Publié le Dimanche 5 juin 2011 à 15h24.

Deux mobilisations...

 

Deux mobilisations importantes nous attendent en mai : contre le G8-G20 et contre le racisme dans le cadre de la campagne «d’ailleurs, nous sommes d’ici».

Le G8-G20 prétend garantir un système hégémonique et concerté de gouvernance mondiale. Pour tenir, il doit renvoyer aux peuples des États impérialistes, dans une unité ignorante des rapports de domination qui les traversent, l’image d’une minorité privilégiée. Celle-ci aurait intérêt à tenir à l’écart « toute la misère du monde » : celle des pays aux ressources pillées, aux populations asservies sur leurs propres terres ou surexploitées dans les pays où elles migrent.

Comme il a légitimé l’esclavage et le colonialisme, c’est le même racisme « fonctionnel » qui, loin de relever d’un instinct naturel, est stimulé par les dominants. Le but est de susciter des antagonismes entre ceux qui, conscients de leur communauté d’intérêts, risqueraient de se révolter sur des bases de classe. On produit alors des connivences détachées des réalités sociales, sur le seul fondement de l’origine, voire de la « race ». D’un côté, des citoyens, dotés de droits spécifiques, perçus et se vivant comme d’autant plus légitimes qu’ils sont « de souche ». De l’autre, les immigrés ou leurs enfants, auxquels le droit au séjour est, au mieux, concédé avec sursis, sous réserve d’inventaire bien entendu. Respect de l’ordre public et manifestation d’une volonté d’intégration exigés !

Les rapports de domination instaurés à l’échelle mondiale reposent ainsi sur la croyance, entretenue dans de larges couches – pourtant dominées elles-mêmes  – des pays dominants, que l’ordre établi leur serait finalement favorable et que, dans un monde de pénurie, les « avantages » qu’ils en tirent ne sauraient être partagés.

Longtemps le paradigme de référence fut d’ordre biologique : tout concourait, dans le discours politique, dans nombre d’essais, dans la littérature, dans l’iconographie, à affirmer ou suggérer la suprématie de la «race» blanche, voire aryenne. Le cataclysme auquel a conduit la mise en œuvre des thèses racialistes imposa un autre angle d’approche en vue de justifier aussi bien l’hégémonie des pays du Nord que le confinement des migrants. C’est, au-delà de considérations purement économiques, au nom de valeurs présentées comme « universelles » que le Nord a borné son pré-carré. Le paradigme culturel élaboré au cours des dernières années du xxe siècle, soit dès le début de l’ère postcoloniale, a trouvé son parachèvement le 11 septembre 2001, lorsque la figure de l’islamiste a permis, amalgame à l’appui, de constituer un ennemi commun à tous ceux qui entendaient s’affirmer comme garants de l’ordre mondial.

Dès lors, faisons pièce à l’implicite : c’est bien par le prisme idéologique du « choc des civilisations » que doivent être appréhendés des regroupements, purement économiques en théorie, tels que le G8 ou, avec davantage d’ambivalences, le G20.

Dans ce dernier regroupement, la Chine, par exemple, occupe une position spécifique. Alors qu’elle produit un véritable effet de sidération en tant qu’excellent élève de la classe capitaliste, elle apparaît aussi, héritage de cauchemars très anciens, comme une menace. Quant à ses migrants, le regard porté sur eux est également particulier car s’ils sont globalement perçus comme travailleurs et moins gênants que d’autres, leur isolement « communautaire » inquiète. Autre cas de figure : l’Arabie saoudite qui rachète son incompatibilité en termes « civilisationnels » par son allégeance à l’ordre établi.

Enfin, au niveau national, « the war on terror » devient l’alibi des politiques répressives mises en place dans presque tous les pays membres. Dans cette perspective, l’encouragement de sentiments islamophobes vise à souder les « peuples » par l’éveil, si ce n’est l’exaltation, de sentiments identitaires localement ajustables : en France, sur le thème de la laïcité et des valeurs de la République dont le brassage permet de brouiller allègrement les cartes.

Derrière l’affichage d’une simple volonté de bonne gouvernance, il y a donc bien une guerre larvée se référant à un enjeu de « civilisation » comme cœur des relations internationales. Les politiques prétendant maîtriser les flux migratoires, nourrissant les fantasmes d’invasion, tout comme les exigences croissantes d’intégration, n’en sont que le miroir. Est ainsi masquée la permanence des rapports de domination capitalistes, ces rapports qui, précisément, s’exposeront sans vergogne dans l’élégante Deauville où les riches se retrouveront en « sommet ». C’est pourquoi nous, antiracistes, anticapitalistes devrons être massivement présents le 21 mai, dans la ville ouvrière du Havre.

La commission migrations et antiracisme