Publié le Vendredi 28 janvier 2011 à 23h19.

Le mouvement syndical et la crise (par René Mouriaux, Contretemps n°5)

La situation du syndicalisme des salariés, son a-venir, s’analyse à partir des défis suscités par la crise économique ouverte en 2008, des obstacles rencontrés dans la mobilisation et des facteurs positifs susceptibles de provoquer des luttes efficaces, associant conquêtes et compromis.

Les obstacles à l’action syndicale face à la crise contemporaine

«Il n’y a qu’à…», «Une grève générale ne se décrète pas…». Des vues simplistes s’affrontent sur la réponse possible et souhaitable du mouvement syndical à la crise contemporaine. Un effort d’objectivation est requis pour comprendre la conjoncture mondiale qui se spécifie dans chaque contexte régional et national.

La distinction entre causes endogènes et exogènes s’impose. Quatre facteurs objectifs, à dominante exogène, rendent plus particulièrement ardues les luttes contemporaines.

En premier lieu, le «tous ensemble» se heurte à une fragmentation accrue du salariat. Le constat ne vise pas d’abord les politiques d’individualisation des rémunérations conduites par le patronat mais les segmentations internes que le monde de l’économie avive. Parmi les multiples clivages qui interfèrent, trois dominent. L’opposition entre actifs employés sous contrat indéterminé et les autres impose de catastrophiques incompréhensions et hostilités. Des chercheurs ont théorisé la fin du travail et promu des catégories comme inclus/exclus, centraux/périphériques, producteurs/entretenus. Dans un ouvrage qui n’a recueilli qu’une faible attention, Anne-Marie Grozelier a décortiqué les travaux de Robert Castel, André Gorz, Dominique Meda, Jeremy Rifkin et montré leurs limites théoriques 1. L’abandon de la problématique construite sur la définition de l’homme comme animal qui travaille et de la centralité de ce dernier dans des rapports sociaux d’aliénation, d’exploitation et de domination conduit à ériger des conséquences en causes, des apparences en fondement. Le flottement idéologique s’empare aussi des militants. Ainsi une petite association de chômeurs (mais il n’y en a guère de très grandes) comme Cargo refuse d’appeler les chômeurs des «sans-emploi» et estime qu’échapper au travail est une condition bénéfique. Entre les deux pôles des CDI et des chômeurs se rangent une multiplicité de CDD, de temps partiels, de contrats saisonniers, de stages. De surcroît, le collectif de travail est morcelé par l’externalisation de ce qui ne relève pas du «cœur du métier», par le recours aux sous-traitants et aux intérimaires.

En deuxième lieu, la différence de régime juridique continue à séparer secteur privé et secteur public. Le clivage perdure en France en dépit de l’ampleur des privatisations effectuées tant par la droite que par la gauche, des assouplissements apportés au statut de la fonction publique d’Etat et de l’hospitalière. En 1995, le politologue Stéphane Rozès avait lancé la notion de «grève par procuration». Certes, les cheminots avaient bénéficié d’un soutien des salariés du privé lors du mouvement social contre la réforme Juppé de la Sécurité sociale. Néanmoins, pareille solidarité ne s’est pas reproduite lors de la suppression des régimes spéciaux de retraite et de l’instauration d’un service minimum dans les transports en 2008, pas plus que la mobilisation des chômeurs en 1997 n’a été suivie d’autres appuis comparables ultérieurement de la part des actifs employés. Les licenciés des entreprises d’équipement de l’automobile ont dû se battre seuls. Un professeur de sciences politiques, par ailleurs devenu directeur général de la Fondation pour l’innovation politique, organisme dépendant de l’UMP, avance la thèse de «la fonction publique contre le salariat privé» 2. Le propos ne se singularise pas par l’originalité. Raymond Barre avait dès 1976 désigné «les nantis» à la vindicte du salariat privé. Il reste que les deux mondes ne se rejoignent pas aisément.

La troisième fissure qui traverse le salariat et fragilise son unité provient du clivage entre nationaux et immigrés. Rappelons le succès des partis d’extrême-droite lors des élections européennes de juin 2009 dont l’ampleur ne saurait surprendre. Prolifique, l’étranger creuserait le déficit de la Sécurité sociale. En période de chômage, l’étranger est perçu comme un voleur d’emploi. En dehors des travaux pénibles que les nationaux désertent, la concurrence salariale existe bel et bien. Nicolas Sarkozy qui a joué constamment sur le sécuritaire comme ministre de l’Intérieur puis comme président de la République, distingue le bon Français de la racaille des banlieues, du terroriste, du pervers. L’immigré semble résumer tous les dangers, de la jeunesse, de la violence aveugle, du malade mental. Depuis 2001, dix-neuf lois sécuritaires ont été adoptées en France. Sur 24 des propositions du Front national en ce domaine, 16 ont été réalisées. Les sans-papiers sont pourchassés avec plus de 25000 expulsions par an. La politique française n’est pas une exception. L’Europe ferme ses frontières. La marine grecque tire sur les bateaux des clandestins. L’Italie enferme les migrants dans l’île de Lampedusa, de manière inhumaine et dégradante selon un rapport de la Gauche unitaire européenne. Le réquisitoire s’allongerait aisément. Migreurop n’exagère pas en parlant de «guerre aux migrants» 3. Un tel contexte, inséparable d’une «globalisation de la surveillance» 4, active tous les ferments de rivalité entre salariés nationaux et étrangers. La Grande-Bretagne s’est singularisée au printemps 2009 par l’éclosion de grèves contre l’emploi de travailleurs étrangers, surexploités il est vrai 5.

