accord avec les intérêts diplomatiques de l’URSS, l’appareil du PCF joue à la Libération le rôle que de Gaulle attend de lui : soutenir de Gaulle et l’aider à reconstruire l’État bourgeois. Dans l’immédiat, cela passe par l’intégration à l’armée régulière ou la démobilisation des FTP, la subordination des comités de la libération aux préfets nommés par le gouvernement, ainsi que la dissolution des milices patriotiques.

Si la direction du PCF avait auparavant eu quelque hésitations, tout rentre dans l’ordre dès le retour de Moscou de son chef, Maurice Thorez, le 27 novembre 1944. Trois jours plus tard, il prononce au Vélodrome d’hiver un discours dont les principaux mots d’ordre sont : « faire la guerre », « s’unir », « créer une puissante armée française », « reconstruire rapidement l’industrie ». La dissolution fin octobre des milices patriotiques, organisation armée de masse des travailleurs et de la population, est la décision gouvernementale qui suscite le plus de résistance, allant jusqu’à des affrontements armés. Le PCF aidera à y mettre fin après le discours prononcé par Thorez le 21 janvier 1945, devant le comité central réuni à Ivry : « Ces groupes armés ont eu leur raison d’être avant et pendant l’insurrection contre l’occupant hitlérien et ses complices vichyssois. Mais la situation est maintenant différente. La sécurité publique doit être assurée par les forces régulières de police constituées à cet effet. Les gardes civiques et, d’une façon générale, tous les groupes armés irréguliers, ne doivent pas être maintenus plus longtemps. »

La « bataille de la production »

En septembre 1944, le PCF, relayé par la CGT, se lance dans « la bataille de la production ». Alors que la population souffre de nombreuses pénuries et que les salaires sont rongés par l’inflation, c’est le moment que choisit Thorez pour déclarer que « la grève, c’est l’arme des trusts » et qu’il faut « produire, et encore produire ». Le 21 juillet 1945, il affirme devant des mineurs du Nord : « Produire, c’est aujourd’hui la forme la plus élevée du devoir de classe, du devoir des Français. Hier, notre arme était le sabotage, l’action armée contre l’ennemi. Aujourd’hui, l’arme, c’est la production pour faire échec aux plans de la réaction. »

Le 21 novembre 1945, ce ne sont pas moins de cinq représentants du PCF qui intègrent le second gouvernement de Gaulle. Tandis que Thorez devient ministre d’État, d’autres dirigeants du parti se voient confier les portefeuilles stratégiques du travail, de l’économie nationale et de la production industrielle. Leur rôle est clair : discipliner la classe ouvrière à l’effort de reconstruction capitaliste, en lui faisant croire qu’avec les nationalisations et l’annonce des premières mesures sociales, les entreprises et l’État seraient aussi un peu à elle.

À la mort de Thorez, en 1964, de Gaulle salua sa mémoire dans un « message de condoléances » qui signale : « À une époque décisive pour la France, le président Maurice Thorez a, à mon appel et comme membre de mon gouvernement, contribué à maintenir l’unité nationale. »

Jean-Philippe Divès