Le deuxième facteur d’affaiblissement du syndicalisme provient de la concurrence entre les salariats des diverses formations sociales aux niveaux de vie différents. Dans le cas de l’Union européenne, le dumping social épargne (encore) les fonctions publiques mais se vit quotidiennement dans l’industrie, le commerce, les services marchands. En 1992, le départ pour l’Écosse de Hoover, implanté à Dijon, suscita une émotion considérable car la décision montrait que l’espace européen n’est pas destiné à promouvoir un «modèle social» que le discours communautaire met en avant, mais un lieu de maximisation du profit. Loin de contrecarrer la technique qui consiste à déshabiller Pierre pour fournir un pagne à Paul, les syndicats des pays d’accueil acceptent le transfert dont ils bénéficient immédiatement. La rivalité joue également pour les investissements. Pour faciliter l’attribution des Jeux Olympiques à Paris, la CGT française a déclaré qu’elle n’entraverait pas, «conformément à la tradition syndicale», les travaux requis pour leur préparation. L’engagement ne traduit pas une conscience de classe très élevée et témoigne d’une ignorance de l’histoire. En 1967, la CGT a observé des grèves dans le bâtiment pendant la construction des infrastructures, et à la SNCF le jour de l’ouverture des Jeux Olympiques d’hiver tenus à Grenoble. Les licenciements dans les firmes multinationales exacerbent les contentieux entre prolétariats. La fermeture de Vilvoorde en 1997 a frappé par une européanisation de la lutte qui a été favorisée par les maladresses de Renault. Elle a été facilitée par son caractère défensif axé sur l’obtention d’un plan social et non sur le maintien de l’usine qui aurait pu provoquer par ricochet des réductions d’effectifs ailleurs. Au début de l’année 2007, la crise d’Airbus a entraîné des licenciements, plus importants en France qu’en Allemagne. La Fédération de la métallurgie FO a non seulement dénoncé l’inégalité de traitement mais aussi accusé les ingénieurs allemands d’être responsables des erreurs de câblage électrique sur l’A380. Avec la crise ouverte en 2008, au mouvement de délocalisation succède une «relocalisation». L’entreprise américaine Molex achète le 2 avril 2004 l’usine Connecteur Clinch à Villemur-sur-Tarn et annonce la fermeture du site le 23 octobre 2008.

A l’initiative dans la gestion de la main-d’oeuvre, le patronat en période de récession est largement à l’abri des pressions collectives. Au moment où il recourt à des licenciements ou au chômage partiel, pour éviter la formation de stocks coûteux et répondre à la baisse des commandes, l’arrêt de travail perd sa capacité coercitive. L’arme de la grève est émoussée. En mai et juillet 2009, une série de séquestrations de dirigeants d’entreprise, de saisies de produits manufacturés, de menaces d’incendie ou d’explosion a défrayé la chronique. Des dirigeants de la CGT ont formulé des appréciations divergentes. Maurad Rabi dans L’Humanité-Dimanche du 23 juillet 2009 juge ces méthodes légitimes, alors que Maryse Dumas s’inquiète le 31 du même mois du discrédit possible pour l’action syndicale. A l’instar du sociologue Norbert Alter 6 et du journaliste Michel Noblecourt 7, de nombreux observateurs passent sous silence cette donnée fondamentale: la conjoncture de crise désarme les travailleurs et leurs organisations de lutte, les syndicats.

Enfin, toujours objectivement, la «désyndicalisation» affaiblit les capacités du mouvement syndical à construire des rapports de forces favorables à celles et ceux qui vendent leur force de travail et à faire reculer le patronat et les gouvernements favorables aux intérêts privés 8.

Périodiquement énoncé, le constat réitère le paradoxe: les salariés désertent les syndicats au moment où ils en ont le plus besoin. Dans le cas français, la question des effectifs a été, dès le départ, entourée de brouillard et donc de polémique 9. Sauf en d’exceptionnelles conjonctures (1918, 1936, 1946), le taux de syndicalisation n’a jamais dépassé dans l’hexagone 25%. La crise économique ouverte au milieu des années 1970 a entraîné une perte d’adhérents équivalente aux deux tiers, de telle sorte que depuis 1990 le taux d’adhésion oscille autour de 8% toutes organisations confondues. Le pourcentage est une moyenne qui subsume des situations contrastées. Dans le secteur public et la Fonction publique d’État, la densité syndicale est plus élevée, notamment chez les enseignants, alors qu’il existe de véritables déserts syndicaux dans les PME, chez les précaires et les chômeurs 10. Faute d’implantation, comment mobiliser? Faute de présence directe dans l’entreprise jouent l’expression et l’activité des unions locales interprofessionnelles et les interventions du niveau national. A la mi-2009, il est difficile de percevoir si la crise entraîne une nouvelle chute du taux de syndicalisation. Rares sont les manifestations antisyndicales de droite. Des salariés ont appuyé la loi sur le travail le dimanche dans le commerce, finalement promulguée le 11 août 2009. A l’ultragauche (ou mouvance anarcho-autonome), Julien Coupat, principal suspect dans l’affaire des sabotages contre la SNCF, formule une appréciation minoritaire: «Ce ne sont certainement pas les bureaucraties syndicales, plus vendues que jamais, qui vont importuner le pouvoir en place, elles qui depuis deux ans dansent avec le gouvernement un ballet obscène» 11. Ponctuellement ce type de discours est tenu par des militants d’entreprises en difficulté qui jugent dérisoire l’aide apportée par les confédérations à leurs luttes. Ainsi Xavier Mathieu, délégué CGT de Continental à Clairoix, influencé par Lutte ouvrière, confie sa rancœur à France Info le 17 août 2009: «La CGT, on ne les a pas vus. Les Thibault et compagnie, c’est juste bon qu’à frayer avec le gouvernement, à calmer les bases. Ils servent qu’à ça, toute cette racaille» 12. Plus modérée dans sa tonalité, l’autre gauche trotskiste, le Nouveau parti anticapitaliste (NPA), évoque le recul de la mobilisation entre le 21 janvier et le 13 juin 2009 ainsi que «la maigreur des résultats» pour «mettre en question la politique des directions syndicales» 13. La presse écrite, radio, télévision, dans son ensemble reprend les thèmes de l’idéologie dominante: condamnation de l’extrémisme, approbation d’un syndicalisme responsable 14. Au total, la conjoncture idéologique n’est pas porteuse d’un anti-syndicalisme systématique comme ont pu l’impulser Jean Montaldo, François de Closets et leurs émules 15.

Les remarques sur le climat intellectuel conditionnant la syndicalisation permettent de passer de l’analyse des facteurs objectifs de l’affaiblissement syndical à l’examen des facteurs subjectifs à dominante endogène.

Le successeur de Pierre Bourdieu au Collège de France, Pierre Rosanvallon, a développé avec le plus de talent la thèse de l’individualisme opposé à l’esprit collectif de la période antérieure dans La Question syndicale 16. Vue simpliste, pour au moins deux raisons. Tout d’abord, depuis 1789, la Révolution française est accusée d’avoir imposé le primat de l’individu qui, selon Alexis de Tocqueville, a détruit chez les Français le goût de l’association. En second lieu, le processus d’individuation croissant, pour prendre le vocabulaire plus précis d’Yves Clos et Lucien Sève, va de pair avec une intensification de la socialisation. Ce qui est pertinent, en revanche, c’est de constater et d’interroger l’affaiblissement des représentations collectives. Dès 1955, Maurice Merleau-Ponty promouvait dans Les Aventures de la dialectique un «a-communisme». L’intervention soviétique en Hongrie et le rapport Khrouchtchev amplifiaient en 1956 les interrogations, fissurant le mythe de l’URSS que la victoire de Stalingrad avait consolidé. La fin tragique du maoïsme, la disparition de l’Union soviétique autorisent François Furet à proclamer «le passé d’une illusion», Francis Fukuyama «l’arrêt de l’histoire». Kant et Nietzsche reviennent en force. Installé dans le postmoderne, le monde, selon la formule de Jean-François Lyotard vit sur «la mort des grands récits». No future. En Europe, plus qu’en Amérique latine, la dénaturation du marxisme par le stalinisme a calciné tout espoir en une révolution. L’absence de perspectives historiques plaque au sol l’action syndicale et les luttes sociales, emprisonnées dans le court terme et la correction des abus les plus criants.

La désintégration de l’idée communiste s’est directement traduite dans le champ partisan avec l’effondrement électoral des PC en France, en Italie, en Espagne que n’a pas compensé la légère progression de l’extrême gauche toujours divisée et handicapée par une culture minoritaire. Dans ce contexte, les partis socialistes, délivrés de la crainte «bolchevique», ont dérivé à droite au point de ressembler au Parti Démocrate étatsunien. Selon une formulation discutable, le mouvement social se trouve ainsi privé de tout «relais» politique, de toute stratégie alternative.

Conséquence ou concomitance, le libéralisme économique et les différents partis de droite qui le véhiculent dominent le champ politique et idéologique. L’hégémonie idéologique détient la légitimité électorale. Ce second facteur «subjectif» paralyse grandement le mouvement syndical. Elu le 7 mai 2007, Nicolas Sarkozy n’a eu de cesse de marteler que son programme de réforme a été adopté par les Français et donc que les syndicats sont dans l’obligation de l’accepter. Ils sont placés devant l’alternative: ou s’associer à la mise en oeuvre pour montrer leur utilité ou s’opposer en manifestant ainsi leur caractère antidémocratique et donc leur dangerosité.

Le piège sarkozyste a d’autant mieux fonctionné que les syndicats sont menacés par l’institutionnalisation. Dans un excellent article sur les cadres mentaux des leaders syndicaux français, Sophie Beroud et Karel Yon ont bien mis en évidence dans l’attentisme observé par la CGT au cours du premier semestre 2009, le rôle de la peur de déstabiliser le pouvoir associé à l’intériorisation de la faiblesse numérique des syndicats, de la démobilisation du secteur privé et d’une acceptation non critique de l’autonomie du champ syndical 17.

Le troisième facteur endogène de ce qui est appelé «la crise du syndicalisme» réside dans son institutionnalisation. Le phénomène se perçoit aux trois niveaux, international, européen, national. A l’échelle mondiale, le constat remonte quasiment aux origines. Les internationales syndicales FSI, ISR, CISC puis FSM, CISL, ne sont pas construites sur des adhésions directes mais sur l’affiliation d’organisations nationales. Leur fonctionnement diplomatique est synonyme de bureaucratisation et leur activité, principalement de représentation auprès des organismes internationaux, OIT, ONU, leur imprime un esprit et leur dicte des pratiques institutionnels. La CSI qui regroupe la majorité des confédérations nationales depuis 2006 18 entreprend une rénovation du syndicalisme international tout en étant confrontée aux mêmes pesanteurs structurelles que ses devancières.

La Confédération européenne des syndicats, si bien étudiée par Corinne Gobin, fonctionne au consensus. Elle s’identifie à la construction européenne, promouvant en 2005 le projet de Traité constitutionnel européen (TCE). Engagée dans le «dialogue social», lexie qu’elle adopte en 1984, la CES dépend des subventions que lui accorde la Commission européenne. Ses réunions se tiennent avec la participation à titre «pédagogique» de représentants de la Commission européenne 19. Difficile dans ces conditions d’échapper à l’institutionnalisation.

Remarquons au passage que le phénomène de l’institutionnalisation est moins dénoncé que celui du discours révolutionnaire jugé mythologique. Affirmer que le mouvement ouvrier ait à pourchasser, dans son fonctionnement interne comme dans ses objectifs d’émancipation collective, tout contenu religieux, ne signifie pas reprendre la thématique de la sécularisation du salut chrétien dans la suppression de la domination de classe. La radicalité critique de la théorie de la plus-value opère une rupture et un dépassement de l’aspiration à une sortie du capitalisme. La négation de la négation est un moment indispensable. Le travail de Jean-Claude Monod qui distingue sécularisation-transfert et sécularisation-liquidation, est insuffisamment dialectique faute d’envisager les trois termes suppression-conservation-élévation.

Quant au niveau national, il comporte évidemment une gamme considérable de situations. Toutefois, la tendance à l’intégration du syndicalisme se perçoit de façon quasi universelle 20. En Europe, le processus s’est effectué à travers la formule des pactes sociaux 21. La crise a provoqué un début de distanciation en Belgique, en Allemagne, illustrée par le rapprochement d’une partie du mouvement syndical avec Die Linke. Encore ne convient-il pas de surestimer le processus. Revendications salariales et réactions aux licenciements demeurent modérées au pays d’Angela Markel. Le syndicalisme italien a réussi de vastes mobilisations contre la politique, notamment scolaire, de Silvio Berlusconi sans parvenir à construire une contre-attaque face à la crise. Les syndicats français ont attendu les résultats des élections prud’homales, le 3 décembre 2008, pour se réunir et entreprendre une première série d’actions. Les nouvelles règles de la représentativité posées par la loi du 20 août 2008 ont opposé CGT-CFDT favorables à l’instauration d’un seuil électoral (10% dans les entreprises et 8% pour les branches et l’interprofessionnel) aux organisations plus petites, FO, CFTC, CFE-CGC mais aussi UNSA, Solidaires et FSU. L’accord dans la fonction publique du 23 mai 2008, signé par toutes les organisations syndicales hormis CFTC et FO, prévoit que les comités de suivi des accords soient réservés aux seuls signataires. Sans constituer l’unique dimension du problème de l’intégration syndicale, l’importance accordée aux élections professionnelles et à la négociation indique bien une polarisation sur la scène institutionnelle.

In fine, dans la paralysie relative du mouvement syndical, il convient de prendre en compte la division sur l’interprétation de la crise. Les grandes lectures de la tourmente économique survenue en 2008 portent leurs échos au sein du syndicalisme. Même le nationalisme et le libéralisme «pur» influencent des militants. L’approche marxiste ou marxisante reste minoritaire, y compris à la CGT. Ce qui domine néanmoins et se retrouve dans le discours de la CSI, qui appelait le 17 octobre 2008 ainsi que le 7 octobre 2009 à la revendication mondiale d’«un travail décent», relève de la régulation, une ligne social-démocrate molle s’intéressant à une meilleure répartition des richesses et non aux conditions de leur production. La CES s’inscrit dans une telle visée réformiste. Le 27 septembre 2008, elle adoptait à Londres une résolution consacrée à la crise du capitalisme financier. Dans ce texte 22, la centrale européenne rend responsable Wall Street, Londres et les autres places financières du séisme qui a placé le monde au bord du gouffre. Il convient de tourner le dos au consensus de Washington. Les revendications mises en avant comportent un versant mondial et un versant européen. L’ensemble comporte huit points: l’injection d’argent public dans les institutions financières; un contrôle renforcé de l’endettement bancaire; une réglementation mondiale et européenne; des investissements dans l’économie réelle 23; une aide aux travailleurs fragilisés; une réponse européenne à la crise favorisant salaires et protection sociale; un retour d’attention aux politiques publiques et à la réduction des inégalités; un engagement européen pour le droit des travailleurs, des emplois stables, un système de négociations collectives.

Sans être inintéressant, le programme de la CES demeure imprécis et peu contraignant. Aucune exigence n’est posée. Ainsi, à propos de l’injection d’argent public dans les banques, il est seulement demandé «un contrôle public». CGT, CFDT, FO, CFTC appartiennent à la CES et interprètent différemment son programme. Ce PPCM syndical (le plus petit commun multiple) permet à l’Intersyndicale l’occasion de se retrouver sur une base commune qui n’abolit pas les divergences. Alors que la CFDT campe sur des options réformatrices, FO, Solidaires, FSU avancent des revendications plus radicales tandis que la CGT essaie une position médiane peu lisible. Ces dissentiments sont complétés, voire renforcés, par des conceptions divergentes des formes d’action. Là encore, la CFDT se situe en flèche sur le modérantisme tandis que FO et Solidaires prônent la grève générale, la CGT se situant encore sur une position moyenne.

Les possibilités d’un renouveau syndical

En 1871, Benoît Malon publie Les Trois défaites du prolétariat français. La révolte des Canuts en 1831 et 1834, la Révolution de 1848, la Commune de 1871 se terminent par une répression atroce. La campagne «Guerre à la guerre» conduite par la CGT est contredite par le ralliement de Léon Jouhaux à l’Union sacrée lors des obsèques de Jean Jaurès, le 4 août 1914. La vague de grèves qui a déferlé sur le pays en 1919-1920 a échoué et finalement abouti à la scission entre la CGT et la CGT-U. Les conquêtes du Front populaire sont remises en cause par les décrets Daladier dès novembre 1938. Vichy supprime les syndicats libres de 1940 à 1944. A nouveau, les avancées sociales réalisées à la Libération sont arrêtées par le déficit des grèves de 1947-1948 et la scission entre la CGT et FO. Un regain du syndicalisme se produit autour de 1968, mais ce moment, qualifié parfois d’apogée du syndicalisme 24, se défait dès 1976 et les épreuves se succèdent par la suite avec la victoire en trompe-l’oeil du mitterrandisme, le déclin du PCF et l’avènement du sarkozysme.

Au cours de son histoire, le mouvement ouvrier a donc subi de lourdes défaites. La tragédie du stalinisme, au-delà de l’URSS, a imprégné des collectifs de militants importants en France, en Espagne, en Italie et jeté un discrédit durable sur le marxisme et les projets de transformation anticapitaliste. De ce fait, le mouvement syndical qui a traversé des crises internes considérables, a su opérer des transformations d’ampleur comme le passage du syndicalisme de métier au syndicalisme d’industrie et de ce dernier au syndicalisme de l’Etat social 25.

Au début du XXIe siècle, comme nos observations l’ont montré, le syndicalisme traverse une nouvelle phase de tourmente et il répond très difficilement aux défis de la crise économique de la fin de la première décennie du siècle. Son destin se résout-il au dépérissement ou à l’intégration? Sans prendre ses désirs pour la réalité et en conjuguant, selon la formule de Romain Rolland reprise par Antonio Gramsci, le pessimisme de l’intelligence et l’optimisme de la volonté, quatre dimensions de la situation contemporaine laissent entrevoir la possibilité d’un redéploiement du mouvement syndical.

Tout d’abord, la relation base/sommet s’est modifiée. Le phénomène délégataire n’a jamais existé de manière absolue. L’usage d’Internet n’est encore réservé qu’à la partie la plus formée du salariat. La constitution de réseaux n’abolit pas l’existence d’un pouvoir. Selon une juste formule de David Forest, il le rend «invisible» 26. Il n’empêche, sans tomber dans un technologisme naïf, que les moyens modernes de communication et Internet au premier chef favorisent un développement des échanges intersubjectifs. La circulation des idées ainsi établie réduit le monopole du savoir des dirigeants. Elle permet des mobilisations rapides, illustrées en février 1997 par les pétitions anti loi Debré.

L’époque n’offre pas seulement des moyens inédits pour lutter, elle invite à la révolte, tant la violence «systémique» du capitalisme 27 saute aux yeux. La crise économique exacerbe les tendances du capitalisme financier consacrées par le consensus de Washington. En témoignent les motifs des séquestrations dues à la colère devant le contraste entre les licenciements «secs» et les parachutes dorés, entre les aumônes accordées par l’Etat aux chômeurs et les aides généreuses et quasiment incontrôlées attribuées aux banques et à l’industrie automobile.

Un sondage CSA-L’Humanité réalisé les 26-27 juillet 2009 et publié le 31 auprès de 1000 personnes âgées de 18 ans et plus, montre que l’opinion des salariés est largement partagée par l’ensemble de la population.

Encart n°1

 

Question : Selon vous, qu’est-ce qui explique principalement la réaction de ces salariés ?

 

Ensemble en %

Attitude par rapport aux séquestrations

en %

 

 

condamne

comprend

approuve

* Le sentiment d’injustice concernant les rémunérations des salariés et celles des actionnaires et des hauts dirigeants.

44

23

43

60

* Le sentiment que la fermeture du site ou le plan de licenciement est d’abord motivé par des considérations boursières.

38

19

37

54

* La peur du chômage et de ne pas retrouver un nouvel emploi

37

38

42

25

* Les conditions de départ et de licenciement jugées insuffisantes

17

14

19

15

* L’insuffisance ou la mauvaise qualité du dialogue social dans ces entreprises

14

21

13

12

* Le sentiment que l’implication des salariés dans l’entreprise n’est pas récompensée

13

7

15

11

* La présence et l’influence de l’extrême-gauche dans ces mobilisations

11

42

7

1

Nb : le total est supérieur à 100 %, les interviewés ayant pu donner deux réponses.

 

De telles indications ne suppriment pas les difficultés présentes, elles en révèlent un fondement possible.

L’aspiration à la justice, le refus des privilèges constituent des vecteurs essentiels de la mobilisation. De surcroît, il existe chez les salariés une conviction profonde que l’unité est une nécessité face au bloc patronat-Etat. Le «tous ensemble» contre le contrat premier emploi (CPE) en 2006 a conduit à la victoire. L’intersyndicale réunissant les huit organisations syndicales françaises, les cinq «représentatives» au niveau interprofessionnel, CGT, CFDT, FO, CFTC, CFE-CGC, et les trois sectorielles, UNSA, Solidaires, FSU, s’est de nouveau mise en place après les élections prud’homales du 3 décembre 2008. Elle a organisé cinq journées d’action:

29 janvier 2009: 2,5 millions de manifestants (1 million selon la police)

19 mars 2009: 3 millions de manifestants (1,2 million selon la police)

1er mai 2009: 1,2 million de manifestants (456000 selon la police)

26 mai 2009: actions diversifiées sans évaluation numérique

13 juin 2009: 150000 manifestants (71000 selon la police)

Ascensionnel de janvier à mars, le mouvement plafonne le 1er mai et s’étiole par la suite L’unité d’action, «un acquis de la période» selon un excellent chercheur 28 n’a pas provoqué la dynamique qui pouvait être escomptée. Pourquoi? A la différence de 2006, la mobilisation de 2009 n’était pas en «contre» mais en «pour». Les facteurs de paralysie syndicale ont joué d’autant plus fortement que l’entente était réalisée sur une base minimale, hausse des salaires (sans fixation d’un taux de SMIC), sauvegarde des services publics (sans engagement sur la défense de la Poste), moratoire sur les licenciements, selon la «déclaration commune» du 5 janvier 2009. Relance et réglementation de la sphère financière sont réclamées. L’ampleur de la plate-forme revendicative n’empêche pas qu’elle soit floue. Les journées d’action, probablement trop espacées (en particulier du 29 mars au 1er mai, fête chômée qui distancie les travailleurs de leur entreprise) n’ont pas été accrochées aux luttes concrètes, notamment des enseignants du supérieur (non appuyées par le primaire et le secondaire), des employés de la distribution opposés au travail du dimanche, aux postiers hostiles à l’ouverture du capital de l’établissement public, aux personnels de l’hôpital dressés contre la loi Bachelot.

«Nous avons perçu très tôt que l’Intersyndicale freinait le développement de l’action sans trouver comment inverser la tendance sans porter le chapeau de la rupture de l’unité» (entretien avec un dirigeant du SNEP-FSU, 15 avril 2009). Etre dedans et peser du dehors, la FSU n’avait pas la puissance pour le faire. La force de l’unité réside d’abord dans l’unité de la force. Le syndicalisme transformateur se trouve confronté à cette difficulté qui n’existe pas seulement en France mais dans de nombreux pays et à l’échelle internationale (CES, CSI). L’aspiration à l’unité est un levier dont l’usage positif requiert une claire vision des objectifs à atteindre et un va-et-vient constant entre l’organisation syndicale et les salariés à mobiliser 29.

Enfin, le quatrième élément favorable à l’action collective se trouve dans le foisonnement des initiatives. Certes le niveau des grèves a chuté et cependant la conflictualité anime encore les rapports de travail sous des formes plus difficiles à appréhender sur le plan statistique 30. La moindre capacité des syndicats à intervenir sur l’interprofessionnel est compensée par une floraison d’initiatives illustrée depuis la crise par le lancement d’un «Appel des appels» pour constituer une coordination des luttes entre personnels de la santé, de la justice, de l’information et de la culture 31 et le refus de 300 professeurs des écoles d’appliquer la réforme Darcos qui aboutit, lors d’une Université d’été des «désobéisseurs», les 26 et 27 août 2009, à l’établissement d’une charte et la constitution d’une caisse nationale de solidarité 32.

 

Un tableau des initiatives contestatrices du capitalisme et de la politique réactionnaire du pouvoir peut être dressé sur la base d’une tripartition.

 

Encart n°2 : Tableau des associations extra syndicales participant au mouvement social en France

 

Thématiques transversales

Féminisme

CADAC, Ruptures, MLF

Alter mondialisme

ATTAC

Ecologie

CSCV, Amis de la Terre

Famille

CSF, MPF

Droits de l’homme

LDH, MRAP

Mouvement gay

Acadie, FHAR

Antifascisme

Ras le Front

Antiracisme

SOS-Racisme

Mouvement anti consommation et anti pub

RAP, Paysage de France, Ethique sur étiquette

Critique de l’information

ACRIMED

Défense des services publics

CNCDDSP, Appel des appels

Education

Réseau des enseignants du primaire en résistance

Problèmes spécifiques

 

Logement

DAL, DD!, CDSL, CNL

Action anti-Sida

Act Up

Soutien aux immigrés

Gisti, Cimade, Réseau Education sans frontières, CSP, MOM.

Parents d’élèves

FCPE

Clubs de pensée

Réflexion et formation

Copernic, OMOS, Raison d’agir, Universités populaires, MPEP (scission d’Attac)

 

Handicapée par les ambitions personnelles, les rivalités entre organisations, les désaccords politiques conduire à des scissions comme à Attac-France, la dynamique de la contestation extra-syndicale révèle une capacité de résistance à la fois diversifiée et consistante. Pourquoi cette richesse militante reste-t-elle sans effet dans le champ partisan?

Remarques finales

Contrairement à la thèse de Francis Fukuyama, l’histoire n’est pas arrêtée. Les protagonistes, le terrain de la confrontation avec ses contradictions, les enjeux s’imposent comme une réalité que la crise met en évidence. Pourtant, elle reste à écrire, l’aventure d’émancipation collective, ni pré-composée, ni même inévitable. Possible simplement. Après la répression de l’insurrection hongroise en 1956, Maurice Merleau-Ponty avançait que «la vérité est que le réformisme n’est pas une vieille lune: il est seul à l’ordre du jour» 33. Avec l’effondrement de l’URSS, le constat est devenu un lieu commun. La dure leçon du réel, l’hégémonie du libéralisme et les soubresauts du capitalisme manifestent son unilatéralité. La réforme ne se concrétise que si elle est propulsée par une visée transformatrice et la révolution n’a de chance d’advenir que si hic et nunc des améliorations tangibles sont apportées au quotidien de l’exploitation. Le futur du syndicalisme s’inscrit dans cette problématique. Si cette dialectique de l’immédiat et du long terme n’est pas mise en mouvement, le futur combinera conjonctures d’oppression et moments d’explosions comme il s’en est produit dans les banlieues françaises en 2005 et en Grèce au début 2009. Le pire n’est pas toujours sûr et Sébastien Leprestre de Vauban, le poliorcète (spécialiste des fortifications militaires) de Louis XIV, aimait à dire: «Aucune citadelle n’est imprenable.»

René Mouriaux. Pour s'abonner à la revue Contre temps : http://www.contretemps.eu/node/56

Note

Le présent article est extrait d’une communication que René Mouriaux a été invité à présenter devant l’Associação de Estado de Trabalho, à Campinas, Brésil, le 29 septembre 2009.

Notes

1 Anne-Marie Grozelier, Pour en finir avec la fin du travail. Paris, Editions de l’Atelier, 1998.

2 Dominique Reynié, «La fonction publique contre le salariat privé», L’Humanité, 28 mars 2009.

3 Migreurop, Guerre aux migrants, Paris, Syllepse, 2007.

4 Armand Mattelart, La Globalisation de la surveillance. Aux origines de l’ordre sécuritaire. Paris, La Découverte, 2008.

5 Chronique Internationale de l’IRES, n°119, juillet 2009.

6 Qui se revendique de Marcel Mauss: cf. Annie Kahn, «La différence de traitement entre salariés et dirigeants exacerbe la violence. Pour le sociologue Norbert Alter, la multiplication des agressions est une «réponse au mépris»», Le Monde, 18 juillet 2009.

7 Michel Noblecourt, «Les syndicats cherchent de nouvelles armes», Le Monde, 31 juillet 2009.

8 En science politique, la lutte des classes demeure «un gros mot» pour le courant dominant qui ne perçoit pas que sa dénégation participe du phénomène.

9 René Mouriaux, «La syndicalisation en France», Historiens et géographes, n°350, octobre 1995, p. 363-376. Le bilan est antérieur aux travaux de Dominique Labbé.

10 «La syndicalisation en France», Politix, n°85, 2009, p.1-86.

11 Julien Coupat, «La prolongation de ma détention est une petite vengeance.», Le Monde, 26 mai 2009.

12 L’Humanité, 18 août 2009, p.15.

13 Jean-Philippe Dives, «Luttes sociales. Après la première vague», Tout est à nous, n°2, juin-juillet 2009, p.3. Cet article synthétique résume les analyses proposées par Rouge et par son successeur Tout est à nous, au cours du premier semestre 2009.

14 Dans la conjoncture actuelle, la recherche sur le syndicalisme, divisée en plusieurs courants, libéraux, régulationnistes, bourdieusiens, marxistes, ne pèse guère sur l’opinion et les médias utilisent les chercheurs pour illustrer leurs propos plutôt que pour conduire une véritable réflexion sur les luttes sociales.

15 Jean Montaldo, La Mafia des syndicats, Albin-Michel, 1981 ; François de Closets, Tous ensemble. Pour en finir avec la syndicratie, Seuil, 1988.

16 Pierre Rosanvallon, La Question syndicale, Calman-Lévy, 1998 [1988].

17 Sophie Beroud, Karel Yon, «Face à la crise, que fait le mouvement syndical?». ContreTemps, printemps 2009, n°3, p.15-26.

18 René Mouriaux, «2006. L’unité syndicale internationale. Pour quel dessein?», La Pensée, n°352, octobre-décembre 2007, p. 81-90.

19 Anne Catherine Wagner, Vers une Europe syndicale, Bellecombe-en-Bauges, 2005, p.31 et 43.

20 L’intrication du syndicalisme et de l’Etat est particulièrement poussée en Afrique (Algérie, Egypte, etc.), en Asie (Chine, Vietnam, etc.).

21 «Les pactes sociaux», Chronique Internationale de l’IRES, 1994, n°35. Asbjörn Wahl, «L’héritage idéologique du pacte social en Europe», in René Mouriaux, Jean Magniadas (dir.), Le Syndicalisme au défi du 21e siècle, Paris, Syllepse, 2008, p.121-138.

22 CES, «Priorité aux politiques publiques, à l’économie réelle et aux salaires», L’Humanité, 3 octobre 2008.

23 Le syntagme d’économie réelle s’impose aux Français à la mi-2008, selon le grand linguiste Alain Rey : «C’est la première fois que j’entends parler d’«économie réelle».», L’Humanité, 21 octobre 2008.

24 Michel Pigenet, Patrick Pasture, Jean-Louis Robert (dir.), L’Apogée des syndicalismes en Europe occidentale, Paris, Publications de la Sorbonne, 2005.

25 René Mouriaux, Crises du syndicalisme français, Paris, Montchrestien, coll. Clefs, 1998.

26 David Forest, Le Prophétisme communicationnel. La société de l’information et ses futurs, Paris, Syllepse, 2004.

27 Georges Labica, Théorie de la violence, Paris, Vrin, 2007.

28 Jean-Marie Pernot au congrès de l’UGFF-CGT en mai 2009. Olivier Mayer, «Regards sur le rassemblement du syndicalisme». L’Humanité, 18 mai 2009.

29 A la rentrée sociale de septembre 2009, la CFDT qui a largement contribué à l’essoufflement de la première vague de la lutte anticrise s’appuie sur cet essoufflement pour promouvoir une stratégie de micro actions, génératrice d’un enlisement prévisible. Finalement la proposition de la CGT d’appeler à la journée internationale d’action fixée le 7 octobre 2009 par la CSI a été retenue par l’Intersyndicale le 8 septembre 2009, réduite à six membres. FO et CFTC ont refusé de participer au rendez-vous intersyndical par désaccord stratégique.

30 Guy Groux, Jean-Marie Pernot, La Grève, Paris, Presses Sciences-Po, coll. Contester, 2009; Sophie Béroud et al., La lutte continue, Broissieux, Ed. du Croquant, 2008.

31 «L’appel des appels», L’Humanité, 9 janvier 2009.

32 www.resistance pédagogique.org.

33 Maurice Merleau-Ponty, Signes, Paris, Gallimard, 1960.